chapitre 24- MOSES-

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Je détourne mon attention quelques secondes vers la pendule au-dessus de la porte du salon, et découvre que près de deux heures se sont écoulées sans que je ne bouge. Ce fauteuil m'a complètement englouti, figé devant cette avalanche de sentiments qui bouillonne dans ma tête. Normalement, ma priorité aurait dû être tournée vers toute cette merde qui rôde à l'extérieur, mais je me trouve captivé par sa silhouette étendue devant moi. Elle est là, et j'ai encore du mal à croire ce qu'il vient de nous arriver. Ses traits sont détendus et sa respiration est paisible. Elle dort profondément, et cela me soulage plus que je ne veux l'admettre.

Je rejoue en boucle le film de ces dernières heures, mais je ne parviens pas à démêler ce nœud béant. Elle avait raison. Elle a tenté de me mettre en garde, mais j'ai fermé les yeux. Ils ont des Askaliens de leur côté. Au fond de moi, cette alliance m'a toujours semblé contre nature, mais lire ce profond sentiment de rejet dans leurs regards m'a secoué. Maintenant que le choc de cette révélation s'est dissipé, je ne ressens plus qu'une colère brûlante envers ces hommes. Ils ont failli l'emmener, et le simple fait que je n'aurais rien pu faire me rend fou de rage.

La marque de ce grand blond était si puissante que le tressaillement est encore gravé dans mes os. Je n'ai rien montré à Bluenn, mais bordel, ça m'a fait un mal de chien. Aucun de nous n'avait jamais entendu parler de ce genre de pouvoir, encore moins qu'elle puisse neutraliser un Askalien comme moi. Cela souligne une seule chose : nous ne sommes pas prêts. Je ne sais pas comment neutraliser ce type, mais nous devons trouver une solution rapidement. Ces deux Askaliens étaient déterminés, et je peux déjà sentir qu'ils croiseront de nouveau notre chemin. Je n'ose pas penser à ce qui se serait passé si Blue n'avait pas su utiliser son don au bon moment.

Je n'ai pas posé de questions à ce sujet, mais il est évident qu'elle est liée à ces deux hommes. La question est jusqu'à quel point. Soudain, je remarque une fumée opaque glisser le long de mes doigts, toujours accrochés à l'accoudoir. Je ne l'avais même pas remarqué. Je les retire brusquement, découvrant les traces de mes doigts noircis sur le tissu. D'habitude, ma marque ne montre pas aussi clairement son agressivité, sauf en sa présence. C'est insupportable. Il ne manquerait plus que je fasse brûler cet endroit.

Je vais devoir avoir une conversation avec elle, mais je crains que mes sens ne soient mis à rude épreuve. Pour l'instant, je profite de cet instant de calme, savourant ce que je m'interdis habituellement.

Elle est étendue sur le flanc gauche du canapé, ses longs cheveux châtains dispersés autour d'elle, quelques mèches blondes éclairées par le soleil. Sa respiration s'accorde à la mienne, et je ressens une sorte de symbiose entre nous, bien que je peine à l'admettre devant elle. Seuls ses mots semblent résonner en moi. Elle m'a dit que nos marques étaient connectées. Je n'ai pas réagi sur le moment, trop préoccupé par son état. Mais après coup, j'ai réalisé qu'elle avait raison. Le jour où elle a quitté mon cercle de feu, ce n'était pas ma volonté. C'était la sienne. Elle a maîtrisé mes flammes. Même Tamara n'a jamais pu le faire. Je ne pensais pas qu'une telle connexion était possible entre Askaliens. Maintenant, je sais. Mon don l'a choisie, elle et personne d'autre. Je ne peux plus regarder une autre femme de la même manière, et cela me met en colère. Ma raison me dit que c'est futile, puisque nous ne sommes pas faits pour être ensemble, mais ma part askalienne semble plus déterminée que jamais.

Tout se bouscule dans ma tête, et la solution la plus simple a été de m'éloigner. Mais tout a changé. Ils savent où elle est, et je ne peux plus l'ignorer. Je refuse de lutter contre ce besoin de la protéger contre eux. Après tout, je lui ai fait cette promesse. La seule chose qu'Ida m'a demandée ce jour-là. Je suis peut-être un salaud, mais je reste un homme d'honneur.

Je continue à la regarder, et je remarque ses traits se figer. Elle commence à se débattre, murmurant des sons incohérents. Je ne sais pas comment réagir. Elle fait un cauchemar. Je la touche doucement pour la réveiller, mais dès que ma main effleure son bras, elle crie avec une telle force que je sens son désespoir m'envahir. Soudain, elle se redresse brusquement, ses yeux s'ouvrent d'un coup. Sa respiration est rapide, presque saccadée. Elle me regarde, mais son regard est vitreux, comme si elle ne me voyait pas vraiment. Je pose une main sur son épaule pour la rassurer.

ASKA-1  L' EssaimsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant