Chapitre 1

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Destiny était assise sur une branche d'arbre. Elle inscrivait un mot en Elfique sur le bois de son arc, comme toutes les autres fois où elle était venue se réfugier dans le plus grand arbre de la forêt. Elle s'était encore disputée avec ses parents. Qu'elle les détestait ! En effet, ils étaient la source de tous ses malheurs et elle n'avait en aucun cas les mêmes centres d'intérêts qu'eux. Elle se demandait encore si elle n'avait pas été adoptée.

Elle habitait dans une cabane au sommet d'un bel arbre vieux d'au moins cent ans. Sa mère avait choisi de construire leur logis tout prêt de la mer car elle aimait écouter le son que font les vagues lorsqu'elles se brisent sur la rive. Destiny y passait beaucoup de temps. Elle nageait, pêchait, s'entraînait à manier un poignard ou un arc,...

Aujourd'hui, c'était le dernier jour de ses dix-sept ans et elle voulait profiter de sa liberté. Quand elle y repensait, elle avait hâte d'avoir dix-huit ans car c'était à cet âge là que tous les Elfes avaient l'obligation de participer à la guerre contre les Maunors.

Les Maunors... ces horribles personnes qui ne pensaient qu'à peupler Ziemia et à diriger ce monde, qui ne vivaient que pour faire des enfants et pour gagner du terrain. Ils n'avaient même pas une seule chose de spéciale en eux mise à part le fait que ce soit la seule espèce qui n'ait aucun pouvoir, aucune particularité.

Elle acheva de graver le mot gorius qui signifiait "guerre" et releva la tête vers le ciel. Une magnifique teinte rose et orange remplissait son fond : les trois Soleils se couchaient.

La jeune femme fixait l'horizon en rêvassant. Elle s'imaginait au combat, face à face avec une horde de Maunors qui ne voulaient qu'une chose : la tuer.

Ses cheveux, courts, comme le voulait la coutume, brillait à la lueur des trois lunes qui étaient apparues. Son visage, reconnaissable grâce à la longue cicatrice qui s'y dessinait reliant le front au menton, était fin comme tous ceux des Elfes. Ses oreilles, pointues et longues d'environ vingt centimètres, semblaient être attirées par les bruits alentours car elles bougeaient et se dirigeaient vers la source du moindre bruissement.

Destiny se décida enfin à sauter de l'arbre. Elle atterrit sur ses pieds avec l'équilibre incroyable d'une fille qui s'était entraînée toute son enfance.

Après dix minutes de marche, elle arriva au pied de l'hêtre qui abritait sa maison. Elle respira un grand coup avant de grimper, gracieusement, pour atteindre la porte.

Elle s'agrippa à la poignée et, avec une souplesse époustouflante et se glissa à l'intérieur. Elle referma la porte et retira son arc et ses deux poignards qu'elle avait l'habitude de ranger derrière son dos. Laissant tomber au sol ses armes, elle s'allongea sur un canapé rouge volé aux Maunors l'été dernier.

Soudain, de l'autre pièce qui composait la cabane sortit un homme. Il était grand et il faisait peur à voir à cause des innombrables cicatrices dont son corps était marqué. Le bout de sa barbe noire traînait sur son torse et sa main droite tenait fermement une casserole quant à sa main gauche, elle n'était point visible puisque l'épaule était la seule partie qui restait du bras.

Le père de Destiny s'approcha de sa fille en boitant.

-T'étais où ?

Destiny se redressa, elle logea son regard dans celui de l'homme et se leva doucement. Elle n'avait pas peur, elle ne voulait simplement pas se laisser dominer par son pire ennemi.

-Pas à la maison. T'avais pas remarqué ? Il n'eut pas le temps de répondre qu'elle enchaîna : ah non, c'est vrai, ton œil droit a été décroché par un Maunor y'a une semaine. Oh pardon, j'espère que ça ne te fait pas trop mal parce que ça a l'air douloureux, quand même...

La fille se baissa juste avant que la poêle ne vienne cogner sa tête. Elle recula et attrapa son couteau qu'elle lança presque en même temps que le père ne s'accroche à une des plaques en bois du plafond. Les Elfes avaient des capacités incroyables pour monter aux murs, s'accrocher en hauteur ou sauter. Cela leur permettait d'être de très bons combattants.

-Combien de fois on va te le répéter ? Tu ne dois pas sortir. Répliqua l'homme en se replaçant devant Destiny.

Celle-ci passa devant son père et décrocha le poignard qui s'était coincé dans une fente du bois du mur. Elle voulut entrer dans la cuisine d'où était sortit l'homme quelques minutes auparavant mais une douleur affreuse lui traversa le dos. Elle tomba par terre en pestant. Destiny n'en revenait pas. Son père avait ressorti le fouet, comme lorsqu'elle avait dix ans. Elle se retourna et roula sur le côté avant de se prendre un deuxième coup sur le flanc.

-C'est bon ! Hurla-t-elle. C'est bon. J'étais à l'orée de la forêt, près de la plage. Voilà. Et avant que tu le demandes, non je n'ai vu aucun Maunor et je n'ai parlé à personne que je ne connaissais pas.

Eliro (c'était le prénom du père) posa le fouet sur un meuble déjà encombré de toutes sortes de choses et cracha :

-Tu es complètement folle de sortir, comme ça. On te l'a assez répété avec ta mère, non ? Orno, en tous cas son âme, peut être partout.

-C'est toi qui est complètement stupide de psychoter autant alors qu'il y a un million de personnes qui peuple ce monde et qu'il n'y en a qu'une, soit disant, dangereuse. Cria Destiny, encore par terre.

-Orno peut posséder, il le faisait il y a neuf ans. Sous le regard interrogateur de sa fille, Eliro continua : Il peut contrôler l'esprit de cent personnes à la fois et leur faire faire ce dont il a envie.

Eliro baissa la tête, il ne regardait plus Destiny à présent. Il semblait plongé dans ses souvenirs quand la mère de la jeune Elfe entra dans la demeure.

Elle s'arrêta, posa ses grands yeux bleus sur les blessures que sa fille venait de recevoir puis sur le visage blafarde de son mari et se dirigea vers la cuisine. Elle posa le lévrier qu'elle avait chassé le jour même et appela Eliro pour qu'il l'aide à le dépiauter.

Destiny se releva difficilement et passa derrière une couverture tendue qui faisait office de séparation avec le reste de la maison pour donner l'impression que celle-ci possédait une troisième pièce.

Il n'y avait que deux endroits où dormir, l'un dans le canapé, l'autre sur le matelas rapiécé de la "chambre". C'était suffisant car, dans toutes les familles où les regroupements d'Elfes, l'un des membres du groupe, chaque nuit, devait surveiller la maison. Il se perchait alors sur la plus haute branche de l'arbre le plus proche de chez eux et attendait le lever du jour.

Aujourd'hui, c'était au tour de la mère de Destiny de monter la garde. C'est vers vingt heures, après le repas, qu'elle sortit de la maison, laissant sa fille aiguiser ses armes derrière la couverture et son mari ronfler sur le canapé.

"Demain, je serai libre. Je pourrai faire partie d'une équipe d'Elfes guerriers et je marcherai fièrement, la tête haute et le regard fixe en tirant des flèches dans le corps de quiconque voudrait se mettre en travers de mon chemin." Pensa Destiny tout en tirant un drap pour cacher la lueur des lunes.

ORNO quête à l'âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant