II

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Après un après-midi qui parut anormalement long aux yeux de Stanislas, ils rentrèrent donc, Camille toujours au volant, à l'hôtel, où ils y avaient loué une chambre ensemble.

Camille était, sans grande surprise, très heureuse de cette journée. Elle sifflotait au rythme de la vieille musique qui émanait du poste radio de la chère auto. Il ne lui manquait qu'une seule chose aujourd'hui; son fameux cocktail. Mais elle se rassure en se rappellant qu'il lui restait encore du temps à passer ici, et qu'elle irait avec le russe en commander sur une terrasse, avec le bord de mer en fond.
Cette pensée lui fit esquisser un sourire, tandis qu'elle prenait un tournant sur la gauche.

Le soleil, couleur d'aniline, était désormais derrière eux.
Camille regardait parfois l'arrière de la voiture sur le rétroviseur, pour y voir son passager. Stanislas, lui, observait le paysage défiler à travers la vitre, les yeux fatigués. Quelques-unes de ses mèches blanches, accentuées par la lumière orangée de la soirée, lui tombaient sur le visage, et contrastaient avec le reste de ses cheveux de Jais. Elle trouvait cette bicolorité capillaire très attirante. Elle ne lui avait d'ailleurs jamais demandé d'où elle venait.
Puis, en chassant ses idées centrées sur le russe, elle se reconcentra sur la route, et conduisit jusqu'à arriver à leur hôtel.

Après avoir ouvert la porte de leur chambre, Camille, sac de plage à la main, le pose au bord de son lit et se jette dans celui-ci, les jambes toutes engourdies.
Un long soupir se fait entendre de sa part, tandis que quelques secondes plus tard, elle se redresse pour observer Stanislas, qui lui range ses affaires plus calmement.

“- Je vais me doucher en première ! ” lui dit-elle, avant de se lever pour attraper l'une de serviettes de l'hôtel mise à sa disposition.

“- Tu vas encore mettre trois ans... ”

Cette réflexion a valu au russe une tape sur l'épaule de la part de la brune. Coup au quel il répondit par un soufflement, laissant transparaître sa douleur.

“- C'est là où j'ai mon coup de soleil connasse... ”

Et oui. Malgré la crème solaire appliquée avec soin par Camille, le russe à la peau pâle et délicate ne s'est pas sorti indemne de cette journée à la plage. Maintenant, une jolie trace rougeâtre orne son épaule gauche, qui d'habitude ne possède pas autant de couleur.

Son amie ria légèrement, d'un rire coupable, mais elle ne regrettait pas le moins du monde son acte.
Alors, elle s'en va dans la salle de bain, un sentiment de fierté s'emparant d'elle après son coup-bas.

La remarque de Stanislas n'était pas sans fondements; lorsqu'il s'agit d'utiliser la salle d'eau, la brune est effectivement longue. Ses cheveux lui demandent une attention particulière, et c'est pour cela qu'en plus des vêtements et autres affaires de première nécessité, on peut trouver dans sa valise des pots, bouteilles, ou flacons de soins pour cheveux.
Combien de fois avait-elle envié les cheveux lisses et droits de son ami, où il serait facile d'y passer la main, sans rencontrer de nœuds. Combien de fois...

Enfin, elle savait bien que blâmer la génétique ne servirait à rien, alors elle s'efforçait à y faire attention, pour qu'ils soient les plus brillants, les plus soyeux, et que ses boucles soient les plus parfaites. Et tout ce travail requiert une certaine quantité, en plus d'énergie, de temps.

Pendant que Camille se douchait, Stanislas, lui, décida de sortir son ordinateur pour le poser ensuite sur le bureau à sa gauche. Il s'assoit sur la chaise, puis commence à taper sur les touches du clavier d'une manière rapide et précise.
Il a décidé de dépenser son temps dans des recherches plus approfondies sur Santorin, ainsi qu'une certaine personne, qui serait une petite “star” locale, d'après les dires.
Il se baladait de site en site, la tête reposant dans le creux de sa main. Il se contentait de retenir les noms de quartiers importants, de rues, de bars.

Les recherches n'étaient pas le fort du russe, et cela l'ennuyait plus que tout. Il baillait, face aux pages de mots qui défilaient sous ses yeux. La lumière artificielle de l'écran, beaucoup trop élevée par ailleurs, le fatiguait encore plus et le forçait à plisser les yeux.
Mais pour autant, c'était une activité nécessaire, afin de retrouver sa victime. Sinon, cela serait égal à chercher une aiguille dans une botte de foin, et c'est une chose qui ne donne envie à personne, surtout pas à Stanislas.

Après avoir parcouru un énième site, son téléphone se mit à vibrer contre le bois poncé de la table. Cela le surprit; il n'y a que Camille, des “collègues” ainsi que son patron qui ne l'appellait. En retournant l'appareil, c'est d'ailleurs le numéro de celui-ci qui s'affichait à l'écran, blanc sur noir.
Il le prit en main, perplexe. Son patron n'a pas l'habitude de l'appeller pendant une mission. Ce n'était jamais arrivé auparavant.

Stanislas répondit alors, en portant son téléphone à son oreille, attendant, ce qu'il devinait être, des instructions supplémentaires.

Des éclats de voix se font ensuite entendre, même à travers les murs de béton de l'autre pièce, ce qui fit sursauter Camille, encore sous le jet d'eau chaude. Le russe haussait la voix, lui habituellement si calme.
Elle parvient à entendre quelques mots à la volée, mais rien de concret. De plus, la langue étant du russe, elle eût du mal à les identifier.

Pourtant, elle parvient à entendre une phrase bien distinctement :

“- Што ето все знацит ? ”

Si elle est traduite, cela veut dire: “Qu'est-ce que tout cela signifie ? ”

Puis, une minute après, environ, les sons se stoppèrent. Elle n'entendait plus la voix de Stan.
Alors elle baissa le robinet, ce qui arrêta la chute de l'eau, et elle sortit de la cabine, dont les vitres étaient désormais toutes embuées. Elle se sècha, puis enroula ses cheveux dans la serviette, tout en s'habillant de son pyjama, constitué d'un simple débardeur gris, d'un short de la même couleur, et de ses chausettes roses.

Elle ouvre donc la porte de la salle de bain, et tombe sur son ami, accoudé au bureau, la tête cette fois-ci entre ses deux mains.

“- Qu'est-ce qu'il y a ? ”

L'air chaud bloqué dans la salle de bain vient réchauffer la pièce principale, tandis qu'elle s'approche de Stanislas, jusqu'alors arriver à son niveau.
Il relève la tête pour pouvoir lui faire face, et sa main gauche s'échoue sur le bois, tandis que l'autre, sur son visage, pour pouvoir dégager ses cheveux, qui lui bloquent la vue.
Il finit enfin par parler.

“ - Ma mission a changé. Je ne dois plus le tuer, mais le protéger. ”

ὄφιςOù les histoires vivent. Découvrez maintenant