Partie 8

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  Mes paupières étaient chaudes, on me secouait avec force. J'ouvris les yeux brusquement, puis les clignait le temps de m'adapter à la lumière du jour. La lumière du jour ? Mais j'étais censé assurer la dernière ronde, celle de l'aube ! M'étais-je assoupi pendant ? Non, je n'avais pas souvenir de m'être réveillé. Je m'écriai avec une voix rauque à cause de la fatigue :

-Pourquoi il fait jour ? J'étais censé être réveillé avant !

-Nous le savons, chef. Mais nous avons préféré vous laisser dormir. Vous aurez besoin de forces aujourd'hui.

-Ne t'agite pas dès le réveil, tu vas gaspiller ton énergie.

Je reconnus la voix d'Hoyashi. C'est donc elle qui m'avait réveillé brutalement.

-Je ne devrais pas avoir de privilège, grommelai-je en me redressant.

  Je savais très bien que je ne pouvais engueuler personne, Hoyashi et Elmi avaient sûrement fait pression sur les autres pour que l'on me laisse dormir. Je ne pouvais me résoudre à les disputer alors que c'était peut-être notre dernier jour ensemble. Je vis Elmi, Erklärm, Soilyamus et d'autres soldats prendre une tasse en fer d'eau, en riant de moi. Ils m'avaient tous fichu en rogne dès le matin ! Ce n'était pas le moment de rire. Mais en même temps, j'enviais leur facilité à tout prendre à la légère, à savoir décompresser, alors que la plupart allaient perdre la vie dans quelques heures. Je croisais le regard d'Hoyashi. Elle, en revanche me ressemblait d'avantage. Elle me souriait tendrement, mais je lisais beaucoup d'appréhension dans son regard.

  Une fois tous prêts, nous partîmes au château. Orla et Arlos y étaient déjà, et avaient libéré l'accès, si tout allait bien.

  Le champ de bataille était déjà installé. Des cadavres de résistants et de soldats gisaient un peu partout à nos pieds, alors que nous nous enfoncions dans le tumulte de corps en sueurs et en sang qui se battaient sans relâche. Nous atteignîmes l'entrée sans trop de dfficultés ; grâce à un chemin tracé par Orla. J'avais bien sûr perdu un ou deux hommes, mais pour l'instant nous avancions bien.

  Nous nous engageâmes dans les escaliers où des soldats d'élites étaient postés. Heureusement, ils n'avaient ni arcs ni flèches. Ils descendirent vers nous, pour engager le combat. Alors qu'Actéon mordait violemment un soldat ayant essayé de m'attaquer de front, je vis Soilyamus en mauvaise posture. Un garde avait son épée sous sa gorge et le forçait à avancer. Erklärm vint à son secours, et tua le soldat. Malheureusement, un autre le souleva de terre avec force et le jeta par la fenêtre. J'assistai à la scène, tentant de me débarrasser de mon adversaire. Soilyamus, lui, qui était devenu blanc comme un linge dû vite se reprendre, se faisant attaquer. Mon équipe et moi réussîmes à grimper tant bien que mal. Les pertes devenaient de plus en plus grandes, mais je ne pouvais m'attarder dessus. Alors que nous pénétrions un salon, je croisai Arlos et ce qui restait de son équipe en train de se battre avec une trentaine de soldats d'élites. Nous vînmes lui prêter main forte. Elmi et Hoyashi étaient devant moi, entourés d'ennemis. Je m'élançai vers eux et les aidai à s'en sortir. Nous arrivâmes encore une fois à quitter la salle, pour nous engager dans des escaliers en colimaçon. A chaque pas que nous faisions, de nouveaux ennemis surgissaient. Les pertes étaient innombrables, mais nous devions avancer, coûte que coûte. Un homme se fit trancher le cou par les crocs aiguisés d'Actéon, malheureusement, son ami poignarda mon loup. Je le tuai bien vite à mon tour, mais ne pus m'empêvher de ressentir de l'amertume et une pointe de tristesse, malgré l'adrénaline qui m'empêchait de penser à autre chose qu'à mon objectif : me rendre à la salle du trône pour tuer le roi. Je comptais laisser Hoyashi le faire, mais nous en discuterons une fois arrivés. A force de tourner en courant tout en devant tuer mes assaillants, je commençai à m'essouffle, mais je tins bon. J'avais fait torp de chemin pour m'arrêter là.

  Nous arrivâmes enfin à la salle du trône. Il y avait avec moi Elmi, Hoyashi, Soilyamus, Arlos et deux autres soldats dont je ne connaissais pas l'identité. Le roi nous attendait là, sagement.

-Eh bien, Arlos, mon vieil ami, commença-t-il d'un ton mielleux, tu ne m'avais pas habitué à des entrées si fracassantes. Je suis tout de même heureux de te revoir, bien que j'aurais apprécié que cela se fasse en d'autres circonstances.

  Mon ami, les mains ensanglantées, mais ne perdant en rien de sa prestance malgré qu'il ait tué des dizaines de personnes répondit, avec un sérieux implacable :

-Nous ne sommes pas ici pour parler, tyran, mais pour te tuer, comme tu l'as deviné.

-Je le sais bien. Je n'ai plus aucune chance de m'en sortir. Cependant, je ne suis pas servi sur un plateau d'argent, vous avez eu du mal à arriver jusqu'ici, alors pourquoi pas vous mesurer à ma garde rapprochée !

  A ses mots, les quatre soldats armés jusqu'aux dents qui se tenaient jusqu'ici tranquillement à ses côtés, avancèrent vers nous, prêts à combattre.

  Nous venions à peine de reprendre notre souffle, mais il était temps d'en finir. Ils se lancèrent sur nous. Tout se passa très vite. L'un d'entre eux se jeta sur Arlos. L'autre tua d'un coup de lance bien maitrisé les deux soldats nous ayant accompagnés. Le troisième engagea un duel avec Soilyamus. Un quatrième lança un couteau vers Hoyashi. Je me mis devant elle pour l'esquiver. Il m'érafla l'épaule droite, déjà bien amochée. Je retins un grognement de douleur et levai mon épée pour le combattre. Alors que je feintai, le deuxième ayant tué les deux soldats couru vers Hoyashi. Je m'empressai de finir d'enfoncer ma lame dans le torax de mon adversaire pour tuer l'autre dont la cible était Hoyashi. Alors que je dégageai ma lame, il atteignit enfin sa cible. Ma femme para son attaque, lui enfonça sa lame entre les côtes sans remarquer sa deuxième main, armée d'une dague, qui se logea dans son ventre. Le souffle coupé, elle bascula en arrière, tandis que je tuais son assassin par derrière. Je me précipitai sur elle. Elmi, fou de rage, couru vers le roi avec une vitesse surhumaine et le tua, tranchant sa tête à l'aide d'une hache. Tout s'arrêta alors. Nos assaillants, désemparés, qui n'étaient plus que deux, se laissèrent tuer, sachant qu'ils ne pourraient plus y échapper.

  Je m'accroupis près de ma bien-aimée, puis la pris doucement dans mes bras, posant sa tête sur mes genoux. Elle avait les yeux fermés, sachant ce qu'il allait lui arriver. Je lui glissai un « Je t'aime » la gorge nouée. Rien ne servait de se lamenter, mon cœur qui venait de se briser, mon âme de s'effondrer en quelques secondes suffisaient à remplacer les sons des violons d'une scène si émouvante pour les spectateurs qui y assisteraient. Malheureusement, rien n'était factice. Son esprit quittait peu à peu son corps, alors que je la regardai, impuissant. Je ne pouvais lutter face au sort qui s'acharnait sur Hoyashi. Mes oreilles bourdonnaient, j'étais devenu sourd à tout bruit extérieur à celui de mes sanglots étouffés. Je détestais toujours autant cette sensation. Celle où le monde s'effondre autour de nous, à la perte d'un être cher. On ne peut rien y faire, pourtant, on se sent coupable. On ressasse encore et encore toutes les dernières scènes vécue ensemble. On est pris de remords et de regrets qui obstruent notre réalité. Plus rien n'existe, que notre peine insondable. Malgré mon vécu, je ne la supportais pas. J'étais fort, mais dans ses moments là, j'avais l'impression d'être un chaton égaré qu'on prendrait doucement dans nos bras pour ne pas l'effrayer. Sauf que personne ne me prenait dans ses bras. La femme que j'aimais, était en train de s'éteindre, la pâleur la gagnant, la chaleur la quittant. Celle que j'aimais plus que tout souffrait, pourtant je ne criais pas. Elle non plus. Elle gémissait de douleur, mais ne demandait pas d'aide, pas d'eau, rien. Elle attendait simplement son heure, passant outre ses besoins et ses pensées. Peut-être avait-elle eu une once de bonheur de savoir que c'était moi qui tenait sa main, froide et tremblante ? Elle lâcha alors ses doigts enroulés autour des miens. Une unique larme coula sur sa joue. Elle eut un petit sourire de bonheur. Elle ouvrit ses paupières, dévoilant ses beaux yeux bleus, puis les referma.

Fin.


Attendez ! Je ne veux pas faire mes adieux déchirants trop vite !

Comme vous avez pu le remarquer, l'histoire est bouclée, elle se suffit à elle-même car le début rejoint la fin.

Cependant, j'ai fait un court épilogue (je m'ennuyais en maths), et si ça vous intéresse, je peux le poster !

Dites-moi ce que vous en pensez !

Bisous mouillés par les larmes,

Ange.

Les Dieux sont mortelsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant