L'objet de ma visite se trouvait devant cette baie vitrée, et me faisait dos. Dans une de ses mains il tenait un verre et dans l'autre un téléphone portable. Il portait un tailleur gris bleuté par-dessus une chemise blanche. Il avait une haute stature et était assez bien battit au vu de ses épaules larges et carrées. Ses cheveux noirs bouclés, étaient soigneusement coiffés.
Il était en conversation quand nous entrâmes, et bien que nous ne fîmes pas tellement de bruit, il mit fin à celle-ci et se tourna vers moi, quelques secondes après que le majordome eut refermé la porte derrière lui.
Ses yeux noirs, capturèrent les miens, et il s'avança vers moi d'une démarche souple, déposant au passage, son verre et son téléphone sur la table basse. Arrivé devant moi, il me tendit la main :
- Heureux de vous rencontrer Hermine, me lança-t-il de but en blanc. Vous êtes absolument ravissante !
C'était trop tard pour faire demi-tour, je le su car à ce moment précis, je sentis la voix d'Azazel qui m'encourageait à l'impressionner. Je manquais d'air comme si je m'étais aventurée trop loin dans les hauteurs, et une migraine menaçait de percer :
- Tout le plaisir est pour moi...monsieur, répondis-je bravement, en lui serrant franchement et vigoureusement la main.
J'étais vraiment pathétique.
Il eut l'air surpris par ma poignée, et moi je paniquai, peut-être que j'y avais mis trop de force, ou alors mes mains n'étaient pas assez lisses, contrairement aux siennes qui étaient aussi douces que du coton :
- Vu le sujet dont nous allons traiter, Monsieur est bien trop formel, vous ne trouvez pas ? me demanda-t-il avec un sourire cynique.
- C'est vrai, répondis-je, je vous aurais bien appelé par votre prénom si je le connaissais...
Car il était clair qu'il ne pouvait s'appeler John Doe.
- Christian, dit-il.
Je suppose que mes yeux écarquillés durent trahir ma surprise, car il partit d'un grand éclat de rire :
- Astérion, se reprit-il, avec un brin de mélancolie. un peu pompeux je l'avoue mais vous comprendrez pourquoi lorsque vous connaîtrez la famille dont je suis issu.
Une fois encore, il me coupa l'herbe sous les pieds, sacré personnage, jurai-je intérieurement. Il fallait que je déploie toutes mes facultés intellectuelles si je ne voulais pas paraître comme une oie blanche. Mais il faut croire que ma muse a choisi ce moment pour faire une petite balade, car les mots restaient bloqués au fond de ma gorge. Je senti la sueur s'écouler le long de mes aisselles, comme à chaque fois que je paniquais :
- Il est inutile de t'angoisser autant Hermine, car pour ma part l'affaire est déjà pliée, me rassura-t-il encore une fois, avec un regard moins tranchant.
Serait-il médium pensai-je, alors qu'il me guidait vers les deux fauteuils au centre de la pièce :
- Je te sers du whisky ? me demanda-t-il toujours en jouant toujours avec moi.
- Je ne consomme pas d'alcool, désolée, répondis-je en décidant de me reprendre.
Et tout comme le moment où je lui avais serré la main, un éclair de surprise lui traversa le visage avant que celui-ci ne se ferme presque aussitôt.
- Je veux dire jamais quand je dois parler affaire, mais un verre d'eau fera l'affaire, dis-je en espérant rattraper le coup.
Il me servit avant de se débarrasser de sa veste et de s'asseoir en face de moi, et aussi en face de son verre de vin et de son téléphone :
- Que t'amène-t-il ici Hermine, demanda-t-il.
- Vous...tu le sais pourtant.
Il soupira en se passant une main dans les cheveux, puis me détailla, de la tête aux pieds, sans manifester aucune gêne, comme s'il détaillait l'une des toiles accrochées dans la pièce. Je décidai de le braver, en gonflant le torse et en croisant les jambes, tout en remettant d'un geste mes cheveux derrière l'épaule. Un autre sourire ironique étira ses lèvres. Il commençait sérieusement à me gonfler :
- Je ne suis pas venue ici pour que tu me détailles comme si tu cherchais la meilleure manière de me faire passer à la casserole ! m'entendis-je prononcer.
Il cilla sous l'effet de la surprise, parfait, pensai-je :
- Que t'a-t-on dit exactement à mon propos ?
- On m'a parlée d'une personne, commençai-je, un homme capable d'exaucer un de mes souhaits.
- Eh bien, je ne suis pas le génie de la lampe, mais je m'efforcerais de répondre à tes attentes, ironisa-t-il.
Cette remarque me mis hors de moi. Je n'avais pas fait tout ce chemin, je ne m'étais pas accoutrée de la sorte, pour ensuite me voir ridiculisée et traitée comme une enfant. Alors je fis une chose insensée, j'enlevais la fleur dans mes cheveux et la balançai dans la pièce. Je fis de même pour mes chaussures qui dans tous les cas étaient inconfortables. Puis j'attachai mes cheveux du mieux que je pu. Un a un je balançai aussi dans la pièce mes boucles d'oreilles, mes bracelets et ma montre. Ainsi débarrassée de ces accessoires je me sentis enfin moi-même :
- On m'a parlé d'une personne capable de m'aider. Je veux que tu m'aides à prendre ma revanche. Je sais que ce numéro te parait futile mais je crois que la seule manière pour que tu considères sérieusement ma requête est de mettre fin à cette mascarade.
Il me regardait avec un air impénétrable, sans faire aucun geste pour m'encourager. Je déglutis avant de continuer :
- Je lui ai consacré ma vie, et il m'a trahie. Il m'a traitée moins qu'un être humain. J'ai renié ma famille, mes amis pour lui. J'ai tout perdu, alors que lui il a tout. Il va s'en sortir sans qu'aucune justice ne soit rendue.
- Vous les êtres humains avez une manière bien particulière de considérer l'amour, j'en arrive à l'oublier avec le temps, fit-il enfin après ma tirade. Pour vous il est indispensable et vous en faites une quête. Vous etes prêt à y laisser la vie.
- Alors tu vas m'aider ? Sinon pourquoi tu t'en serais mêlé depuis le début? demandai-je abruptement.
- Comme je te l'ai dit au début, je t'aiderai, soupira t-il, nous pouvons discuter des clauses du contrat...
- Un contrat ? hoquetai-je perdant soudain toute ma superbe. Cela ressemblait décidément beaucoup trop à une scène de 50 Nuances de Grey.
Il rit encore plus fort.
- Tu regardes beaucoup trop de films ma belle, fit-il entre deux éclats de rire, je crois que je vais enfin m'amuser après tout ce temps.
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Minotaure
General FictionFaites attention à vos souhaits, car parfois il y a de très fortes chances que vos prières soient entendues, non pas par une bonne fée marraine, mais par le diable en personne. Le meilleur prédateur, dit-on, n'est pas celui qui prend sa proie sous l...