L'Histoire de mon Frère...

Chapitre Troisième

Quand Édouart n'était qu'un nourrisson, mes parents laissaient souvent sa garde à nos grands-parents. Bien que mes parents le haïrent, nos grands-parents l'aimèrent beaucoup. Ils avaient toujours aimé chacun de leurs petits enfants et Édouart ne fit pas exception à la règle. Il avait toujours la même portion de nourriture que nous, le même nombre de cadeaux, le même amour. Mais un jour, toute cette tranquillité fut chamboulée et j'en frissonne encore.

Une nuit où le froid paralysait quiconque sortait dehors, un atroce événement se produisit dans la petite chaumière des anciens.

Mes parents, moi et mes frères, étant partis à une réception, avions confié Édouart à nos grands-parents, n'étant à l'époque qu'un jeune enfant. Comment auraient-ils put savoir que la Grande Faucheuse éguisait sa faux non loin de la maison?

Pendant que notre grand mère faisait basculer son berceau en lui chantant une chanson, la neige crissait devant le pas de la porte. Notre grand-père, sentant que quelque chose n'allait pas, sortit sa vieille baguette abîmée par les années. Soudain, la porte s'ouvrit, laissant le froid glacial pénétrer dans la maison. Les bougies s'éteignirent sous un coup de vent glacé et mon grand père alluma sa baguette. Le froid leur engourdissait les membres et la neige fouettait le visage à quiconque s'approchait de la porte. Le vieille femme embrassa le front de son petit fils en murmurant un: “Silence”. Elle posa son doigt frippé sur ses lèvres, avant de rejoindre son mari qui avançait lentement vers la porte. Édouart ne bougea pas, les yeux grands ouverts, son nez rougi par le froid soudain.

“Qui est là? demanda avec méfiance le vieil homme.”

Soudain, un visage apparu brusquement dans le halo doré de la lumière. Un visage gris, mal rasé, les yeux exorbités, dément. Un fou. Voilà se qu'il y avait dans la maison. Un fou. Sans qu'ils eurent le temps de crier, le fou avait déjà brandit son couteau au dessus de lui. Le carnage qui s'ensuivit fut atroce, mais Édouart ne bougea pas. Pas une larme, pas un pleurs. Rien. Juste le silence. Le fou, une flamme démente dans le regard, reprit son couteau et se l'enfonça dans le corps. Sa folie l'a tué. Sa folie a tué. Sa folie l'a perdu et Édouart demeurait, silencieux.

Les corps déchiquetés de nos grands-parents furent retrouvé le lendemain par un paysan qui passait par là. Tout le village en fut alerté et c'est ainsi que l'on retrouva l'enfant, complètement gelé par la nuit. Il était vivant, certe, mais comment pouvait-il vivre en ayant vu cela? En ayant vu le couteau du fou s'enfoncer dans la chair des seuls qui l'avait aimé? Comment un enfant pouvant redessiner une clairière qu'il a seulement vu une fois pouvait oublier le spectacle atroce de l'assassinat de ses grands-parents?

À peine avait-on sortit mon frère de la maison que des rumeurs naissaient dans le village. Plusieurs hommes et femmes commencèrent à croire qu'Édouart était maudit et les regards noirs se succédèrent à sa vue. On ne voyait plus un simple enfant à présent, mais juste une malédiction qui avait tué ses grands-parents. Il avait vu la mort. Et elle l'avait vu aussi.