8 | 'LA VIE C'EST DUR'

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Durant les quelques semaines qui suivirent ce jour que je considèrerai toute ma vie comme dramatique suite aux débuts de mes scarifications, j'ai vécu comme un zombie dans ma maison, donnant à peine de mes nouvelles sur Twitter et Instagram, mes lives se faisant de plus en plus rares, mes vidéos devenant comme une sorte de légende urbaine.

On pouvait dire que j'avais touché le fond. De toute ma vie, cette époque est probablement celle qui a été la plus sombre.

Je ne dormais pas, enfin si on peut considérer du sommeil deux heures de repos en pleine nuit troublées par des cauchemars et des réveils en sursauts constants. Mon teint déjà habituellement assez pâle avait plutôt tourné au blanc cadavérique, contrastant bien mes cernes violettes qui paraissaient comme persister de jour en jour. Mon image dans le miroir me répugnait réellement, on aurait dit un zombie. Je ne me nourrissais plus que de pasta box ou de simples en-cas qui ne méritaient aucun effort à cuisiner.

Mes avants bras étaient recouverts de mutilations, et comme je ne leur laissait jamais le temps de cicatriser, mes cuisses se sont aussi retrouvées attaquées par mon mal-être et la lame de rasoir.

J'essaye toujours d'oublier cette période de ma vie, sans grand succès. Mais j'arrive à la cacher au fond de moi, l'enfermer quelque part, me disant que ce Kenma là, c'était un autre Kenma. J'avais juste subi un surplus d'angoisse, et j'avais craqué. Craqué sévèrement même.

Ça a duré trois semaines. Trois semaines où j'avais l'impression de décrépire, de devenir une sorte de squelette sur pattes, j'agonisais lentement et en silence, laissant l'abysse de mes souffrances et de mes pensées négatives m'envelopper tout entier.

Je jonglais ainsi entre les anti dépresseurs, les somnifères et les aspirines, me doutant plus que bien que ça n'était pas bon pour moi non plus. Je passais des heures sous la douche, complètement ailleurs, jusqu'à réaliser que l'eau était froide et que j'étais resté à fixer le mur carrelé sans rien faire, laissant le pommeau de douche collé contre mon torse.

Rien que de repenser à cette époque, j'ai envie de faire un bond dans le passé, de venir sauter devant mon ancien moi et de le secouer dans tous les sens pour lui dire que ça suffisait, qu'il ne pouvait pas rester comme ça plus longtemps, et que si ça continuait, il allait vraiment se laisser mourir.

Enfin, je ne peux pas le faire, et heureusement pour moi, quelque chose est arrivé. Un déclic.

Un jour, j'ai touché le fond. Vous allez me dire que j'étais déjà complètement au fond, seulement là, j'étais au pire du pire. Je ne sais pas si c'était les cauchemars, la vue de Kuroo dans mon esprit, la douleur qui me tiraillait dans le corps entier, mais j'en ai eu marre. J'en ai eu marre de m'accrocher à la vie dans le vide, alors que honnêtement, je pensais vraiment que personne n'était là pour moi.

Alors je suis allé dans ma salle de bain, ait attrapé ma bouteille de pilules de somnifère et en ai versé le contenu dans ma main. Je suis resté figé à le regarder en silence, me demandant vraiment si c'était la meilleure solution, puis j'ai fini par fermer les yeux et avaler tout le contenu.

Je me souviens particulièrement bien de ce que j'ai ressenti. Le vide. Je n'arrivais plus à penser correctement, j'avais un peu l'impression de fondre, et je me suis écroulé dans ma salle de bain, les yeux entrouverts, commençant à suffoquer.

Vous vous doutez bien que la deuxième tentative de suicide que j'ai essayé de faire dans ma vie n'a pas fonctionné non plus, sinon, je ne serais pas là aujourd'hui pour vous en parler.

Le moment où j'ai commencé à voir des points noirs danser devant mes yeux et les ténèbres m'envahir, quelqu'un est arrivé.

Je ne savais pas qui c'était. J'essayais d'ouvrir les yeux, mais je n'y arrivais pas, je n'arrivais pas à faire quoi que ce soit. J'avais l'impression d'être un pantin désarticulé, et rien que me souvenir de cette sensation me glace le sang.

Je me souviens qu'il m'avait enfoncé deux doigts au plus profond de ma gorge et instantanément, j'ai vomi tout ce que je venais d'ingurgiter. Il a continué à me faire vomir jusqu'à ce que je crache de la bile, puis il est sorti de la salle de bain.

J'avais rouvert les yeux faiblement, à moitié allongé dans mon vomi, me demandant au juste ce qu'il venait de se passer. Puis il était revenu et m'avait forcé à boire du lait. Je ne savais pas pourquoi. Et– non, zut, j'ai oublié pourquoi du lait. Il me l'a dit, me l'a répété, mais j'ai oublié pourquoi contre certains empoisonnements il fallait utiliser du lait. Tant pis.

En tout cas, quand ma vision a arrêté de se troubler, j'ai pu voir le visage de Keiji devant moi. Je n'avais aucune idée de ce qu'il faisait là, et j'étais bien embêté en voyant son air complètement paniqué, parcequ'il était déjà tout le temps anxieux à l'époque, à cause de Bokuto qui ne faisait que n'importe quoi et qu'il était donc forcé de réparer toutes les erreurs qu'il faisait alors qu'ils préparaient leur mariage.

Je me suis souvenu de la discussion que j'avais eu la première fois que j'ai rencontré Kuroo, comment je lui avais dit que je trouvais ça injuste que mon père se soit suicidé, et que tant qu'on a des gens qui nous aiment, on devrait s'accrocher à la vie, et que malgré la dépression il fallait se battre. Je n'en menais pas large, ce jour là. J'avais honte de moi, et j'ai toujours honte d'avoir essayé de m'ôter la vie.

Je m'en voulais d'avoir infligé ma tentative de suicide en plus sur les épaules d'Akaashi, il ne méritait pas ça. Et moi, sur le coup, j'avais pensé que je ne méritais pas de vivre.

Aujourd'hui, je le dis, mais justement, je méritais de vivre. La mort, c'est pour ceux qui sont prêts. Ce n'est pas une échappatoire, une façon de s'enfuir de ses responsabilités. La mort c'est pas ça. La mort, on ne peut pas l'utiliser comme prétexte parcequ'on se sent faible. Ce n'est pas la vie qui doit se mériter, c'est la mort. La vie, tout le monde l'a. La vie, c'est dur. La vie, il faut se battre. C'est la mort que tu dois essayer de mériter, après avoir réussi à te battre contre tes démons.

Certes, des fois, c'est injuste. Des fois, elle vient prendre des gens qui n'ont pas eu le temps de vivre. Mais c'est différent pour les gens comme moi. Pour les gens comme Keiji aussi.

Lui, l'avait bien compris, le jour où il avait essayé de se donner la mort et que son petit ami l'avait sauvé, qu'il devait se battre dans la vie. Il l'avait compris, et moi aussi, après un bout de temps, je l'ai compris aussi.

La vie, c'est dur. Mais au lieu d'essayer de s'en échapper, il faut la combattre. Combattre ce qu'il ne va pas.

Keiji l'avait compris, et lui, il allait mieux. Et ce jour là, moi aussi, j'ai su que je n'arriverai pas à me débarrasser de mes problèmes de manière facile, comme un lâche.

Aujourd'hui, Keiji pouvait passer devant la prison où son père était et lui faire deux doigts d'honneur sans avoir aucun regret.

Et moi, aujourd'hui, et bien, je m'apprête à achever tous mes problèmes une fois finale. Mais ça, c'est des spoilers, alors je ne vous en dis pas plus, et je vais retourner au moment où j'ai repris pleinement mes esprits.

~moi : essaye d'écrire des messages philosophiques et profonds nuls
Aussi moi : ne sait pas comment un suicide avec médicament ça se passe vraiment

Rip T~T
Enfin quand je vous ai dit que j'en avais pas fini avec l'angst c'est que j'en avais pas fini :0
Bref, Akaashi sauveur mdr ce mec est un héros.

Je vous vois dans deux jours >:3 !~

Venimeux [Kuroken]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant