L'Inconnu de la Bibliothèque

Chapitre 3

Je n'avais qu'une envie. Aller le voir pour l'embrasser. Ce genre de regard devrait être interdit. Il mettait tout mon corps en ébullition, mes pensées sens dessus dessous, mes instincts au rang le plus sauvage. Mon corps, mon esprit, mes pulsions, tout me criait que je le voulais, ici et maintenant. Je fis un pas, puis deux. Il se leva. Je savais que si je commençais, je ne pourrais jamais m'arrêter. Je le savais, et il le savait. Pourtant, on continua d'avancer l'un vers l'autre, doucement. On ne voulait pas se précipiter. On savait que la magie de l'instant ne durerait pas si on se sautait dessus. Quelle magie y aurait-il à céder à ses pulsions les plus primaires?

Alors on avançait, un pas après l'autre. Et, enfin, on se retrouva face à face. Nos regards ne s'étaient pas quittés une seconde, laissant l'autre voir tout ce qu'il voulait, des pensées les plus intimes aux désirs les plus tabous. Tout.

On ne fit rien quelques instants, laissant nos yeux parler pour nous. Puis, au bout d'un moment qui me sembla durer des heures, il avança légèrement sa main, effleurant la mienne. Je lui saisis délicatement, entrelaçant nos doigts. Il resserra alors son emprise. J'avais le souffle coupé tandis que le sien était plus profond. Sentir sa peau contre la mienne était un pur délice. Mon corps était parcouru de frissons. J'avais l'impression que ma main avait trouvé sa place, au creux de la sienne. Et je savais déjà que lorsqu'il allait la retirer, je n'aurais plus qu'une sensation de vide.

Mais cette main contre la mienne ne me fit pas oublier ce regard. Ce regard qui ne pouvait être que le plus beau au monde. Je voyais tellement d'amour dans ces yeux que je crus suffoquer un instant. Alors, ne pouvant plus me contenter de cette délicieuse main dans la mienne, et de ce regard intense, je levai mon autre main, posant délicatement le bout de mes doigts sur sa joue. Sa respiration se coupa, et la mienne s'accéléra. Son visage semblait fait de soie, de la douceur d'un rayon de soleil caressant la peau, et les rougeurs que j'avais fait apparaître ne le rendait que plus beau, me donnant l'impression qu'une fleur éclorait sur son visage. Alors tout aussi doucement, je posais ma paume sur sa joue. Et j'avais envie qu'elle y reste à jamais tellement elle me comblait. Puis il me prit au dépourvu, appuyant un peu plus sa joue contre ma paume, et son autre main recouvrant délicatement la mienne. J'eus l'impression qu'une plume venait de se poser contre moi tant son geste était doux et aimant. Je ne pus me retenir plus longtemps face à son geste.

Je m'avançai à nouveau d'un demi pas vers lui, rapprochant nos corps au point qu'une simple respiration nous permettait de nous effleurer. Nos visages étaient si proches que je pouvais maintenant compter chacun de ses longs cils, nos souffles erratiques se mélangeaient, nos yeux s'accrochaient toujours plus, et nos lèvres se rapprochaient inexorablement de l'autre.

Et alors que nos nez se frôlaient, nos regards se séparèrent. Il ferma ses yeux, attendant. Je fermai les miens, me rapprochant. Et le moment que j'attendais depuis plus de deux mois arriva enfin ; mes lèvres effleurèrent les siennes.

Je ne sais vraiment comment décrire ce que j'ai ressenti. J'avais l'impression qu'un arc-en-ciel entouré de milliers de feux d'artifices venait d'apparaître dans mon corps. Mon cœur n'arrivait pas à se calmer, semblant galoper tel un étalon dans les prairies, mon esprit s'envolait de plus en plus loin, de plus en plus haut. Je n'étais plus là. La seule chose qui comptait à cet instant était lui. Ses mains, sa peau, sa bouche, si tentante, si belle, si douce, si aimante, si tendre. Il était mon paradis et mon point d'ancrage. D'un geste, il m'envoyait au ciel, d'un regard, il m'électrocutait, d'un mot, il me comblait.

Le temps disparu, le reste du monde n'exista plus. Il n'y avait plus que lui et moi. Mon inconnu. Je pressai alors un peu plus ma bouche contre la sienne si délicate, quémandant ce dont j'avais le plus besoin: son amour.