Les jours obscurs

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                  *JENNYFER*

Heureusement, la récréation sonna.

C'est de ta faute si t'as refusé d'attraper le bout de la perche que te tendait Nyme

<<Hé t'es nouvelle ?>>me demanda une fille. 

Une blonde qui portait sur son visage les marques du commérage nuit et jour comme je portais la marque de l'explosion qui m'avait défigurée.

<<Ouais. 

-C'est toi la bizarre>> me dit elle en voyant ma tête se balancer sous l'effet d'un tic, de droite à gauche, régulièrement. 

La bizarre. 

Ainsi, on m'avait déjà cataloguée et une fille que je n'avais jamais vue me l'avait appris.
Un pincement au coeur me donnait la nausée mais je n'en lassait rien paraître et la toisais insolemment.

<<Avoir une différence signifie être bizarre ? demandais-je. 

-Ouais. Surtout une comme la tienne.>> répliqua la poupée Barbie.

Elle attrapa mon téléphone qui dépassait de ma poche et, encouragée par le rire d'un garçon que je n'avais même pas remarqué, le jeta par-terre.

J'entendis le verre se briser et les larmes me montèrent aux yeux en pensant à la tête que ferait maman. Je n'en aurai pas un autre avant longtemps.

<<Il est tout neuf ce tel>> reprochais-je. 

Je me baissais pour le ramasser et, quand ma main eût touché l'appareil, elle l'écrasa de son pied, la semelle de sa Converse me  rentrant dans le dos de la main.

Un attroupement se formait, les personnes étant attirées par le bruit du téléphone brisé

Elle appuyait plus fort, au fur et à mesure que les élèves affluaient mais la douleur la plus dérangeante était celle qui écrasait mon cœur.

Garde ton calme, Jennyfer. 

<<Mais t'es folle ?>>

Quelqu'un fendit la foule d'élèves frémissants qui se délectait de la scène.

Les cheveux blonds soigneusement coiffés en chignon danseuse, la chemise blanche rentrée impeccablement dans le pantalon noir, Nyme arriva au centre de l' "attraction".

Elle se baissa brusquement, enleva le pied de la peste et lui dit d'un ton sec:

<<Tu veux être renvoyée ? C'est comme ça que tu accueilles les nouveaux ? J'espère que ton prochain collèges sera plus indulgent sinon tu risques de passer de mauvais instants.

-Elle va pas rester longtemps de toute façon l'attardée mentale, il y a des collèges spéciaux pour les gens comme elle.

-Elle t'a rien fait, et elle est sympa de ne pas avoir appelé un surveillant. Je te préviens, si elle est assez sympa pour te donner une deuxième chance et que tu recommences, j'irais tout raconter moi même à la CPE, ok ? D'ailleurs, si elle veut y aller maintenant, je l'accompagnerais !

-Non, c'est bon>> marmonnais-je. 

Mon téléphone marchait passablement, bien que le vitre soit brisée. Je me débrouillerai.

<<Pourquoi tu le défends, demanda la Barbie. Tu la connais ? 

-Non, mais on ne m'a pas appris à me comporter comme ça envers les gens que je ne connais pas.>>

La foule se dispersa et un garçon appela Barbie, qui s'empressa de rejoindre son Ken.

<<Ton tel marche encore ? demanda Nyme. 

-Oui. Mais tu sais je peux me défendre toute seule. 

-Oh tu me reproches ça aussi ? T'as du culot, je suis la seule à être intervenu en ta faveur. Maintenant, je suis honnête, t'es imbuvable. 

-Ouais je sais. On me le dit souvent.

-Et ? Et ça te fait rien d'être insupportable au possible ? Tu arrives à te regarder dans le miroir le matin?

-Non. Et c'est bien pour ça que je suis.>>

Ça a au moins eu le mérite de la faire taire.

Ouvrir les yeux [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant