𝕷𝖆 𝕻𝖚𝖗𝖊𝖙𝖊́ 𝖛𝖆𝖎𝖓𝖈𝖗𝖆 𝖙𝖔𝖚𝖏𝖔𝖚𝖗𝖘 (𝐿𝑖𝑣𝑟𝑒 𝟚) ✔

Mensonges

« Elle n'aimait pas détruire les autres, alors elle se détruisait elle-même.»

Narcissa ne voulait pas voir cela. C'était une insulte à ses yeux, un cauchemar qui prenait vie. C'était une ignoble image, une horrible scène. Tout la conduisait à penser que le meilleur pour elle était de s'enfermer dans une pièce et fermer les yeux jusqu'à ce que le monde entier disparaisse. Tout lui insufflait d'arrêter de se torturer elle-même. Tout lui hurlait de ne pas se laisser faire, de reprendre ce qui était à elle, de se battre pour ses biens, mais c'était Lui. Et rien ni personne ne pouvait s'élever face au Seigneur des Ténèbres.

Alors qu'il montait lentement les escaliers du manoir, elle l'observa avec un mélange de haine et de dégoût, ses yeux noirs dessinant la tempête qui s'étalait devant elle. C'était lui qui lui avait pris Aurbun. Lui qui lui avait pris Evan.

C'était pour lui que Bellatrix l'avait abandonnée.

Narcissa tourna la tête vers l'amas de Mangemorts qui s'inclinait devant leur Maître. Sa sœur jubilait de joie. Bellatrix n'avait jamais été douée pour cacher ses émotions, mais en cet-instant Narcissa aurait voulu qu'elle fasse un effort. C'était ridicule. Idiot. Sa sœur aînée était idiote de toute manière. Toute son enfance elle l'avait observée avec des yeux de petite fille et une soif de ressembler à plus grand que soit. Mais à présent, après quatorze ans passés loin d'elle, elle l'a trouvait tellement idiote qu'elle en avait honte. Était-ce de la rancune ? Certainement. Mais Narcissa aimait mépriser ceux qui le méritaient.

- Cissy, arrête, chuchota Lucius sur un ton autoritaire à ses côtés.

- Je n'ai rien fait.

- Garde ton dédain pour un autre moment.

Elle soupira d'exaspération. À présent, les moindres pensées émies dans son manoir seraient dévoilées. Les moindres paroles rapportées, les moindres regards jugés. Son lieu de vie deviendrait condamnable et sa vie privée disparaîtrait. Elle sentait qu'elle n'allait pas tenir longtemps dans cette situation. Autant mourir de suite, et ne pas perdre son temps à souffrir.

Mais une seule chose l'en empêchait.

Drago fixait l'homme -ou plutôt le monstre- debout sur les escaliers avec un regard terrifié et admiratif à la fois. Après tout, c'était la première fois qu'il voyait un homme si puissant franchir les portes de sa maison. Il était jeune, influençable ; elle espérait que cette admiration lui passerait rapidement.

Parfois, elle se suprenait à penser qu'il était trop jeune pour vivre tout ça. Que cette guerre n'était pas faite pour un gosse de quinze ans. Qu'à quinze ans, on devrait rire, danser, pleurer pour les chagrins du cœur. Que c'était l'âge où on voyait enfin le monde prendre vie et s'élever. Pas l'inverse.

Durant les minutes qui suivirent, Narcissa regarda partout et offrit ses réflexions aux moindres recoins de la pièce excepté là où le Seigneur des Ténèbres affichait sa victoire. On l'obligeait peut-être à être présente physiquement, mais le reste leur importait peu. Elle était libre de penser, non ?

Peut-être plus maintenant, en fait.

Par la suite, Lucius fut obligé de présenter à son Maître l'aile qu'il allait occuper. Narcissa s'évita une occasion de traiter le monde entier d'absurdité et s'enferma dans le petit salon où la chaleur du feu la réconforta. Elle s'assit sur le sofa en cuir et s'imagina un instant dans une autre vie, loin de toute guerre et questions sans réponse. Mais elle savait que c'était trop beau pour être vrai. Parce que, à partir de maintenant, c'était le destin qui tranchait.

Un destin qu'elle aurait tout donné pour ne pas connaître.

Elle se souvenait encore de l'odeur d'encens entre les tissus troués par le temps. Des tintements des os suspendus au sol, de la peau grasse et suintante de la vieille prêtresse. Ce ne devait être qu'un jeu, à l'origine. Elle n'avait jamais prévu d'y entrer. Mais elle avait voulu montrer à tous qu'elle était une Black et qu'elle n'avait peur de rien. Narcissa n'avait jamais eu aussi grand regret de toute sa vie.