Olivia

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« En réalité, c'est l'espoir qui nous fait souffrir quand il n'y en a plus mais qu'on y croit quand même... »
Morgane Rgn

Narcissa bouillonnait de rage. Non pas seulement contre Olivia, ni contre Andromeda, ni même contre elle-même, sinon contre l'existence entière et sa manie de toujours faire réapparaître des choses qu'elle avait tenté d'oublier. Plusieurs jours, elle resta enfermée dans son manoir, à ruminer des vieux souvenirs, peser le pour, le contre, le pourquoi de ses questions et le pourquoi des pourquoi.

Les paroles d'Olivia résonnaient encore dans sa tête, sans aucune envie de partir. Laisser ses aînées se quereller. Avait-elle eut un rôle, au fond, dans tout cela ? À part le fait de servir d'appui-tête pour chacune d'entre elle. Andromeda avait renié sa famille par amour. Et elle l'avait détestée pour ça. Détestée pour le choisir lui au lieu d'elle. Détestée pour lui avoir fait si mal volontairement. Mais en prenant du recul et en réfléchissant bien, elle se rendait compte qu'elle aussi aurait été capable de trahir le monde entier pour Lucius. Qu'elle n'était pas si différente, au final. Elle avait juste choisi le bon.

Même si elle se doutait qu'il y avait eu d'autres raisons pour ce reniement, elle se contenta de cette idée et quelques jours plus tard, rédigea une lettre qu'elle signa et cacheta du sceau de sa famille. Bellatrix la tuerait si elle avait le malheur de savoir ce qu'elle avait fait. Lucius également. Mais cela n'avait plus d'importance. Elle en avait assez de regretter.

La nuit tombée, elle sortit de son domaine, transplana et atterrit dans l'Allée des Embrumes, plus effrayante encore quand elle était plongée dans l'obscurité. Avant de passer la porte de l'établissement d'Olivia, elle entendit quelques pas dans les ruelles voisines, mais prit cela pour des rongeurs assoiffés. Elle entra, traversa les pièces chaudes et arriva dans le bureau de la maîtresse des lieux sans aucune présentation. Celle-ci était assise au bord de sa fenêtre étroite, un genou collé contre sa poitrine, ses cheveux coincés entre le mur et son dos, le regard tourné vers la lune brillante.

– Pose-la sur mon bureau, ordonna-t-elle finalement sans laisser transparaître aucune émotion.

Narcissa s'exécuta et, ne sachant quoi faire d'autre, se dirigea de nouveau vers la sortie quand la voix d'Olivia la stoppa net dans son élan.

– La narcisse s'est fanée

La fleur s'obscurcit.

Le cri de l'âme déchirée,

Se mêle au silence de la nuit.

Un silence s'ensuivit, plus pesant et solennel que jamais. Le cœur de Narcissa semblait s'être arrêté durant quelques secondes, comme rendu misérable par ces vers. Elle se mordit la lèvre et se retint de partir en courant pour fuir dans un endroit où le temps pouvait reculer. Si seulement.

– Je sens la peur en toi, déclara-t-elle au bout de quelques minutes sans parler. Tu ne veux pas le montrer, mais tu as peur.

– Tu ne sais rien de moi.

Elle laissa échapper un petit rire, presque moqueur.

– Oh si. Contrairement aux autres, je n'ai rien oublié de ce que tu me racontais. Rien. Chaque nuit que tu te rendais dans le dortoir des dernières années, je t'écoutais et je séchais tes larmes, discrètement. La journée, tu ne m'adressais pas la parole, parce que personne ne le faisait et tu n'aimais pas te démarquer, mais la nuit tu changeais. Alors, avec le temps, j'ai remarqué quelques chose. J'ai remarqué que tu étais le genre de fille qui souriait pour paraître heureuse mais qui à l'intérieur se brisait. J'ai remarqué que tu étais la meilleure pour faire semblant. La meilleure pour dire « oui » alors que son âme hurle « non ». Et alors que je pensais que tu allais craquer, te fendre un jour où l'autre, aujourd'hui tu continues à t'inonder de larmes et porter un magnifique sourire pour convaincre le monde que tu vas bien.

𝕷𝖆 𝕻𝖚𝖗𝖊𝖙𝖊́ 𝖛𝖆𝖎𝖓𝖈𝖗𝖆 𝖙𝖔𝖚𝖏𝖔𝖚𝖗𝖘 (𝐿𝑖𝑣𝑟𝑒 𝟚) ✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant