Chapitre 5

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Chapitre 5

La première chose qui frappa Peter une fois poussé à l'extérieur fut le bruit assourdissant de la tempête. Après être resté quelques jours dans un sous-sol désolé, où les seuls bruits étaient ceux des tuyaux qui fuyaient, les hurlements du vent étaient presque écrasants. Le bruit donna des frissons à Peter.

Quand Dave avait dit qu'il ne survivrait jamais à la tempête, Peter l'avait ignoré. Il était solide, bien plus solide que le soupçonnaient ses ravisseurs, et il n'avait pas peur d'un petit blizzard. Cependant, debout dans le vent mordant alors que de gros flocons tombaient autour de lui, le doute commença à s'infiltrer dans l'esprit de Peter.

De toute sa vie sur la Côte Est, Peter n'avait jamais vu une tempête pareille. Des amas de neige, par endroits atteignant sa taille, recouvraient le paysage d'une couche de blanc. Tout ça ressemblait aux vidéos de la toundra dans les documentaires qu'il regardait avec May. Des milliers de flocons de neige volaient devant les yeux de Peter, et à sa grande horreur, il réalisa qu'il ne pouvait rien voir à travers le vortex de neige excepté la ferme, à peine quelques mètres derrière lui.

Un tranchant coup de vent mordit le visage de Peter, et il remonta une de ses écharpes plus haut sur son visage, tentant de protéger ses joues sensibles qui étaient déjà irritées par des hématomes. Il savait qu'il devait continuer s'il voulait trouver de l'aide avant d'être submergé par la neige.

L'adolescent commença à marcher péniblement dans la neige, en direction du champ qu'il avait vu en arrivant à la ferme. Peter grogna quand il s'enfonça dans la neige, grimaçant à la brûlure de sa jambe gauche qui accompagnait chaque pas éprouvant. Il ne pouvait même pas voir ses pieds enfouis dans la neige. Peter fut soudain envahi d'une vague de reconnaissance pour ses ravisseurs, qui lui avaient donné le pantalon de ski et les bottes. Sans ces vêtements chauds, Peter se serait sans doute déjà effondré – il savait que son sweat usé n'aurait été d'aucune utilité pour se protéger du vent glacial.

Il aimait la neige, avant. Dès qu'il voyait les flocons tomber sur la ville, une pointe d'excitation naissait dans la poitrine de Peter, qui passait tout l'hiver à faire de la luge, du patin à glace, ou à construire des châteaux de neige avec Ned. Désormais, alors que le vent lui hurlait dans les oreilles, Peter ne ressentait qu'une peur bouillonnante au creux de son estomac. Cette neige n'était pas la même neige que Peter connaissait. Cette neige était sombre et menaçante, un flou blanc et chaotique qui menaçait  de pénétrer ses os. Cette neige allait le tuer.

La poudreuse glaciale craqua sous ses bottes de neige alors qu'il avançait péniblement, lentement mais sûrement. Ses pensées dérivèrent tandis qu'il se débattait dans la tempête. L'adolescent se sentait comme un astronaute qui explorait une étrange planète, une planète où l'air était glacé, et où la gravité extrêmement forte rendait chaque pas plus difficile que le précédent. Sauf qu'il n'était pas un astronaute, juste un gamin de seize ans pourvu d'une détermination à toute épreuve qui luttait contre une monstrueuse tempête de neige.

Peter regarda derrière lui, vers la ferme. Bien qu'il n'ait parcouru qu'une cinquantaine de mètres, les épais flocons de neige rendaient la maison hors de vue. Peter pouvait à peine distinguer la forme du bâtiment qui se profilait à l'horizon, une tache gris clair sur le ciel d'un blanc aveuglant. Peter envia soudainement la chaleur de la maison, la sécurité qu'elle promettait, malgré l'enfer qu'il avait connu là-bas. L'enfer que Tony était en train de subir. Cette pensée poussa Peter en avant, plus vite cette fois.

Jimmy lui avait dit de suivre la voie de chemin de fer, et une étrange partie de Peter avait envie de lui faire confiance. Bien que Peter sache qu'il pouvait l'envoyer volontairement dans la mauvaise direction, l'adolescent ne pouvait pas oublier le regard triste et doux de l'homme quand il l'avait laissé dans la tempête. Il ne pouvait pas non plus oublier les mains douces de Jimmy qui soignaient si délicatement sa blessure. Le garçon avait l'envie folle que quelqu'un prenne soin de lui, et suivre le chemin de fer était la seule piste qu'il avait pour trouver de l'aide. Cette logique lui semblait suffisamment solide. Si seulement il pouvait trouver le chemin de fer.

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