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Parler, parler, parler.
J'ai l'habitude de le faire, comme j'ai celle de sourire ou d'agiter la main. Ce ne sont que des caméras et des lumières. Sauf qu'elles paraissent presque incarnées, détentrices d'une loi qu'on ne peut contester. Peut-être qu'en fait, ce sont elles les stars.
Aujourd'hui, je prends conscience qu'il n'y avait qu'elles dans ma vie. Les seules capables de m'animer, de me tirer de la rage, de la tristesse, de la haine. De la rivière Han. Dès qu'on appuyait sur le bouton ON, je feignais la joie et l'amour, feignais mon personnage adoré, ce maknae devenu grand, être innocent et dévoué. J'y croyais presque avant de mourir quand elles s'éteignaient.
Peut-être que tout ce mécanisme me détruisait de l'intérieur.
Peut-être qu'il était le seul à m'empêcher de m'effondrer.
J'ai fini par voir plus loin. J'ai compris. Les caméras ne faisaient pas que prouver mes talents d'acteurs. Au fil du temps, elles ont capturé ces moi du passé, enterrés sans obsèques, les ont peut-être trompés, à coups d'ordres et d'exigences.
Elles m'ont offert la gloire, que je reconnais désormais comme une gardienne.
Celle de ma propre mémoire.
Longtemps, la renommée m'a fait croire en moi, parce qu'elle m'a révélé à ces êtres, m'a capturé dans des faisceaux lumineux, m'a installé dans des regards adorateurs.
Les fans.
« Que pensent-ils de moi ? M'aiment-ils ? »
Ces questions n'ont eu de cesse de me hanter.
Les concerts sont si beaux, ils me dessinent comme je ne me vois pas. Comme un rêve, capable de plonger l'univers entier, des stades entiers, dans un état d'émerveillement perpétuel. Comme une bulle qui tait la réalité de ces gens, efface des vérités dont ils s'échappent. Puis tout a éclaté. J'ai éclaté, dans un « pop » impuissant, rattrapé par le temps et mes démons. C'est comme une drogue, ça vous rend extatique pendant quelques heures, vous rend fou, si fou de tout, ça fait valdinguer la Terre et le Soleil, et tous ces astres sur lesquels on voudrait bien vomir. Mais ça n'a rien d'éternel. Ça ne fait que bousiller l'estime de soi.
Tout ce que je voulais, c'était qu'on me regarde comme si j'étais la chose la plus précieuse au monde. Une chose plus importante que ce monde lui-même.
Rien que ça.
Taehyung l'a fait. Les fans l'ont fait.
J'ignore de qui j'ai été le plus dépendant. Tout s'est mélangé dans ma tête. Et je suis devenu détestable.
C'était si simple, si évident, de se laisser envahir, de devenir cette tempête, cette rafale qui ravage tout sans demander la permission, c'était inutile, ça n'aurait rien changé. Je ne sais pas comment Taehyung a pu aimer cet individu, ce garçon excessif, capricieux, torve, jaloux, possessif.
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My time |Tk
Fanfiction« Était-ce si surprenant que je me sente tout à coup prodige, puis tout à coup indigne ? J'ai le corps plein d'enfantillages dissimulés encore. » Jungkook n'est jamais assez pour les autres. Du moins c'est ce qu'il pense. Et Taehyung le regarde un...