Cauchemars

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Texte écrit dans le cadre du Combat à mort sur le forum HPF. Défi du jour : le texte doit commencer par un cri.
Il se passe peu de temps après le 17x14

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"Nick!"

Comme à chaque fois qu'elle faisait ce cauchemar, elle se retrouvait à crier son nom. Régulièrement, elle revivait l'accident. La voiture qui déboulait à toute vitesse. Nick qui la poussait en arrière. Le crissement des pneus.

En ouvrant les yeux, haletante, Ellie retrouva l'environnement familier de sa chambre. Une faible lumière venait de la fenêtre dont elle avait oublié de fermer les volets. Sentant la transpiration sur sa nuque et dans le bas de son dos, elle s'assit sur son matelas, les genoux entre les bras. Elle avait soif, mais n'avait pas la force de se lever jusqu'à la cuisine. Elle se contenta donc de poser sa tête sur ses genoux pour observer par la fenêtre, le regard perdu dans le vague. La chambre était silencieuse. Trop silencieuse. Ellie avait beau être réveillée, elle continuait d'entendre les bruits et les cris de son rêve.

Ce son strident de la gomme sur la route résonnait dans tout son corps. Dans son cauchemar, il se mêlait aux sirènes des ambulances, à l'odeur du désinfectant de l'hôpital et aux bips des machines. A chaque fois, elle revivait ce qu'elle avait éprouvé ce jour-là. La peur et l'angoisse, à l'idée de le perdre.

Cela faisait plus d'un mois maintenant. Nick était sorti de l'hôpital, vivant. Il avait même repris le travail. Tout allait bien, mais pas elle. Pas les nuits où elle faisait ces cauchemars.

Ellie se laissa tomber dans son matelas avec un soupir. Elle n'aimait pas revivre cette sensation de vulnérabilité, de manque, qu'elle avait ressenti lorsqu'il était inconscient. Cela lui rappelait constamment qu'il lui fallait mettre un mot sur sa relation avec Nick. Depuis quelque temps il s'y était immiscé quelque chose qui dépassait l'amitié, mais jusqu'à présent elle avait toujours éviter d'avoir à mettre un mot dessus. Cet équilibre leur allait très bien à tous les deux pour le moment.

Lançant sa main sur la table de chevet, Ellie attrapa son téléphone. L'écran bien trop brillant lui indiqua cinq heures douze. Après avoir ramené la luminosité à un niveau acceptable, par réflexe, elle cliqua sur l'icône de sa messagerie et le nom de Nick apparu en premier. Un sms qu'il lui avait envoyé hier pour savoir si elle voudrait venir courir avec lui ce week-end et qui était resté sans réponse.

Depuis l'accident, Ellie usait de toutes les excuses pour éviter ce genre d'activité. Reprendre leur trajet habituel impliquait revenir sur les lieux de l'accident, et elle n'en ressentait ni le besoin, ni l'envie. Les cauchemars étaient largement suffisants.
La culpabilité l'avait poussé à ne rien dire à Nick. De ne pas avoir le courage de retourner là-bas, alors que ce n'était même pas elle qui avait été victime de cet accident. Et le sentiment également que, si elle n'avait pas été présente ce matin-là, il aurait sans doute évité cet accident. Même si c'était lui qui était visé, après tout, c'est elle qu'il avait poussé hors du chemin de la voiture avant de lui courir après. S'il n'avait pas eu à la mettre à l'abris, il aurait pu esquiver la voiture.

L'écran du téléphone était toujours allumé, et le nom de Nick dansait toujours devant ses yeux. C'était la seule personne à laquelle elle avait envie de parler à cet instant. Elle savait que le simple fait d'entendre sa voix la calmerait, la rassurerait et lui rappellerait qu'il était bel et bien là, à quelques kilomètres d'elle seulement, et qu'ils se verraient le lendemain au bureau.

Du bout des doigts, elle tapa un message. Elle hésita de longs instants, l'effaça, puis le tapa à nouveau avant de l'envoyer. Et dès que ce fut fait, elle se trouva idiote et espérait profiter de son insomnie pour trouver une excuse pas trop ridicule à sortir à Nick demain matin.

Quelques secondes plus tard, le téléphone vibra entre les mains de Ellie, lui arrachant un petit sursaut. C'était Nick. Fébrile, elle décrocha.

— Hey Ellie, tu ne dors pas non plus?

Ellie avait craint qu'il soit énervé qu'elle le réveille par un message à cette heure, mais sa voix était tout à fait détendue. Pas très vive, mais elle n'y percevait aucune animosité.

— Non je... mauvaise nuit, éluda-t-elle. Est-ce que je t'ai réveillé?

— J'aurais préféré. Mauvaise nuit pour moi aussi on va dire.

Il s'en suivit quelques instants de silence. Ellie, la tête enfoncée dans son oreiller fixait le plafond. Elle avait voulu parler à Nick, et maintenant que c'était le cas elle n'avait aucune idée de quoi lui dire. Sentir sa présence au bout du fil lui suffisait en fait, mais elle passerait pour une folle si elle lui avouait cela. De son côté, Nick non plus ne semblait pas très bavard.

— Je peux être là dans vingt minutes.

Ellie ouvrit la bouche pour protester, puis se rappela que c'était à Nick qu'elle parlait. Il était au moins aussi entêté qu'elle. Il avait prononcé la phrase à la manière d'une question pour la forme, mais elle savait que quoi qu'elle répondrait, il serait à sa porte dans peu de temps. Ellie dû également admettre qu'elle n'avait pas envie de dire non. La présence de Nick était sans doute sa seule chance de retrouver un peu de sérénité d'ici la fin de la nuit.

— Je t'attendrais dans le canapé.

Comme elle l'avait dit, quand il entra dans l'appartement après avoir frappé deux coups, Nick trouva Ellie dans son canapé. Un mug fumant dans les mains, les yeux cernés et l'air vidée. Il ne posa pas de question, car il savait pertinemment qu'elle ne lui avouerait pas ce qui avait troublé sa nuit. Tout comme il n'osait lui dire ce qui avait troublé la sienne. Il se contenta d'enlever ses chaussures, et de s'approcher.

En voyant Nick entrer, Ellie le trouva bien plus présentable qu'elle. Il avait au moins pris la peine d'enfiler de vrais vêtements, alors qu'elle était toujours en pyjama. Elle se contenta de soulever le plaid qui reposait sur ses genoux, invitation silencieuse à la rejoindre.

Nick s'assit à côté d'Ellie, passant un bras derrière elle, la laissant se blottir au creux de son épaule. La peur qui pétrifiait Ellie tout à l'heure s'était évanouie au contact de Nick. Près de lui, tout était si facile, et si chaud songea-t-elle en fermant les yeux.

En la voyant soudainement si calme, Nick esquissa un sourire qu'il camoufla derrière la tasse que Ellie venait de lui tendre. Il profita de sa proximité pour appuyer son menton contre le haut de sa tête et se laissa même à glisser ses doigts dans ses cheveux. Elle devait penser qu'il n'avait proposé de venir que pour elle, car il avait senti qu'elle se sentait mal. C'était une partie de la vérité. Il était venu autant pour elle que pour lui. Il voulait la voir, l'entendre, la sentir près de lui. Il savait que c'était la seule chose que son cerveau accepterait pour qu'il se calme.

Entre les deux agents, la conversation n'était pas très vivace, mais suffisante pour leur faire oublier les raisons de leur insomnie respective. Elle continua jusqu'à se tarir, progressivement remplacée par leur respiration, lente et profonde. Enlacé dans les bras l'un de l'autre, ils avaient fini par trouver ce dont ils avaient besoin pour dormir.

Ellick : recueil d'OSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant