Un peu.

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C'était un lundi matin, alors que ma mère grillait la moitié des feux de la ville parce que j'étais en retard à l'école et elle au travail. Je ne pouvais pas la juger, j'étais aussi stressée qu'elle... Je détestais par dessus tout arriver en retard en cours. Ma phobie numéro un.

Bon, peut-être pas à ce point...

Alors que nous n'étions plus qu'a quelques mètres du collège et qu'elle appuyait sans relâche sur l'accélérateur, un cycliste apparût au beau milieu du passage piéton.

Ma mère hurla après le « sombre idiot » en freinant de toute ses forces. Elle claqua violemment la portière de la voiture, plus pour l'insulter que pour lui demander si tout allait bien. Je pris ma tête entre mes mains. La honte...

Je descendis à mon tour de la voiture pour tenter de calmer le jeu, mais je reçus moi aussi une engueulade de ma mère qui me cria de rester en dehors de tout ça. Et bien, en plus c'était moi la nerveuse de nous deux !

Je rouvrais la portière dans un geste las et jetais mon sac sur mon épaule. Sans un regard vers elle, je m'éloignais pour rejoindre à pied le collège. Bien trop en colère à présent pour me rasseoir avec elle à bord de cette maudite voiture.

Je la semais rapidement alors qu'elle hurlait encore sur le pauvre garçon qui allait sûrement être en retard lui aussi. Je me dépêchais alors qu'il me restais encore dix bonne minutes de marche, et jetais un coup d'œil furtif à ma montre toutes les secondes. Finalement, j'allais y arriver.

Je marchais un peu plus vite encore, ne dépassant pourtant pas la limite entre marcher et courir. J'arrivais finalement devant le collège en six minutes au lieux de huit. Des élèves trainaient encore dehors et je remarquais qu'au loin arrivait le pauvre élève qui avait dû subir les foudres de ma mère. Je soupirais en m'empressant de passer le grand portail.

À la pause déjeuner, je me dirigeais vers le self comme tous les autres élèves. Aujourd'hui, Alyssa était absente et, étant ma seule amie, je me retrouvais seule. Je la maudis de tout mon être et mon regard s'arrêta sur le garçon de l'incident. Il était assis à une table vide. Non, pas vide puisqu'il y était. Je soupirais et m'avançais vers lui. Je pourrais m'excuser, ce serait un prétexte pour m'asseoir avec lui.

Je n'étais pas asociale, enfin pas vraiment, mais j'avais plus du mal à garder les gens près de moi. Je ne sais pas pourquoi, même quand je me comportais bien avec mes amis, il finissait toujours par se passer quelque chose. Une dispute, une trahison ou parfois, rien du tout. 

Je m'avançais vers la table et le garçon, caché sous la capuche de son sweat gris, releva des yeux surpris vers moi.

Je fus surprise à mon tour par l'intensité de son regard couleur émeraude et me détournai rapidement.

— Euh... Désolée pour ma mère. Elle est un peu sur les nerfs en ce moment.

— Pas grave, dit-il dans un demi sourire.

— T'es en quelle classe ? demandais-je curieuse de ne jamais avoir croiser ses pupilles pourtant inoubliables.

Après tout, il n'était pas difficile de le confondre avec un mur avec son sweat gris.

— Troisième 4 et toi ?

— Troisième 7.



Au début ce garçon m'avait paru débile. Tout ce qu'il racontait n'avait aucun sens. Mais il était drôle. Il parvenait toujours à me faire rire. Je remerciais finalement ma mère d'être aussi dramatique.

— T'es sûr que t'en veux pas ? demandais-je en prenant une nouvelle bouchée de ma délicieuse pizza.

— Oui, répondît-il amusé.

Je savourais en fermant les yeux. Hmm, je ne pourrais décidément jamais m'en passer.

Le soleil commençait déjà à descendre dans le ciel et le spectacle était magnifique vu de la colline. Je m'allongeais dans l'herbe pour mieux contempler ce chef d'œuvre.

— C'est pas bon de manger allongée.

— Ferme-la, bougonnais-je.

Il rit doucement et s'allongea près de moi.

— Tu viens souvent ici ? demandais-je la bouche pleine.

— Non. Enfin je venais, mais ça faisait longtemps que je n'était plus venu.

— Pourquoi ?

Il haussa les épaules, sa capuche recouvrant pratiquement ses yeux émeraudes qui, je devinai, étaient tournés vers le ciel.

— Pourquoi gardes-tu toujours ta capuche ? interrogeais-je à nouveau.

Il se tourna vers moi et je perçus une lueur d'amusement dans son regard. Je me perdis une nouvelle fois dans l'intensité de des iris.

Je me jetais sur lui alors qu'il s'était redressé sur ses coudes. D'un coup de main, je baissais sa capuche, dévoilant de courts cheveux d'un blond hypnotisant. Moi qui m'attendais à un crâne chauve... Pourquoi cacher ça ?

Décidément, tout chez lui semblait m'hypnotiser.

Il rabattit avec empressement le tissu sur sa tête.

— Mais arrête ! T'es trop beau sans ta foutue capuche !

— Quoi, avec je ne le suis pas ?

Je lui lançai un regard noir et il se contenta de rire calmement.

Cela faisait quelques mois déjà que je côtoyais Cem et jamais, au grand jamais, je ne l'avais vu retirer sa capuche. Il devait sûrement l'enlever en classe, mais sachant que nous n'étions pas ensemble, je ne pouvais pas voir ce spectacle.

— Bon ok, t'as gagné.

Je me retournais à nouveau vers lui alors qu'il dévoilait ses cheveux blonds. Je souris, satisfaite et me rallongeai alors dans l'herbe, piochant une nouvelle part de pizza.

Mais je me redressai rapidement en toussotant.

— Lys ? Ça va ?

Après une légère crise de toux, je lui répondis enfin :

— Je me suis étouffée !

Il leva les yeux au ciel dans un sourire. Cet idiot avait raison.

CemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant