« Léo ! Je ne pensais pas te voir ce midi ! Tes parents et ton frère sont arrivés il y a une demi-heure. Entre, je t'en prie. Fais comme chez toi. »
Je fais la bise à la mère de Gigi et accroche mon sac à main au porte-manteau avant de filer dans la cuisine pour me laver les mains. J'entends le petit groupe habituel en train de discuter vivement alors qu'une bonne odeur de poulet rôti éveille mes sens et me fait lécher mes lèvres.
Ma mère et celle de Gigi sont meilleures amies depuis la faculté et ont emménagé dans la même ville dès qu'elles se sont mariées. C'est tout naturellement que Gigi et moi sommes devenus très proches, car on se voyait régulièrement et on apprenait tout ensemble.
Même après que nous ayons tous grandit, nous avons gardé la tradition du repas dominical une fois par mois chez l'une des familles ou l'autre. J'aime ces moments et sans ça, la mère de Gigi n'aurait pas tenu le coup après la mort de Fred.
Cela faisait un moment que je ne les avais pas tous revus, mais avec la semaine qui s'annonce chargée, j'avais besoin d'une pause pour bien la débuter.
Arrivée sur la terrasse, je salue tout le monde d'un signe de la main avant d'embrasser le front de mes parents et de m'assoir à l'ombre. Nous prenons l'apéritif pendant une bonne heure, parlant de tout mais surtout de rien jusqu'à ce que le poulet et les pommes de terre au four arrivent sur la grande table.
« Alors, on ne m'attend pas ? »
Je sursaute en sentant sa main sur mon épaule et en relevant les yeux vers lui. Gigi vient tout juste d'arrivée et il perturbe déjà tous mes sens. Habillé d'un simple t-shirt bleu marine et d'un pantacourt noir, il me fait son habituel sourire de charmeur inconscient et s'assoit à côté de moi.
— Tu aurais pu prévenir, l'interpelle sa mère en commençant à couper le poulet. Regarde Karine, elle ne devait pas venir mais a pu se libérer et nous a prévenus. Tu devrais imiter ta sœur.
— « L'imitation ne donne jamais de bons résultats. L'originalité est la seule chose qui compte. » déclare Gigi avant d'amener un verre de vin à ses lèvres.
— C'est de George Gershwin, complété-je tout naturellement en évitant son regard pétillant sur moi.
— Je retrouve enfin ma Léo et pas celle qui s'acharne à m'éviter au boulot.
Je rougis malgré moi, cachant ma gêne avec ma paume de main alors que l'attention revient sur le plat que nous savourons pendant ce long repas.
Ma mère trouve le moyen de se réjouir de l'aveu de Gigi sur le fait que nous partons dans le sud tourner un épisode d'« Incroyables maisons d'amoureux » et arrive à faire la pire des remarques possibles :
— Je me suis toujours demandé pourquoi George n'avait jamais charmé Léonore ?
— Parce qu'elle fait pitié ! s'exclame mon frère avant que je lui frappe le bras.
— Tu connais Gigi. Mon fils est un romantique qui ne tient pas en place. Ça ne m'étonnerait pas qu'il ait un harem !
— Je suis là hein, intervient mon ami d'enfance. Et avec Léo c'est...
— Éternellement de l'amitié, complété-je en cachant mon amertume. Si Gigi a son harem, je suis bien contente de ne pas en faire partie !
— T'es trop laide pour ça !
Je frappe à nouveau mon frère et mon père est obligée de nous rappeler à l'ordre comme quand nous étions enfants. Je finis par tourner la tête vers Gigi et constate qu'il est bien gêné par la question, se souvenant surement du râteau magistral qu'il m'a donné il y a des années.
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The Man I (always) Love
Short StoryLéonore est amoureuse depuis vingt ans du même homme : son ami d'enfance George. Un romantique dans l'âme mais tellement convoité qu'il en est devenu inaccessible pour elle. Séparés pendant des années et travaillant maintenant dans la même boite d'a...