Échec et Mat.
16 mai.
Légèrement en retrait, j'observe attentivement le plateau d'échec qui fait l'objet de toute l'attention dans l'assistance. Aucun des deux adversaires ne se démonte. Des éclairs dans les yeux, leurs doigts se baladant agilement sur les pièces du jeu. La petite rousse au regard de féline esquisse finalement un mouvement pour battre en retraite. Son vis-à-vis prenant clairement l'avantage, elle finit par tendre la main vers lui pour déclarer l'abandon.
-ET...COUPÉ ! C'est très bien les enfants, on va faire une pause.
Les acteurs se détendent instantanément. Le petit moustachu retire son chapeau, il s'étire et se retourne dans ma direction. Son visage s'illumine tout autant que le mien quand il m'aperçoit. Il retire son manteau et s'avance vers moi, sans un mot, ses mains accrochent ma taille. J'attrape son doux visage et dépose mes lèvres sur les siennes. Cette impression que nous nous embrassons pour la toute première fois m'assaille et je ressens des petits crépitements dans le creux de mon ventre. Je me recule pour le regarder.
-Joyeux anniversaire Tommy. Il me sourit et enfouis sa tête dans mon cou. Ça te va plutôt bien ce style de cowboy...
-C'est vrai que je l'aime bien finalement cette moustache. Il fronce le nez pour la faire remuer comme un idiot. Mes yeux rivés sur ses lèvres, je me surprends à rougir légèrement. L'appel de sa bouche est trop fort, je l'embrasse de nouveau. Tout son être est ancré en moi. Ses lèvres que je connais tellement bien maintenant, la caresse de sa peau sur la mienne, la douce frénésie que me fait ressentir son parfum. Mais surtout ce regard dont je connais la moindre nuance, pas moins pénétrant que la première fois où je l'ai croisé, il y a de ça 5 ans.
Aujourd'hui Thomas fête ses 30 ans et d'ici peu, nous célébrerons nos 5 ans ensemble. Vous vous doutez bien que je ne lui ai pas téléphoné ce jour-là... Vous savez, ce fameux jour. Celui où ma vie entière à basculé. En réalité voilà comment ça s'est passé...
5 ans plus tôt...
Je suis bouche bée, pantelante. Il pose sa main sur ma joue et je ferme les yeux. Quand je les ouvre de nouveau, une larme roule sur mon visage.
Thomas s'est déjà éloigné.
Mon cœur s'emballe, je peine à respirer, mes yeux sont brouillés par les larmes. Mais qu'est-ce que je fais ? Je ne veux pas qu'il parte, je ne peux pas le laisser partir. Cette décision qu'il me demande de prendre je la connais déjà depuis le premier jour où nos chemins se sont croisés. Elle raisonne en moi comme une chanson que l'on garde en tête et dont je connais les paroles par cœur. J'inspire un grand coup et je me mets à courir dans la direction qu'il a emprunté. Je cours à n'en plus pouvoir, les poumons en feu, je glisse dans la neige et me rattrape plusieurs fois aux personnes qui se trouvent sur ma route. Je m'excuse brièvement, j'ai l'impression d'avoir perdu la tête. Ne retrouvant pas la trace de Thomas, mes espoirs me quittent peu à peu. Mes pleures redoublent d'intensité, plus rien n'a de sens. Je ne le trouve pas. Je ne le trouve pas. Je ne le trouve pas. Il est parti et je ne l'ai pas rattrapé. J'ai la nette impression que mon cœur va s'arrêter de battre jusqu'à ce que je décide de tourner à l'angle d'une rue. Je me retrouve par terre sans même avoir eu le temps d'esquisser un mouvement. Mon souffle se coupe à cause du choc, ma poitrine me fait mal. Je me frotte le visage tordu par la tristesse et ouvre les yeux. En face de moi, je découvre que c'est Thomas que je viens de percuter. L'un en face de l'autre, chacun les fesses dans la neige, je le regarde et il me regarde. Il ne m'a alors suffi que d'un instant.
-C'est oui.
-C'est oui ? Il répète. J'ai alors l'impression d'accepter une demande en mariage.
-Oui je veux partager ta vie, ton quotidien, tes peines, tes problèmes, tes doutes mais aussi tes éclats de rire, ton sourire et tous ces moments de bonheur dont tu m'as rendue accro. C'est une évidence. Je prononce, à bout de souffle. Depuis le premier jour, ça a toujours été une évidence.
Pour la première fois depuis notre rencontre j'ai l'impression de lui avoir cloué le bec. Il se redresse, attrape mes poignets et m'attire contre lui. Je me sens revivre quand ses bras m'entourent affectueusement. C'est alors qu'il éclate de rire. Je relève la tête vers lui, déconcertée. Des larmes roulent sur ses joues mais il rigole. Alors la pression redescend et je rigole avec lui. Il est bien là, avec moi.
Après quelques minutes, nos vêtements trempés par la neige, les yeux rouges d'avoir pleuré, je prends son visage entre mes mains pour l'embrasser le plus sincèrement du monde. Ses lèvres sont encore plus douces que dans mes rêves.
5 ans plus tard...
Thomas s'est détaché de moi quelques minutes pour passer aux vestiaires. Je suis montée sur le toit de l'immeuble pour admirer la ville de Berlin en hauteur. Je n'en reviens pas de l'avoir suivi jusqu'ici. Il me fait vivre des expériences plus folles les unes que les autres chaque jour. Je ne regrette pas une seule seconde de ces cinq dernières années.
La porte qui mène jusqu'au toit s'ouvre dans mon dos. Je regarde par-dessus mon épaule pour observer Thomas s'avancer vers moi. Je souhaiterai que les choses ne changent jamais. Arrivé à ma hauteur il dépose ses lèvres sur mon front. J'inspire et savoure le moment avant de prendre un peu de recul. Il me regarde, les sourcils froncés, pendant que je fouille dans mon sac à la recherche d'une chose bien particulière. Je la cache dans mon dos avant qu'il ne puisse l'apercevoir.
-Tommy. Je te souhaite le plus beaux des anniversaires. J'espère avoir la chance d'en partager une infinité d'autres avec toi dans les années à venir. Je lui tends alors le livre que je tiens dans mes mains. C'est le tout premier livre qu'il m'a offert à la bibliothèque, le jour de notre rencontre. Son regard se rempli de larmes, il l'attrape et me tire précipitamment vers lui. Je m'échoue contre son torse et nos bouches entrent en collision.
Depuis le début, ce fut comme une évidence.
"Chacun de nous est une anthologie composée de de milliers de pages remplies de contes de fées et de poésie, de mystères et de tragédies, de vieilles histoires que personne ne lira jamais" - Le matin de Neverworld
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C'est avec ces derniers mots que je marque un point final à cet "OS", si on peut encore l'appeler comme ça... J'espère que cette histoire vous aura autant plus qu'il m'a été agréable de l'écrire.
Dans la vie, le plus important c'est de connaître son bonheur et de s'y accrocher. Prenez le temps de regarder autour de vous pour réaliser les choses qui vous rendent vraiment heureux et laissez tomber les autres. La vie est unique et trop courte pour se tracasser avec des choses futiles. Croyez en vous.
N'hésitez pas à me laisser un petit mot pour échanger, ça fait toujours plaisir.
Peut-être à bientôt............
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Échec et Mat (OS)
FanfictionFaites confiance au chapitre suivant de votre vie car vous en êtes l'auteur.