Chapitre 2:

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Je suis Julie, j'ai 19 ans,et comme vous avez pu le comprendre, je vis de l'autre côté. Comme tous les gens ici, je suis ouvrière et pauvre. Le trafic routier et aérien étant interdits, ici on ne reçoit rien: aucune aide, aucune nourriture. On vit dans une société autosuffisante, enfin ça, c'est ce qui est écrit sur le papier. En réalité, on cultive quelques fruits et légumes mais ce n'est pas suffisant. Après la première révolte en 2049, ils ont mis feu à nos cultures. Depuis, ici, on est condamné à mort. Les gens errent dans les rues à la recherche de nourriture, les cadavres s'entassent, les morts dû à la famine se multiplient au même rythme que les naissances; des nouveaux nés qui, pour la plupart, ne passeront pas les 8 ans. Le côté gauche, quand tu y rentres, tu n'en ressort jamais en vie ou du moins, pas pour très longtemps.

Moi j'y suis née, j'ai vu mes parents et mon grand frère se faire arrêter. Quelques jours après, ils étaient à la télévision, je les ai vus se faire tuer comme des chiens. Derrière mon écran, derrière ce mur, je ne pouvais rien faire. J'étais impuissante face à cette tragédie qui allait marquer ma vie à tout jamais. Ils faisaient les gros titres des journaux qu'on trouvait dans tous les kiosques de la rive bourgeoise. On pouvait lire « toute la famille de rebelle tuée», « La famille à l'origine de la révolte enfin retrouvée », « Ils ont ce qu'ils méritaient », mais ils ont oublié un membre de cette famille... Moi. Et c'est moi qui vais leur rendre leur honneur. Ils ont été tués en direct à la télévision, un simple divertissement pour eux. Comme si ma famille ne méritait pas plus qu'un match de foot ou qu'une émission humoristique ridicule visant à faire rire ces monstres, à soulager leur conscience.

Après leur mort, on avait tous perdu espoir. La résistance était terminée. Tous les membres avaient peur, peur de finir comme eux. Ils n'avaient pas peur de la mort. Ici, on la côtoie tous les jours, comme les bourgeois côtoient le boulanger. Non, ce dont ils avaient peur, c'est d'être soumis à l'autorité des plus riches, d'être traités comme des moins que rien alors qu'ils sont dans leur cœur bien plus qu'eux.

Aujourd'hui, tel un phœnix, la résistance renaît de ses cendres. Plus motivés que jamais, on compte bien faire du bruit et déranger ces petits bobos de leur vie si tranquille. Ils savaient très bien qu'ils vivent au prix d'autres vies, ils savent très bien que derrière ce mur qui nous sépare, nous les pauvres comme ils nous appellent, on naît, on travaille et on crève aussi vite que la plupart n'ont pas eu le temps de respirer une seconde. La vie est un supplice pour nous, on est les sacrifiés du gouvernement, mais plus pour longtemps.

Je suis celle qu'ils ont oublié de tuer et je suis celle qui a réveillé l'esprit de la résistance dans la tête des oubliés de la société.

Les imperceptiblesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant