Chapitre 18

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De nouveaux rires, de nouvelles chutes, de nouveaux cris, une complicité insouciante qui se renforce encore à chaque jour de passé dans ce coin un peu perdu de campagne. De nouvelles soirées aux étoiles aussi, de nouvelles discussions, et une fin qui approche un peu trop vite à leur goût.

Cette soirée, c'est leur dernière. Pas la dernière de leur été, mais la dernière dans cette campagne profonde et vibrante. Ils essayent de faire comme si de rien, mais c'est dur - il y a tellement de choses qui semblent s'être jouées pendant ces quelques jours que retourner à leur vie quotidienne dans leur ville banale leur semble soudain une perte déchirante.

Comme d'habitude, ils sont sur le vieux matelas dans l'herbe, le nez vers les étoiles. Mais, à la différence de d'habitude, Hyunjin est allongé, la tête posée sur les cuisses de Seungmin, comme un signe qu'ils se sont apprivoisés durant ce séjour, plus rapidement qu'avec n'importe qui.

C'est comme s'ils avaient réussi à mettre le doigt sur quelque chose. Comme s'ils avaient réussi à rassembler quelques pièces de l'immense puzzle, si complexe que tout le monde semble abandonner un jour ou l'autre l'idée de le résoudre. Ils ont ce sentiment d'accomplissement, si rare d'ordinaire ; ils peuvent percevoir des bribes de satisfaction, de complétude, et même si c'est sans doute illusoire, qu'est-ce que c'est apaisant.

C'est pour que ça que cette semaine leur a semblé hors du temps. Tous les exploits leur ont soudain semblé possible, tous les rêves étaient permis, toutes les réflexions ont pu trouver un semblant de cohérence dans ce monde chaotique. Comme si effleurer un peu l'harmonie sauvage leur avait permis de raccorder les instruments de leur propre ordre intérieur. Mais ça, ils le perçoivent juste - des impressions brouillonnes, sans mots dessus. Ils savent juste qu'en cet instant, ils se sentent terriblement bien, et terriblement libres.

Ils regardent simplement le ciel, et l'infini s'étend sous leurs yeux. Ils semblent pouvoir le toucher du bout des doigts, à travers les brins d'herbes accrochés à leurs cheveux, à travers cette brise qui leur caresse l'épiderme, à travers la cacophonie harmonieuse de la faune et de la flore environnantes. Ils ont le sentiment qu'ils peuvent à tout moment s'envoler vers les cieux, survoler le monde et s'en échapper, comme Aladin sur son tapis volant. Eux se contenteront de leur vieux matelas un peu troué : du moment qu'il vole, c'est le principal.

Ils ne sont plus sur terre, mais pas complètement dans les cieux non plus. Ils voguent entre deux mondes, et c'est grisant. Ils errent sur ce fil invisible qui fait office de séparation entre les deux, et c'est déroutant. C'est comme s'élever si vite, si librement, tout en ayant conscience que l'on peut chuter tout aussi rapidement. Ce sentiment, Seungmin l'a toujours plus ou moins effleuré du bout des doigts - jamais il ne l'avait vécu avec autant d'intensité. Il l'a toujours pressentit sans pouvoir clarifier ce sentiment, n'en retirant qu'une peur sourde face à cette intuition indicible - il n'avait jamais pu y associer la joie de l'errance, l'euphorie du vent dans ses cheveux même lors de la chute. C'est grâce à Hyunjin, sans doute.

l'art de l'errance ˢᵉᵘⁿᵍʲᶦⁿOù les histoires vivent. Découvrez maintenant