𝙳𝚒𝚜𝚊𝚜𝚝𝚎𝚛

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Il faisait nuit. C'était un constat stupide, anodin. Mais, il se rendit compte que dehors le soleil s'était couché, depuis longtemps. Enfin, le moment de calme qu'il attendait pouvait commencer.

Ses pas se firent discrets quand il quitta son lit pour le froid rude de l'extérieur. Personne ne remarquerait son absence jusqu'au matin.

C'était son instant de repos, son temps d'évasion. Pendant que d'autres fermaient les yeux sous les étoiles, lui les contemplait avec tendresse. Embrassant chacune d'entre elle du regard.

Sa petite routine s'était mise en place quelques jours avant. Quand sa vie avait prit un tournant brusque et peu plaisant, quand il avait appris que les deux personnes qui comptaient le plus pour lui allaient bientôt s'unir, par ce lien si sacré qu'était le mariage.

Non, il ne parlait pas de ses parents. Et s'il en avait, il resterait de marbre face à leur union. Ici, il était plutôt question de ses meilleurs amis. Les deux idiots avec qui il avait grandit, partager sa vie et même une maison. Enfin, pour le dernier point ce n'était qu'une colocation provisoire apparemment.

Ces deux cons ne lui avaient jamais dit qu'ils étaient ensemble. Ils avaient simplement choisit un jour quelconque dans le calendrier pour lui annoncer avec de grands sourires débiles qu'ils allaient s'unir à vie.

Et lui dans tout ça ? Il avait été désigné comme le parrain de leurs futurs marmots et le témoin du marié.

Il avait cru à une blague, une blague pas drôle, mais une blague quand même. Le seul œil visible sur son visage avait bien faillit se décrocher de son orbite, tellement le choc avait été grand. Mais, au lieu d'exprimer tout le désarroi, l'incompréhension et l'injustice qu'il ressentait face à cette annonce pour le moins inattendue, il leur avait sourit.
Un sourire maladroit et trop bancal mais un sourire sincère. Il était heureux pour eux et triste pour lui-même.

Il ne comprenait plus rien. Il ne se comprenait plus.

Qu'avait-il raté dans tout ça ?

Alors pour se changer les idées, il observait les étoiles. Les priant silencieusement pour qu'elles l'aident à sortir de cette situation.

Ce n'était même pas le mariage qui lui faisait du mal. Au contraire, il était très heureux pour Norman et Emma, ils ressemblaient au couple parfait. À ce couple adorable et chaleureux qui nous fait croire que l'amour véritable n'est pas qu'une utopie de série espagnol.
Disons que ce qui le tracassait était le caractère soudain de l'acte. Pourquoi l'avoir garder à l'écart ? Comme s'il n'avait pas le droit de le savoir ?

Ils connaissaient parfaitement ces deux imbéciles mieux qu'il ne se connaissait lui-même. Entre la jolie rousse, intrépide, courageuse, espiègle et débordante d'énergie et de joie de vivre qu'était Emma et le blond intelligent, généreux, adorable et charismatique qu'était Norman, ils n'avaient aucun secret pour lui. Enfin, jusqu'à ce qu'il apprenne qu'ils allaient se marier !

Ça avait du sens quelque part. Les deux étaient parfaits ensemble, parfaits l'un pour l'autre. Comme les pièces d'un puzzle qui se complètent à la perfection.

Lui, dans tout ça, n'est que l'erreur à l'équation. La tâche d'encre trop large sur la blancheur immaculée du monde. De leur monde.

Il pensait que leur trio allait tenir encore un peu. Même si cette situation faisait partie de ce qu'il aimait qualifier d'inévitable. Quelque chose aurait finit par les séparer un jour ou l'autre, tôt ou tard.

Tant mieux si ses amis étaient heureux. Lui pourra très bien s'en sortir avec lui-même. Peut-être vendre cette baraque qu'ils avaient acheté ensemble vu qu'il ne se voit pas y vivre tout seul et après parcourir le monde dans sa caisse avec pour seul compagnon de route, son paquet de clopes.

Il regrettait de ne pas s'être ouvert au monde comme le lui a maintes fois conseillé sa mère factice à l'orphelinat.

"Tu ne peux pas garder les mêmes amis jusqu'à ta mort Ray."

Elle avait bien raison.

Toute sa vie n'avait tourné qu'autour des deux autres. Quand ils allaient à gauche, il suivait et etc...Et maintenant qu'ils traçaient leur propre chemin, qu'adviendrait-il de lui ?

"- Je peux entendre les rouages de ton cerveau s'entrechoquer de là où je suis.

- Norman ?"

Le blond haussa des épaules en croisant son regard bleuté, fatigué. Lui-même n'avait pas l'air d'avoir vraiment dormi ces derniers temps. Sûrement, préoccupé par l'organisation de son mariage qui avait lieu dans un mois. L'chanceux.

"- Qu'est ce que tu fais tout seul dehors à une heure pareille ?

- Rien, ça se voit.

- Tu essaie de me mentir ? À moi !?

- Si ton cerveau de surdoué est si prodigieux essaie de deviner par toi-même ce que je fous assis sur une putain de balançoire au milieu d'un parc pour gamins à minuit !

- À mon humble avis, tu es venu y réfléchir. Parce que ce parc est celui où on jouait étant gamins et tes endroits préférés étaient cette balançoire et le grand chêne."

Le noiraud resta bouche bée quand le nouveau venu prit place près de lui sur la deuxième balançoire à droite de la sienne. Norman était quelqu'un d'extrêmement intelligent certes, mais avec Ray, il s'était avéré être très manipulateur et franc.

Car comment cerner un individu très peu bavard et non-expressif sans entrer dans sa tête ?

Le noiraud appréciait cette facette de lui, de cette étrange fascination qu'on a pour un objet précieux et inaccessible. Mais, s'en méfiait. Il n'aimait pas trop la facilité avec laquelle le blond pouvait lire en lui. Ça lui faisait parfois peur.

"- Alors, le futur marié, heureux ?

- T'imagines même pas à quel point c'est stressant.

- Bah, tu l'as demandé en mariage tout seul. T'aurais dû réfléchir.

- C'était une décision mûrement réfléchie, je te signale. C'est juste que je me demande où ça nous mènera et si je pourrais tenir cette promesse jusqu'au bout."

De ses deux amis, Norman était celui qui lui manquera le plus et pourtant qu'il appréciait le moins. Emma était le joie de vivre incarnée alors il était normal de s'attacher rapidement à elle.

Mais, Norman était un diamant caché sous des milliards de couches de plomb. Un mystère entre les pages d'une énigme. Il était tout et rien. Un peu de tout dans un grand vide.

"- On devrait rentrer.

- Pourquoi ? Je t'ai jamais demandé de me suivre.

- Parce que te laisser ici tout seul n'est pas une option.

- Encore une fois, je ne t'ai rien demandé.

- Oui, mais moi je te demande de rentrer avec moi. Rien que nous deux..."

Rien...

Que...

Nous...

Deux...

𝘈𝘱𝘢𝘳𝘵Où les histoires vivent. Découvrez maintenant