Quatrième mélodie

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Un mois s'était écoulé depuis le réveil d'Alice. La jeune fille avait compris deux choses. D'un, elle était dans une sorte d'hôpital. De deux, elle souffrait d'un trouble de la mémoire. Le docteur lui avait affirmé que ce n'était rien d'alarmant, que ça faisait partie des conséquences de sa
thérapie.
''Thérapie ?''
Alice se sentait encore dans les vapes. Un brouillard épais l'empêchait de réfléchir, de se concentrer, de parler. Elle passait la plupart de ses journées à regarder dans le vide. Elle avait l'impression que quelque chose en elle avait disparu. À tout jamais. Quelque chose de très
important. Mais elle ne ressentait ni tristesse, ni joie. Seulement du vide. Comme cet endroit. Alice se trouvait dans une chambre dont la blancheur était aveuglante. Il n'y avait aucune fenêtre, ni fourniture. Simplement un lit qu'elle n'avait pas quitté. Son corps était encore trop
faible pour bouger. Elle arrivait à peine à lever les mains.                                                                         Chaque jour, deux infirmières lui rendaient visite pour la laver et lui faire un massage. C'était douloureux. Très douloureux. Son corps était trop lourd. Chaque étirement et contraction lui coupaient le souffle. La rééducation s'avérait plus pénible et plus atroce que ce qu'on nous
faisait croire dans les films. Cette routine s'était répétée pendant plusieurs jours... ou ... quelques mois ? Alice n'en n'était pas sûre. Elle avait perdu la notion du temps.

À part les deux infirmières et le médecin, elle n'avait reçu aucune visite. C'était rassurant. Être coupé du monde extérieur la réconforter. Ne pas voir ses parents lui permettait d'oublier sa souffrance. ''Adélaïde Ézéchiel''. Deux noms qu'elle aimait tant, qu'elle haïssait tant ...

Malheureusement, le docteur venait de lui informer qu'il était temps de recevoir ses parents. Elle avait tenté de retarder la visite, cependant, la décision du médecin était catégorique.
_ C'est pour ton bien. Lui avait-il dit.
''Que croyez-vous connaitre sur mon bien'' avait-elle voulu lui répondre, mais elle avala ces mots. Il valait mieux garder le silence que de s'enfoncer dans un débat affligeant.
Après deux heures de cette déclaration, la porte s'ouvrit en laissant entrer deux silhouettes,
méconnaissables à première vue, suivis par son médecin. Alice ne croyait pas ses yeux. Elle les frotta à plusieurs reprises. Et pour la première fois, elle se demanda, à voix forte.
_ Quel jour sommes-nous ?
La femme et l'homme fondirent en larmes en entendant la voix de leur enfant, de leur petite fille.
_ Je suis désolé ma chérie, tellement désolé, pardonne-moi mon enfant, pardonne-moi, tout est de ma faute. Articula la mère en reniflant. ''Je ne comprends pas'' pensa Alice. C'était bien ses parents mais en une version plus âgée. Elle avait l'impression d'avoir voyagé dans le temps, d'avoir sauté dans le futur. Ils étaient plus vieux. Des cheveux blancs, des petites rides. Ils avaient l'air fatigués, affaiblis... fragiles. Une panique se creusa dans l'esprit de la jeune fille. Elle sentait son cœur tambourinait dans sa tête. Et fut submergé par une sueur froide. Elle suffoquait.
''Un miroir !''
_ Donnez-moi un miroir. Cria-t-elle.

En voyant son reflet dans la glace, elle se figea. Elle ne reconnut pas son propre visage. Il était plus maigre, plus fin. Ses yeux étaient cernés et ses cheveux étaient longs. Trop longs. Après un silence pesant, Alice leva la tête vers ses parents. Et avec un regard effaré, elle balbutia.
_ M Maman, Papa.
Des larmes chaudes coulaient sur ses joues comme une cascade.
_ Quel jour sommes-nous ?
La mère s'était jetée dans les bras de sa fille en pleurant tandis que le père serrait sa main froide dans les tiennes.
_ Tout va bien ma petite Alice, on va tout t'expliquer.

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La Valse Des ÉchosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant