VI

20 4 9
                                    

Je me suis retrouvée à mon réveil à l'hôpital, seule. Il m'avait retrouvé, amené ici puis totalement abandonné à mon sort. Lorsque j'ai pu, j'ai fui ces murs blancs qui semblent pourrir sous l'odeur nauséabonde des medicaments.

Je suis rentrée naturellement chez moi. Je repense au fait que j'ai dû inonder son sol de mon sang, qu'il a surement dû nettoyer et j'ai presque envie de rire de tout cela.

– Allô ? Tout va bien, tu n'es plus à l'hosto ?
– Félix, je ne veux plus jamais te revoir.
– Les médecins m'ont parlé de ton trouble borderline, je n'en savais rien... J'ai l'impression de ne pas te connaître en fait. Comment es-tu sortie, ils t'ont laissé partir comme ça ? C'est pas un peu imprudent.

– Tu entends ce que je te dis Félix, je ne t'aime plus.

Encore une crise, je lui raccroche au nez. Mon cerveau est tel un boomerang depuis que je ne prends plus mon traitement. Je peux être pleine de vie, ressentir mille et une émotion puis plus rien... Le néant, comme si mon corps expulsait en un soupir toute once d'humanité, pour laisser place à une folie sanglante.

J'aime Félix, comme j'ai aimé beaucoup d'autres avant lui. Néanmoins, là où mes anciennes relations m'ont fait sombrer un peu plus dans la peine et la douleur, j'ai repris aujourd'hui le contrôle de mon corps sous une autre forme, bien plus drôle à mon goût.

Le plus amusant dans les relations amoureuses sont les jours qui suivent la rupture. Ils ont finalement le coeur brisé et ressentent enfin ce que je ressens moi-même, à vivre avec cette maladie tous les jours de ma vie.

Félix a dû raconter ce qu'il s'est passé aux autres puisqu'ils m'ont plus approché ni parlé. Je ne leur en veux pas, je les comprends après tout, la différence est parfois effrayante. De loin, j'ai remarqué un changement de comportement de la part de Félix, ce qui n'est pas pour me déplaire.

Lui qui est pourtant si lumineux à son habitude, ne semble plus être d'humeur aux blagues et discussions. Il a le coeur en miettes par ma faute. Observer cela à chaque fois me fait sentir un peu moins seule.

Néanmoins, un coeur brisé finit toujours par être plus ou moins réparé, apaisé ou rafistolé, d'une manière ou d'une autre.

Dans ces cas-là, je me retrouve de nouveau dans ma peine quotidienne, ce problème d'état limite comme l'appelle tous les médecins avec qui j'ai eu affaire.

Et quand la scarification et l'alcool ne me satisfont plus, et que la mort ne veut pas encore de moi, je pars à la recherche d'un nouvel homme à aimer, temporairement.

etat limiteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant