Vrai gentil, Faux méchant (en auto-édition)

Chapitre 1

Assises au bar, Charlotte et moi discutions tranquillement en ce début de soirée. Nous avions découvert ce lieu quelques semaines plus tôt et c'était rapidement devenu notre QG. Les clients ici étaient un petit peu plus âgés et aisés que là où nous avions l'habitude de sortir. Et c'était appréciable. Revêtues de robes très moulantes, nous attirions les regards.

Il était bon de sortir avec mon acolyte. Les fous rires étaient assurés en sa compagnie. Les quelques verres que nous avions consommés avant de venir, nous avaient mises dans l'ambiance. L'objectif de la soirée était le même que d'habitude : ne pas rentrer seule. Je ne saurais pas dire depuis quand cela était devenu implicite à chacune de nos sorties. Plus qu'un objectif, c'était la condition sine qua non pour considérer une sortie comme réussie.

Depuis que j'avais décidé de quitter le foyer familiale et que je m'étais installée à la capitale, ma vie n'était faite que de ça. Travail, sorties et dodo rythmaient mon quotidien. L'amusement avait fini par devenir une nécessité pour évacuer la pression et les émotions négatives qui me rongeaient. Seule ou accompagnée, il fallait que je sorte et que j'aille faire la fête. De l'alcool qui coule à flot et des hommes qui s'intéressent à moi, voilà les deux seules choses qui m'étaient indispensables. J'aimais être le centre d'attention, que tout tourne autour de moi. Dans la vraie vie, j'étais continuellement mise de côté. Quelque peu insignifiante, les regards coulaient sur moi sans s'arrêter. Mais dans le monde de la nuit, j'arrivais à briller et à me démarquer. Je me sentais exister. J'avais enfin de l'importance et c'était moi qui menais la danse et décidais. C'était grisant. J'avais la sensation de pouvoir enfin vivre pleinement la vie que je désirais. L'alcool m'aidait beaucoup dans cette tâche. Il contribuait même en très grande partie à la réussite de cette vie. J'en usais et en abusais. Jusqu'à l'excès souvent. Jusqu'aux regrets parfois. Même si je n'avais pas développé de dépendance physique, j'avais clairement une dépendance émotionnel à cette substance. Il m'en fallait pour me détendre, il m'en fallait pour être bien, il m'en fallait pour m'amuser.

De la même façon, il me fallait un homme pour finir la soirée. Les jeux de séduction, la recherche de l'élu du soir, le premier baiser et l'invitation à plus, tout cela était pour moi beaucoup plus excitant que le sexe en lui même. Ça n'était pas tant l'acte que je recherchais, mais l'adrénaline du jeu et la sensation d'avoir gagné en fin de soirée lorsque je rentrais accompagnée.

Le barman nous interrompit en déposant deux verres devant nous sur le comptoir du bar.

— De la part des deux messieurs en costard là bas, nous dit-il dans un sourire taquin.

Nous nous retournâmes pour observer les messieurs en questions. La trentaine bien révolue, propres sur eux et avec une petite pointe d'arrogance machiste, les deux hommes nous saluèrent d'un signe de tête. Nous prîmes nos verres et les levâmes en l'air pour trinquer de loin avec eux et les remercier leur geste. Puis nous nous retournâmes vers le barman.

— Qu'en penses-tu Jérèm'? lui demanda Charlotte.

À force de trainer dans ce bar, nous avions pu faire la connaissance de Jérémy. Il était l'exemple parfait du fantasme du barman. Sexy à souhait, Apollon blond au sourire charmeur, il faisait baver d'envie toutes les filles du bar. Comme toujours, il portait une chemise blanche qu'il prenait soin de ne pas boutonner trop haut pour que l'on puisse admirer la musculature de son torse imberbe. Je ne pouvais d'ailleurs pas empêcher mes yeux de s'y aventurer. Jérémy commençait à bien nous connaitre. Il nous apportait souvent des verres de prétendants et aimait bien nous donner son avis.

— Un peu trop coincé pour vous, non ? répondit-il en rigolant. Ma main à couper que femme et enfants les attendent sagement à la maison.

— Ça c'est leur problème, pas le notre, lui rétorqua Charlotte dans un immense sourire sadique.