D'abord ce que je ressens c'est une vive douleur localisée au niveau de mon épaule. Comme si on dépose un tison chauffé au fer rouge sur la peau. Je me redresse et crache un juron. Cette douleur se fait plus vive, à la limite du supportable.
" Putain j'sui où... C'est quoi s' bordel.. "
Un frisson me secoue de tout part. Je suis assis sur quelque chose de froid, une chaise. Impossible d'en être totalement sûr car j'ai beau ouvrir les yeux je ne vois rien du tout. On me les a bandé avec un tissu épais et je ne peux pas l'enlever. Mes mains ainsi que mes chevilles sont ligotées. J'entends quelques bruits sourds, enfin je crois. De quoi être le digne scénario d'un film d'horreur. Je tente alors de mettre en fonctionnement ma mémoire. D'abord la soirée tranquille au bord du balcon puis une sensation de bien être lors de mon sommeil. Et par flash successifs je revois alors la scène des trois mecs de type armoire à glace qui envahissaient tout l'espace de ma chambre. Une incompréhension des plus totale s'empare de moi. Qu'est ce que je fais là ? Quelle est cette histoire de liste ? Pourquoi m'avoir attaché ? Comme pour répondre à mes muettes interrogations, je perçois un bruit de pas lourd imposant. Peut être l'un des trois hommes. J'ai mal à l'épaule. On me libére, d'abord la vue puis les mains. Mes pieds sont encore solidement liés à cette chaise en fer forgée. Je suis entouré de plusieurs autres gens, tous dans le même état que moi : sonnés, perdus et surtout immobilisés comme des prisonniers. Étaient ce alors ce que nous étions devenus ?
Je promène mon regard dans l'ensemble de la pièce pour en mesurer toute la nature de notre position. A première vue, nous sommes une dizaine tout au plus. Autant de mecs que de nanas. Il y en avait pour tous les goûts : des sophistiquées, des punky, des ressortissants du quartier et je mettrais ma main à coupée que la jeune femme du fond va dans la même faculté que moi. Peut être même dans ma promo car son visage me semble familier. Nous sommes réunis dans une vaste pièce aux teintes grisâtres, avec des néons luminescents suspendus au dessus de nos têtes. L'état général se fait désirer, on penserait qu'un morceau de plâtre se détacherait à tout moment du plafond pour nous tomber dessus. Cadre pas bien rassurant. J'ai beau gigoté, rien. J'ai beau tenté, toujours rien. Les liens qui me fixent les chevilles sont invincibles face à mes piètres tentatives, autour de moi personne n'obtient de meilleurs résultats. Soudain je les remarque, toujours ces trois hommes. Je me sens tout à fait réveillé maintenant, et commence sérieusement à m'agiter. Comme l'ensemble du groupe d'ailleurs. Certains se mettent à gémir, d'autres à se plaindre et même une de ces nanas au sang chaud prolifère une suite de jurons bien trempés à l'adresse de nos goeliers. C'est dans cet instant de panique culminant qu'ils se décident enfin à ouvrir leur bouche. Un membre du trio se met en avant par rapport à ses compères et nous lance un regard glacial. Effet immédiat, tout le monde se calme. Même moi étonnement je me sens comme obligée de l'écouter. Fourmillement dans les mains. Je hais ces liens. Décidément, le climat de ce lieu nous rends aussi dociles que des agneaux.
" Chers sujets, vous êtes désormais à notre merci. Je sais cela n'a rien de rassurant. Je suis l'agent Léonard, pour vous servir. Ou presque. Huhu "
Le trio se mit à ricaner bêtement. Je lève les yeux au ciel mais continue d'écouter la suite, curieux mais surtout inquiet quant à notre avenir.
" Vous faites partis de la Liste. Dernièrement des évènements météorologique boulversent notre monde et sa configuration. Les volcans se réveillent de plus en plus, les mers se rapprochent et voilà que le vent vient de disparaître. Pour pallier à cela le gouvernement a réfléchi à la mise en place d'un plan de dernier secours. Notre planète est de moins en moins sûre, et suite à nos calculs les catastrophes naturels vont secouer la terre de plus en plus. Jusqu'à son extinction, dans un bon nombre d'années encore mais il est temps de réagir. Après avoir étudié vos vies toutes ces années, vous êtes selon nos experts nos meilleurs espoirs pour le Projet Adam. Je vais brièvement vous expliquer ce dont il s'agit : nous allons oeuvrer dans la plus grande discrétion, vous allez habiter des quartiers cachés et poursuivre une vie paisible. Avec des obligations, comme faire des enfants et les éduquer, ainsi que des droits, vous pouvez obtenir toute la dernière technologie qui vous fait envie. Oui même la playstation à la mode messieurs. "
Un silence plane dans la pièce, sa boutade ne fait pas meilleur effet lorsqu'on est forcés d'écouter un discours aussi insolite. Néanmoins l'homme a l'attention de toute son assemblée, ce qui parait extraordinaire. Même la fille au sang chaud du fond semble stone, et boit toutes ses paroles. Comme hypnotisée.
" Vous serez aux petits soins. Vous êtes l'espoir de l'humanité, bravo ! Et maintenant, nous allons vous faire suivre une batterie d'examens de dernier minute avant l'embarquement, direction votre nouveau chez vous. Inutile d'essayer de joindre vos familles, pour eux un virus étrange vient de se répandre et vous en êtes les premières victimes. Sincères condoléances. Bien allons-y et dans le calme. "
Cette dernière phrase sonne comme un ordre. Je ne ressens pas le besoin de me révolter, ce qui me surprends en premier lieu. A l'instant où l'homme de type armoire à glace nous ordonne de le suivre, nos chevilles sont libérées. Je pensais redouter un chaos sans nom mais non, il ne se produisit rien de semblable. Chaque personne se met alors en rang, aussi sagement que possible. Mon esprit s'échauffe mais mes muscles refusent de m'obéir, au contraire mes jambes m'emmenent également dans les rangées. Nous formons un parfait carré, trois lignes de cinq personnes. Comme des soldats. Une fois placés, nous nous mettons en route.
Je suis à droite d'une jeune femme d'à peu près mon âge au look tiré par quatre épingles, chaussées sur de grands talons elle faisait peur à voir. En effet son visage était décoloré par une expression hagarde, tel un zombie en voie de décomposition. Mon voisin de droite était quant à lui un goth, à chacun de ses pas sa ceinture de chaîne cliquetait inlassablement sur un rythme régulier. Je ne parviens pas à comprendre pourquoi mon corps n'agit pas comme bon me semble, je suis comme emporté par une force extérieur. Cela me fait l'effet d'être devenu un vulgaire pantin de bois, bougeant au gré des envies d'un marionnetiste fou.
Nous longeons un grand couloir aussi gris que la première pièce, pour finalement pousser une double porte et se trouver devant deux escaliers. On nous sépare par sexe, puis pendant que les nanas aillent d'un côté nous les mecs allons de l'autre. C'est un peu angoissant. Mais hormis cette peur intérieur je ne ressens aucun frisson courir sur ma peau, sauf cette éternelle douleur lancinante à l'épaule. Même avec toute la volonté du monde je ne réussi pas à lever la main pour me masser cette partie endolorie. Mes jambes marchent mécaniquement, mes bras restent près de mon torse et mon visage ne sourit pas. C'estune étrange sensation que de ne plus être dans la capacité de se contrôler, je n'aime pas ça du tout. Nous étions sept jeunes hommes, et une fois en haut des marches nous passons une autre porte pour déboucher à l'air libre, le toit de l'immeuble.
" Bien, montez dans l'hélico maintenant. Mettez vos casques et sangles. A bientôt chers sujets. "
Je n'aime pas du tout cet air carnassier que notre interlocuteur arbore sur son visage massif. Néanmoins ma colère ne parvient pas à faire surface et je pense que mon regard noir est à peine aussi effrayant qu'un chiot sur le point de laper son eau. Machinalement, tel des robots bien huilés, nous montons à bord des fameux hélicoptères. Celui qui nous guide depuis notre " libération " s'en va, laissant place à l'un de ses sbires. Même tableau, une masse musclée prête à nous aboyer dessus. Bingo.
" Et maintenant on s'attache comme il faut les mecs ! Si y'en a un qui tente de faire le malin je le balance par dessus bord ! Allez allez ! "
C'est donc sagement que nous nous arnachons à l'appareil. Il y avait juste assez de place, comme si tout était prévu. Évidemment que tout est calculé d'ailleurs. Une fois les sangles fermement fixées, un vrombissement sonore gronde sous nos pieds et bientôt envahit nos oreilles. Le décollage me retourne l'estomac. Le vol ne dure pas très longtemps, car très vite nous arrivons à destination. Lors de l'atterrissage notre pilote nous souhaite la bienvenue en quelques mots effrayants...
" Voici votre avenir, votre foyer. Pour maintenant et à jamais.. "
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Le jour où le vent a disparu
General FictionLe jour où le vent a disparu, personne ne s'est rendu compte de rien. Josh Fint lui finit par réaliser cette étrange absence et cherche à savoir pourquoi. Bientôt le monde entier va comprendre qu'il s'agit là d'une chose désastreuse pour tous les êt...