*ZÉRO HUIT *

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  Je pénètre dans le restaurant dans lequel Elio m'a donné rendez-vous, je fais l'aller-retour entre les nombreuses tables du regard afin de le retrouver dans cette petite foule de personnes.

  Ses yeux ont l'air de briller lorsqu'il m'aperçoit enfin.

  " Wow, je ne pensais pas que tu pouvais être encore plus belle ! "

  " Merci, j'aurais pu dire de même. "

  " Quoi ? J'aurais pu ? Je me suis mis sur mon trente-et-un rien que pour mademoiselle " m'informe-t-il en étant sur la défensive.

  Je ricane, rapidement suivi par le jeune homme, sachant très bien que je le taquinais simplement.

  " Enfin bref, viens prendre place près de moi ! "

  Je m'assois en face de lui et notre faux rendez-vous peut enfin commencer.

  Nous mangeons, buvons et rigolons comme deux bons amis qui venaient de se retrouver après des années de séparation.

  Une fois minuit passé, je me décide à rentrer à la taverne, assez fatiguée et légèrement -beaucoup- sous alcool.

  J'ai tout de même insisté pour rentrer seule, on n'est pas si loin de l'auberge, et je veux marcher tranquillement avec moi-même pour dessoûler.

  Être avec quelqu'un ne fait qu'accroître mon excitation.

  Seulement, une fois seule, je regrette d'avoir rejeté sa proposition. L'existence de mes agresseurs m'est soudainement revenu en tête, et je suis prise d'une soudaine peur de les croiser.

  Encore quelques minutes, j'y suis presque.

  Au coin de ma rue, une silhouette est adossée contre le mur, une cape verte, penchant vers le marron due à l'obscurité, recouvre le visage de cette personne. Et en un rien de temps, je reconnais celui qui hante mon esprit depuis le jour où il est entré dans la taverne.

  " Levi ! " m'écriais-je plus fort que prévu, brisant le silence d'un mercredi soir.

  Il retire sa capuche et relève la tête en direction de ma voix alors que je me précipite vers lui, mais l'alcool n'aide pas, et je manque de faire connaissance avec le sol.

  Je me retiens au mur avant d'entourer l'homme de mes bras, ayant besoin de le sentir près de moi, comme cette fameuse nuit. Il ne bouge pas d'un pouce alors j'enfouie ma tête dans son cou, attendant le moment où il me repousserait, mais ça n'arrive pas. C'est finalement moi qui le défais de mon emprise. Les maigres lumières présentes dans la rue se reflètent dans ses yeux gris, à la différence qu'ils ne sont plus aussi glacials qu'auparavant, ils ont l'air affectueux à mon égard.

  " Tu fais quoi ici ? Enfin, je veux dire, il est tard ! Tu devrais être au QG, non ? C'est pas très sérieux Caporal Chef ! "

  " Je... "

  Il souffle faiblement, détournant son visage pour fixer le mur d'à côté.

  " Je suis venu m'excuser " finit-il par m'avouer.

  " Comment ça ? "

  " Je suis parti sans te prévenir l'autre jour " continue le haut gradé d'une traite.

  Il m'a l'air de mettre sa fierté de côté pour s'excuser ainsi.

  " Ce n'est rien, tu sais, " le rassurais-je.

  " Non...je ne veux pas que tu croies que cette nuit, c'était juste pour profiter de toi. Je me suis toujours promis que je ne ferais jamais ressentir à une femme ce que ma mère a du ressentir tout au long de ses années de travail. Comme je l'ai déjà dit, non, je ne regrette pas. C'est stupide, mais je ne suis pas à l'aise avec ce genre de chose. Pourtant, je voulais aussi te dire que je suis content d'avoir pu passer ce moment avec toi, et non avec une autre. Je me suis senti en sécurité. "

  Il n'avait pas autant parlé depuis le soir où il était en deuil de son escouade.

  " Je suis heureuse Levi," répondis-je tout simplement avec le sourire le plus sincère que je peux lui offrir.

  Oui, je suis heureuse qu'il me prenne en considération, je suis heureuse d'avoir marqué sa vie, je suis heureuse qu'il s'ouvre à moi.

  Bien que je triomphe de lui d'une dizaine de centimètres, il n'a pas de mal à se frayer un chemin vers mes lèvres. D'ordinaire, si distant, c'est pour une fois lui qui fait le premier pas vers moi.

  Peut-être que ce n'était qu'un rêve ? Que l'alcool me fait halluciner ? Et si c'est le cas, j'aimerais ne jamais me réveiller.

  Nos lèvres prennent le temps de se re découvrirent, ma main caressant délicatement sa nuque, et les siennes encore timidement poser sur mes joues, encadrant mon visage. Le temps nous appartient.

  Enfin, c'est ce que l'on pense, pourtant, il est malheureusement temps de se séparer.

  " Quand est-ce que nous pourrons nous revoir ? "

  " ... Un camp militaire est dressé près de la mer, " m'informe-t-il.

  Je comprends alors qu'il ne sera plus dans les parages pendant un temps déterminé. C'est vrai. Ils en attendent beaucoup de ce soldat, qui terrasse tant d'ennemi avec facilité.

  " Je vois... Passe à la taverne dès que tu reviens ici alors ! "

  Il acquiesce de la tête, et en un rien de temps, il n'est plus là, comme s'il n'était jamais vu. Sa présence me manque déjà, c'est inexplicable.

  Le lendemain, je me suis levée avant le soleil, rien que pour rejoindre les portes de Trost à temps. Même mon père est encore endormi. Je fais ma toilette le plus discrètement possible, mange un bout de pain et m'habille.

  Une fois prête, je sors de chez moi et tente de choper le fermier à la sortie de la ville qui livre souvent au District de bonne heure. Une chance pour moi, il est encore là. Après lui avoir montré l'argent que je lui offre pour m'amener là bah, je monte derrière la charrette et profite des paysages que ce trajet m'offre.

  Arrivée dans le centre de la ville, je remercie rapidement le fermier et me dépêche de rejoindre les portes. À ma joie, le bataillon est toujours là. Je joue des coudes pour me faufiler dans la foule qui les acclame tels des héros. En-tête du bataillon, le nouveau major Hanji Zoé, et à ses côtés, le caporal-chef Levi. Derrière, les survivants de la bataille de Shiganshina et les membres de la Garnison qui ont décidé de rejoindre le Bataillon d'exploration puisqu'une partie de leur travail a disparu depuis les récentes découvertes.

  L'homme me remarque finalement, juste avant le départ, et, une fois encore, je ne sais pas si c'est mon imagination, mais j'ai pu apercevoir un léger sourire sur son visage stoïque.

  Mon cœur fait des ravages à l'intérieur de mon corps, pourtant, j'aime cette sensation. Cette sensation d'aimer et d'être aimé.

Dans tous les cas, il fallait que je me contente de ça pour tenir les prochains mois sans la personne dont je peux désormais affirmer que je suis amoureuse.

L'homme à la tasse de thé | LEVI ACKERMANOù les histoires vivent. Découvrez maintenant