Chapitre III

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Je sais qu'il aurait été sans doute plus sage de continuer mon voyage en ignorant la découverte que j'avais faite. Pourtant le lendemain je n'arrivais pas à la sortir de mes pensées. Je m'ennuyais vraiment trop sur ce vaisseau pour continuer de vaquer à mes "activités" comme si de rien n'était. Chaque fois que je passais devant la cale j'hésitai à y entrer. Mais je ne savais pas comment faire pour la faire ressortir de sa cachette et j'avais peur qu'elle se trompe sur mes intentions et qu'elle mette sa menace à exécution. Je me retrouvai donc à faire des allers-retours sur le pont. L'équipage devait penser que je devenais folle. Ce n'est pas pour autant que ses membres me donnaient plus d'attention que d'habitude. Seul Asgeir est venu me sortir de mes pensées, l'air inquiet.

- Tu vas bien Blanche ? M'a-t-il demandé de sa voix d'enfant.

- Oui pas de soucis, je commence à tourner en rond sur ce bateau, l'ai-je rassuré

- Je comprends. Je suis pas trop présent en ce moment mais le capitaine me fait confiance pour l'aider.

Cette dernière phrase m'a remplie d'amertume. J'en voulais au capitaine de me voler mon seul ami. Je le suspectais même de faire exprès de le prendre sous son aile pour me rendre folle. J'étais convaincue qu'il en était capable. Et Asgeir si naïf était heureux de ne plus être le souffre-douleur, tout en bas de la hiérarchie. Mais je ne pouvais pas lui en vouloir.

- Je suis contente pour toi. Je ne te vois plus de garde la nuit. Il faudrait que nous jouions ensemble de nouveau. Cela fait longtemps.

- Oui le capitaine me laisse tranquille moi en ce moment. Mais si j'ai un moment je descendrai te voir. Tu sais je t'apprécies beaucoup Blanche, m'a-t-il avoué.

Ces paroles me réchauffaient sincèrement le coeur. Cependant c'est à ce moment que le capitaine, qui semblait nous observer depuis quelques minutes, a choisi de faire appel à son protégé. Ce dernier est reparti avec hâte rejoindre son maître.

-Désolé Blanche, je dois y aller à plus, m'a-t-il dit sur un ton pressé.

Je n'ai pas pris la peine de répondre et je l'ai salué d'un geste de la main. En levant les yeux vers le pont-supérieur, j'ai remarqué que ce n'était pas Asgeir que le capitaine fixait mais moi, un sourire victorieux sur les lèvres. Il le faisait exprès. J'en étais sûre. Je me suis détourné de lui, le coeur empli de rage, l'esprit plein de défiance et les yeux embués.

Ce soir-là j'ai décidé de me relever. J'ai pris le repas préparé par Charles le jourmême et je suis descendu discrètement dans les cales. Une fois sur place j'ai appelé plusieurs fois la jeune femme en chuchotant mais celle-ci ne m'a pas répondu.

- Je vous apporte ce que le maître coq a préparé. Il y a des fèves et un peu de lard. Ca vous changera un peu de manger quelque chose de cuisiné.

J'ai déposé le bol sur une caisse et j'ai attendu un peu. Elle n'a pas donné de signe de vie. Mais je savais qu'elle était là, il n'y avait aucun autre endroit sur le bateau ou elle pouvait réellement se cacher.

- Vous feriez mieux de le manger. Si quelqu'un découvre ça ici, il va avoir des doutes. Je vous le laisse ici et je m'en vais, ai je chuchoté malicieusement avant de partir.

Le lendemain lorsque j'y suis retournée, aux premiers rayons du soleil, les fèves, le lard et le bol avaient disparu. Soudain un bruit a retenti derrière moi, j'ai bondi en arrière. Je m'attendais à voir le capitaine, Juan ou un quelconque membre de l'équipage. Mais c'était elle. Assise sur un tonneau et m'observant. Elle possédait la même expression que la veille.

- Que me veux tu à la fin ? M'a t elle questionnée d'un ton sec.

- Rien... Je voulais juste vous apporter à manger, ai-je bégayé.

Le voyage de BlancheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant