Chapitre 1 - Citoyenne

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"Il est 8h, nous sommes le 8 mars 2045. Voici le planning de votre journée Docteur Evans: à 9h30 réunion de service avec le professeur Gravers, début de votre service aux urgences à 10h, fin de votre service à 19h, dîner avec..."

Tout en bougonnant, Taylor appuya sur sa montre connectée pour faire cesser la voix de son réveil:

- Foutue machine !

Elle connaissait son emploi du temps par coeur et n'avait pas besoin qu'un appareil le lui rappelle tous les matins. Malheureusement, il n'existait plus de réveil "classique" qui se contentait de sonner . A compter du moment où elle inscrivait un rendez-vous sur son smartphone, le réveil se mettait automatiquement à jour. Idem pour ses plannings qui étaient directement incorporé à son agenda par l'hôpital où elle travaillait. Et en cas de changement, sa montre l'alertait directement via un message qui s'affichait sur le cadran tactile. Ces montres étaient d'ailleurs devenues de véritables boussoles pour la majorité des gens. Taylor la trouvait en revanche plutôt envahissante surtout depuis que son port avait été rendu obligatoire partout dans le monde. Elles permettaient, par exemple, aux forces de l'ordre, grâce à des données cryptées et uniques pour chaque personne, de connaître l'ensemble des informations relatives à la vie des personnes qu'ils contrôlaient. Identité bien sûr mais aussi antécédents judiciaires, déplacements, communications, achats etc. Une vague d'attentats qui avaient débutés en 2020 partout dans le monde avait permis le vote de lois anti-terroristes très restrictives et avait quasiment sonné le glas de la vie privée. Certains avaient protestés mais avaient fini par abdiquer devant l'urgence à mettre en place des mesures permettant de mettre fin aux attentats. Il en allait de la sécurité mondiale et quelques concessions sur la vie privée devaient être faites pour préserver le bien commun. Et puis la majorité de la population s'était parfaitement adaptée à ces montres qu'elle voyait comme des assistants de vie efficaces et surtout gratuits puisque chaque citoyen bénéficiait, dès ses 12 ans, d'une montre connectée financée par son gouvernement et les entreprises les plus riches qui étaient soumises à une taxe spécifique. Et les parents ne trouvaient rien à redire: ils savaient en permanence où étaient leurs enfants grâce à la balise GPS incluse et étaient alertés par un message si la montre était enlevée. Il existait toutefois quelques "indépendants" qui avaient été surnommés ainsi parce qu'ils refusaient le port de la montre identité. De facto, ces derniers étaient exclus de la société et regroupés au sein de communautés étroitement surveillées payant ainsi chèrement leur souhait de liberté. Même s'il ne lui était jamais venu à l'idée de refuser de porter sa montre, Taylor enviait parfois les indépendants. Ils refusaient de se plier à des lois qu'ils jugeaient contraires à leur liberté de citoyens et en acceptaient toutes les conséquences. Leurs communautés s'étaient organisées en marge des grandes villes. Si ce n'est la surveillance policière, les gouvernements n'intervenaient pas dans leur gestion et ne se préoccupaient pas de la manière dont les indépendants vivaient ou survivaient d'ailleurs, elle n'en était pas bien sûre étant donné que les citoyens, c'est ainsi qu'étaient nommés les porteurs de montres identité, avaient pour interdiction absolue de s'approcher des communautés. D'ailleurs, les montres identité émettaient un signal sonore si un individu non autorisé se rendait trop près d'une zone interdite et les forces de l'ordre étaient prévenue au bout d'une minute si la personne ne s'éloignait pas. L'état disait que ces alertes avaient pour but de sécuriser la population, en cas d'enlèvement par un indépendant par exemple même s'il n'y avait jamais eu de cas avéré, mais Taylor les voyaient plus comme un dispositif supplémentaire de contrôle dans la mesure où certaines zones, au sein même des grandes villes, étaient interdites d'accès. Ces zones, dites de sécurité, comprenaient des bâtiments d'état occupés par les forces de la coalition anti-terroristes. L'ONU avait, avec l'ensemble de ses membres, mis en place des armées nationales en charge de protéger les citoyens des attaques terroristes. Ces armées étaient déployées partout dans le monde et particulièrement dans les pays où la menace terroriste était importante. Cette décision avait été prise suite à une série d'attentats sanglants qui avaient frappés, en 2036, de nombreux pays du G20, le même jour, presque à la même heure. A Paris, un kamikaze s'était fait exploser à Chatelet-les-halles en pleine heure de pointe. A Londres, la BBC avait été attaquée. En Espagne, l'attaque avait eu lieu durant un match du FC Barcelone. En Allemagne, un avion avait explosé en plein vol. Aux États-Unis, deux universités avait été victime d'une tuerie. Les morts se comptaient par centaines, partout dans le monde. Taylor avait alors 18 ans et ces événements l'avaient incitée à débuter des études de médecine. Là où certains voulaient prendre des vies, elle ferait tout pour, de son côté, les sauver. 9 ans plus tard, elle avait réussi et était médecin urgentiste depuis 2 ans dans un hôpital universitaire de Boston. Elle adorait son métier même si son emploi du temps chargé nuisait à sa vie personnelle. Les quelques relations amoureuses qu'elle avait eu durant ses études et au début de sa carrière s'étaient soldées par des échecs. Elle n'avait jamais vraiment tenté de construire quelque chose de vraiment solide en vérité. Les hommes qui avaient partagé sa vie ne lui avaient pas fait ressentir ce qu'elle avait coutume d'appeler le "grand frisson" qui aurait pu lui donner envie de faire davantage de place dans sa vie à l'un d'entre eux. Elle avait fini par s'habituer à son célibat consacrant sa vie à son travail, sa famille et ses quelques sorties entre amis. Elle considérait qu'il était inutile de chercher l'amour à tout prix, celui-ci viendrait de lui-même sans qu'elle n'ait à se poser de questions. Elle en avait la conviction, sans doute influencée par son petit côté romantique et fleur bleue qu'elle essayait de réprimer mais qui se rappelait à elle parfois.

Apocalypse (En Pause) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant