Chapitre 1

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2 mars 2015

De grandes grilles se dressent devant moi. Je suis dans mes pensées tandis que mes jambes m'entraînent à l'intérieur du bâtiment. Je suis escortée par une policière d'une cinquantaine d'années. Je ne peux m'empêcher de ralentir le pas juste devant la porte. Je ne suis vraiment pas prête pour ce qui va suivre.

Ne supportant pas l'attente, la mégère me donne un léger coup de matraque dans le mollet. Je murmure quelques insultes à son égard mais pas assez fort pour qu'elle les entendent. Je tiens pas à me faire remarquer à mon arrivée ici.

A peine entrée, on m'emmène dans une salle pour me fouiller et mettre mes affaires personnelles dans un bac. Je ne les récupérerais que quand je sortirais. C'est à dire dans une éternité. Mon téléphone sera sûrement dépassé de mode d'ici là.

Je vais en prison et je m'inquiète pour ça ? Je réalise pas encore.

On me donne la combinaison orange des nouvelles et on me dit de l'enfiler. Bizarrement, je suis pressée de ne plus être là nouvelle pour passer à la combi bleue d'ancienne détenue. Je suis ensuite emmené vers une sorte de bureau où un homme m'attend assis sur une chaise.

- Bonjour mademoiselle Clark, me dit-il en relevant la tête d'un dossier avec une photo de moi dessus. Asseyez-vous.

Je m'exécute en observant une petite plaque posée sur le bureau sur laquelle est inscrit "Directeur Todd".

- Je suis monsieur Todd, le directeur de l'établissement. Je suis là pour vous expliquer les règles et vous aidez pour que votre séjour ici se passe sans encombres.

Séjour il a dit ? Il croit que c'est le club med ici ou quoi ? Non mais sérieux, je sais que je vais passer les pires années de ma vie. Et je ne sais pas si c'est la réalité mais de ce que j'ai vu dans les films, les prisons pour femmes sont presque pires que celles pour hommes.

- Pour commencer vous devez savoir que cette prison est mixte.

MIXTE ?? Comment ça mixte ? Avec des femmes de différentes cultures c'est ça ? Mais oui c'est ça. La mixité vient des différentes origines ou religions. Ça doit être ça. Ça ne peut que être ça.

- Les cellules sont par genre mais la cour et le réfectoire sont partagés par les hommes et les femmes. Les douches sont également séparées par genre, une pour les femmes et une pour les hommes.

Il se fout de moi là ? Donc je vais devoir cohabiter avec des hommes qui sont enfermés là depuis des années et sont sûrement en manque ? J'espère que c'est une plaisanterie. Mais où est-ce que j'ai été envoyé bordel. Ma vie est devenue une grosse farce. J'espère au moins que quelqu'un se marre en me voyant galérer comme ça. Je suis pas croyante mais si jamais il y a quelqu'un la haut, j'espère au moins qu'il s'amuse bien à me voir dans cet état sinon ça n'a aucun intérêt. En tout cas, moi ça me fait pas rire du tout.

Le directeur m'expose ensuite le règlement intérieur. On a très peu de liberté mais je m'y attendais, je suis en prison. Il me met en garde de rester discrète, il y a des criminelles très violent ici. Il est préférable que je reste dans mon coin si je ne veux pas m'attirer d'ennuies.

- Bon, je vais vous faire visiter votre chambre et vous présenter votre colocataire.

Quoi ? Pourquoi essaie-t-il d'enjoliver les choses comme ça ? Je suis en prison, je vais dormir dans une cellule avec une codétenue que je ne connais pas et qui va peut-être me détester. C'est loin d'être des vacances dans un hôtel 5 étoiles avec les potes. Mais je ne dis rien, je ne tiens pas à me mettre le directeur à dos dès mon arrivée.

Nous traversons les grands couloirs jusqu'à arriver dans une grande pièce avec pleins de cellules. Elles sont toutes vides puisque c'est l'heure de la pause. Le directeur s'arrête devant une gardienne qui était assise derrière un bureau dans le coin de la pièce.

- Allez me chercher Mia Stenton s'il vous plaît, lui demande-t-il.

La femme s'exécute tandis que nous continuons notre chemin. Nous nous stoppons devant une petite cellule de 10 mètres carré je dirais. Le directeur me fait entrer et me tend un petite sac avec ce qui semble être une brosse à dent, un gel douche et tout le nécessaire de base.

- Voici votre cellule, vous la partagerez avec Mia Stenton, elle a votre âge alors vous devriez vous entendre. Vous devrez faire votre lit, le nécessaire est dans le petit meuble dans le coin. Si vous avez des questions vous pourrez venir me voir ou vous pourrez les poser à votre codétenue. En parlant d'elle, la voici.

Il s'interrompt et je me retourne pour voir une fille aux cheveux d'un brun foncé avancer jusqu'à nous. Lorsqu'elle se rapproche de moi je remarque qu'elle a un regard brun perçant, tellement froid. Elle me dévisage de haut en bas, détaillant chaque partie de mon corps un sourire narquois au coin des lèvres.

- Alyssa je vous présente Mia, vous serez codétenue à partir d'aujourd'hui et pour pas mal de temps. Comme la pause se termine dans 5 minutes il est inutile de ressortir. Votre prochaine sortie sera pour le repas de midi. Vous avez 2h pour apprendre à vous connaître.

Le directeur nous fait entrer dans la cellule puis crie, à la gardienne en bas, de fermer les grilles.

C'est bon, ça commence. Je suis enfermée avec cette Mia. J'appréhende la suite. Je ne sais pas comment me comporter. Je ne connais pas cette fille, ni son comportement. Est-ce qu'elle va m'accepter ou me mettre la misère tout le long de notre cohabitation.

Je reste plantée devant la grille à observer les autres cellules se remplir. J'entends un raclement de gorge dans mon dos. Je me retourne, Mia est assise sur sa couche, elle me fixe comme si j'étais une énigme qu'elle pourrait résoudre par le regard.

- Alyssa, petite Alyssa, racontes moi tout, commence Mia en s'allongeant, les mains remontées derrières la tête.

- Euh.. j'ai rien à dire, je lui réponds en me retournant pour faire mon lit.

J'aurais peut-être pas du répondre comme ça. Je veux pas qu'elle le prenne mal, c'était pas méchant.

- Rien à dire ? Donc tu es arrivée ici en claquant des doigts ?

- C'est pas contre toi mais je ne veux pas parler de ça.

- D'accord, d'accord, s'exclame ma voisine en levant les mains en signe d'innocence.
Mais je finirais par savoir, me lance-t-elle suivi d'un clin d'œil.

Elle soulève le coin de sa couche pour en sortir une photo. Elle l'examine pendant quelques minutes avant de la remettre à sa place. Lorsqu'elle réalise qu'elle n'est plus seule dans la pièce, elle me lance un regard menaçant, l'air de dire "si tu touches à mes affaires je te bute". J'ai compris, je touche à rien.

Je me pose alors sur mon lit fait. Je suis exténuée après mon voyage. J'ai passé 5h dans une camionnette qui me transportait jusqu'ici. Je m'allonge en tournant le dos à Mia. Je regarde le petit bracelet en élastique que j'ai autour du poignet. J'ai eu le droit de le garder puisqu'il est trop fragile pour servir d'arme. C'est mon petit frère qui me l'avait fait. Il a l'air un peu ridicule mais il me tient à cœur. C'est tout ce qu'il me reste de lui. Mon seul souvenir. J'y tiens comme si c'était un bijou précieux.

Je laisse mes pensées vagabonder sur mon passé, l'époque où tout allait bien dans ma vie. Le moment où j'avais encore une vie libre, une famille, des amis.. Je faisais mes études tranquillement.

Merde ! J'avais pas pensé à ça. Quand je sortirais d'ici j'aurais aucun diplôme. Je vais faire quoi ? En tout cas je peux dire adieux à mon rêve de devenir médecin. Le peu d'argent que j'avais hérité de ma mère est parti en fumée, dans des études que je ne finirais jamais.

Je me remémore tout ça, en imaginant que je me trouve à l'endroit dans lequel je voudrais être et que je ne suis pas ici, dans une prison en plein milieu du Colorado.

Et c'est comme ça que je m'endors, espérant que mes rêves me transportent loin.

Mauvaise route [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant