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Jeudi 28 novembre 2019 - 07h45

Châtillon (92)

Un vent frais comme il les redoutait le sortit définitivement de son rêve. Alice n'avait pas trouvé de moyen plus efficace et sympathique pour obliger Jules à se lever le matin. Son amour pour Morphée n'avait pas pris de plomb dans l'aile depuis toutes ces années.

Il avait encore une chance de contrer l'offensive, mais le timing était bien trop court. Il s'enroula dans la couverture d'un bout à l'autre et rentra ses pieds, puis sa tête. La fameuse « parade du sushi » dont il se ventait si souvent.

Une délicate main attrapa le coin de la couverture avec une douceur maternelle. Peut-être Alice serait-elle plus clémente ce matin, Jules l'espéra si fort qu'il eut un léger sourire. Malheureusement, son corps glissa sur la matelas et s'écrasa au sol. Encore une défaite.

- Allez debout, mon petit gars. Il est bientôt huit heures, je n'ai pas du tout envie de bosser avec un zombie en face de moi.

- T'es pas cool...

Jules émergea de son rouleau en coton et s'assit sur le sol. Sa tête était ornée de son traditionnel épis. Toujours dans les nuages, il se frotta les yeux et bailla à s'en décrocher la mâchoire. La femme lui déposa une bise sur le front et quitta la pièce d'un pas dynamique.

- Je t'ai ramené des croissants frais tout chaud, lança la voix féminine à travers l'appartement.

Cette simple phrase suffit à animer Jules qui ne perdit pas à un instant.

Alice avait emménagé dans le nouvel appartement de Jules à Châtillon depuis quelques mois. Trouver un équilibre dans ce cocon n'avait pas été une chose simple. Elle aimait tout contrôler et lui adorait disposer d'une large souplesse.

Les murs sobres de la salle principale s'étaient transformés en musée. La femme brune avait défendu sa position bec et ongles, il fallait apporter de la vie dans ce nid, des ondes positives. Jules n'avait contesté qu'une fraction de seconde avant que le premier cadre-photo ne soit installé.

La porte de la chambre grinça.

L'homme, caleçon et tee-shirt à rayures, se traîna jusqu'à la table. Sur la planche de bois, un bol remplit de café au lait et plusieurs tranches de pain frais coupées, prêtes à être beurrées.

Il tartina un morceau qu'il trempa quelques secondes dans le liquide et croqua. Alice glissa sa main dans les cheveux que son amour. Elle l'agita, mais c'était hélas une lutte vaine contre un champ de bataille capillaire renforcé.

Alors que la femme prenait place à l'autre bout de la table, le portable de Jules de mit à vibrer. Deux coups, moyens et espacés d'une demi-seconde. À peine le Wifi activé, il recevait un nouveau mail. Les petits icônes s'alignèrent sur le haut de l'écran du mobile.

Un message, plusieurs tweets et d'autres applications se manifestaient pour capter l'attention de l'homme. Les réseaux sociaux étaient omniprésents dans la vie des jeunes, un fléau tueur des relations humaines comme le répétait si souvent les parents d'Alice. Pour autant, Jules n'avait d'yeux que pour sa dulcinée. Cette petite robe verte avec des motifs lui allait comme un gant.

Une nouvelle vibration. L'homme, tartine dans une main, s'empara du mobile dans l'autre et tapota machinalement pour saisir son mot de passe. L'écran s'éclaira et dévoila la longue liste d'alertes. Il effaça plusieurs d'entre-elles d'un geste du pouce.

Alors qu'il s'apprêtait à croquer dans son dernier morceau de pain, l'objet du mail retint son attention.

« Urgent et confidentiel - VE »

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