Le Binoclard et la Bad Girl [Livre 1 Terminé]

Jour 5 : Vendredi matin

Ernst

Alors que je suis toujours allongé dans mon lit, j'entends mon réveil sonner. En me redressant, je sens une douleur atroce parcourir mon corps. Je me remémore la veille avec difficulté. Lou et moi nous sommes vraiment rapprochés tant que ça ou j'ai complètement déliré ? Je regarde les derniers messages reçus sur mon portable. Aucun doute, je suis en couple ! Avec la magnifique et terrifiante Lou ! Puis je reviens à la réalité. Mon père va devenir fou quand il saurait... Mais qu'est-ce que j'ai fait, inviter Lou à la table de famille... Quelle mauvaise, très mauvaise idée... Mais si je veux rester au lycée, auprès d'elle, c'est la seule solution que j'ai trouvé...

Dans le bus qui m'emmène au lycée, je repense à la question que mon père m'a posé. Pour quelle raison j'ai voulu rester... Dès mon arrivée, je l'ai vue, elle, au bras musclé d'un abruti et j'ai senti mon coeur prêt à bondir hors de ma poitrine. Je savais bien qu'elle n'était pas faite pour moi, mais tous les jours, je l'observais en douce quand elle arrivait dans la cour, elle était si impressionnante. Elle a beau être généralement vulgaire, violente, froide, elle m'attire irrésistiblement depuis le premier jour. Je sais bien que je n'aurais jamais dû l'approcher... Enfin, c'est finalement elle qui s'est approchée de moi.

La dernière fois que j'ai flirté, ça c'était vraiment très mal terminé. J'ai carrément dû changer de lycée pour arriver à l'autre bout de la ville, ce n'était pas pratique du tout, mais au moins ici, personne ne me connaît. Ainsi, je pouvais endosser le rôle du binoclard. Bien sûr, ce n'était peut-être pas une bonne idée, vu la réputation du quartier, mais je n'avais pas eu beaucoup d'autres choix.

J'appréhende un peu d'arriver au lycée sans mes lunettes, je n'ai pas tellement envie que l'on me pose des questions. Mais je n'ai pas de paires de rechange. Mon oeil au beurre noir a désenflé, c'est déjà ça. J'ai failli manquer l'arrêt, tant je suis perdu dans mes pensées. Les souvenirs douloureux de celle qui avait presque été ma petite amie me revenaient un peu trop souvent depuis le premier baiser de Lou... Arrivé devant la grille, je suis surpris de voir que Lou est déjà là. Elle est adossée à l'un des piliers les yeux rivés sur son portable. Timidement, je m'approche d'elle. Je remarque vite qu'elle n'a pas de maquillage. Ses longs cils délicats se relèvent quand elle m'aperçoit, laissant apparaître ses yeux noisette que j'aime tant.

"S-Salut, Lou..." Ma belle succube m'intimide toujours autant bien qu'elle ne soit plus aussi effrayante qu'auparavant... Elle me sourit. Un sourire magnifique, j'ai de la chance. D'habitude c'est plutôt un sourire cruel qu'elle réserve à ceux qui osent croiser son regard. Elle caresse ma joue légèrement bleuie de ses longs doigts fins et pose sa bouche sur la mienne. Je pense que je ne me lasserai jamais de ses tendres baisers... J'ai vraiment beaucoup de chance... Elle glisse sa main dans la mienne et nous allons nous asseoir dans mon coin habituel. Elle pose doucement sa tête sur mon épaule sans décroiser ses doigts des miens. Qu'est-ce qu'on est bien... On aurait sans doute pu rester ainsi éternellement...

"Dis ? Ça te dérange si je t'appelle "chaton" ?" Quelle drôle de question. Je la regarde avec étonnement. Elle me demande mon avis alors qu'elle m'a déjà donné ce surnom à plusieurs reprises ?

"Non, ça ne me dérange pas, appelle-moi comme tu veux.

– Je... En fait c'est juste que..."

Elle a commencé à triturer ses mains maladroitement. Je vois une sorte de gêne dans son regard. Mince, je la dérange ? Si je reprends mes habitudes vestimentaires, est-ce qu'elle m'aimera toujours ? Est-ce qu'elle m'aime vraiment, d'ailleurs ? Oh non, on s'est embrassé comme des fous mais on ne s'est rien dit de plus que "on sort ensemble", ça ne veut rien dire. Peut-être que ça ne voulait rien dire du tout pour elle, Lou a eu plusieurs conquêtes et elle saura très vite de me trouver un remplaçant, mais moi je n'ai qu'elle. Je ne veux qu'elle. Et mince, ça allait recommencer... Je dois absolument en avoir le coeur net !