Leaving Ebrea { Terminée }

Chapitre 11

Iris s'éloigne à grands pas et se réfugie dans la forêt. Elle sent son pouls s'affoler alors qu'elle foule le sol précipitamment. Elle sent son cœur se comprimer, si fort qu'elle doit s'arrêter. Elle se laisse tomber contre un tronc et glisse à terre. Le feuillage rougeoyant des feuilles automnales se brouille. Iris pleure. Elle a l'impression d'être de retour à cette matinée, celle de ses sept ans. L'odeur de sang, cette odeur métallique qu'elle a trop souvent côtoyée, vient se loger dans ses narines. Elle revoit le tapis de neige immaculé qui devient rapidement écarlate. Devant elle, une tête roule. Sa mère s'époumone, comme si c'était elle qui venait d'être décapitée.

Iris vomit, les souvenirs lui broient les tripes. Elle enfonce ses ongles dans le tapis de feuilles jusqu'à les écraser. Elle régurgite une nouvelle fois alors que des bruits de pas approchent. Iris n'arrive pas à bouger, tétanisée par sa mémoire. Elle pourrait jurer entendre les sirènes et les coups de feu. Elle se souvient des gens qui tombent comme des mouches, souillant le blanc de la neige.

- Iris !

Elle est secouée. Son estomac aussi. Elle le vide une nouvelle fois, sentant une main chaude la tenir. Sasha, elle est devant elle. Iris tente de se lever, mais ses jambes flageolantes ont raison d'elle. Elle retombe pathétiquement sur le sol.

- Pas besoin de te lever, reprends d'abord tes esprits.

- Qu'...Qu'est-ce que tu fous là ?

- Je voulais pas que tu te méprennes. J'ai bien vu ton regard quand j'ai reculé. Ça t'a touché et...

- Ça remonte à loin, ça ne me touche plus.

- Si, sinon tu ne serais pas dans cet état-là. Je... J'ai reculé parce que ça m'a étonné. Je... ta mère.... Enfin, mes parents ont déjà parlé de ta mère. Je m'en souviens. Ils se connaissaient, j'en suis sûre.

- Ça t'a choqué, je comprends Blondie.

- Oui, que tu puisses comprendre l'injustice des familles de félons.

Iris la regarde, bouche bée. Alors comme ça, elle n'est pas jugée ? Elle sent une chaleur se loger dans son cœur, un peu moins meurtri que quelques secondes auparavant.

Sasha, quant à elle, attrape la mèche de cheveux d'Iris pour la remettre derrière son oreille. Ses yeux scintillent, perlés de larmes. Sasha la prend dans ses bras alors que la soignante reste immobile.

- Je n'imagine pas ce que tu as pu vivre si ça te met dans cet état. Si tu veux en parler, ou tout simplement un câlin, je suis là. Les garçons aussi. Alors laisse-toi aller, montre-nous ton vrai toi.

Iris remercie Sasha d'une voix chevrotante et détourne sa tête. Elle ne pleure pas, mais ne veut pas qu'on la voit dans cet état. Question de principe. Sasha le comprend immédiatement et lui sourit, compréhensive. Elles restent silencieuses quelque temps.

Iris se relève dès qu'elle se sent calmée. Elle soupire longuement comme elle espérait que tous ses ressentiments partiraient en même temps que son souffle. Elle se baisse ensuite pour ramasser du bois et tend une bûche à Sasha.

- Je préfèrerais que les garçons ne soient pas au courant.

- Je comprends, approuve Sasha en acceptant la bûche.

Après avoir ramassé autant de bois et de brindilles qu'elles le pouvaient, Iris et Sasha retournent auprès du point d'eau. Les garçons sont secs et mangent une conserve de petits pois. Ils sourient tous deux en voyant le bois et l'acceptent les bras ouverts.

- Nous nous demandions où vous étiez parties. La nuit tombe dans trois heures à tout casser.

Les deux jeunes filles déposent leur chargement à terre alors que Tanguy commence à préparer le feu. Lylian tend à Sasha sa conserve et ils la partagent alors que Iris trempe ses pieds dans l'eau. Devant elle, de nombreux habits sèchent, propres. Elle avance vers les siens, qu'elle a lavé la nuit précédente. Ils sont secs, pour son plus grand bonheur. Elle les saisit et les approche de son visage, l'air satisfait. L'odeur et la crasse sont parties. Elle les range ensuite dans son sac et s'assied près de ses compagnons. Elle se lavera lors de son tour de garde, entièrement. Elle va enfin dire au revoir à la mauvaise odeur !