Chapitre V

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Comme convenu, Oria s'était levée à minuit et demi. Elle n'avait pas dormi plus d'une heure trente, mais étonnement ses paupières n'étaient pas lourdes, ni même embuées de fatigue. Elle troqua son short et son débardeur contre un tee shirt et un jeans déchiré sur les genoux. Elle coiffa rapidement ses cheveux dans une queue de cheval, puis quitta son bâtiment sans un bruit. Une fois dehors, elle eut une courte hésitation, elle était en train d'enfreindre les règles, et elle risquait gros si quelqu'un la surprenait ici à une heure pareille. Alors autant ne pas traîner. L'air était très frais, elle traversa la cours intérieur, regardant toujours devant elle. Toutes les lumières étaient éteintes, ce qui la conforta dans son choix. Elle pénétra dans le bâtiment administratif et referma la porte derrière elle. La pièce du hall l'impressionna. La lumière bleutée de la lune n'avait rien de rassurant. Elle se sentit si petite et faible face à l'immensité de cette salle. Elle décida de ne pas traîner une seconde de plus et emprunta le chemin de l'infirmerie. Elle avança plus doucement tâtonnante, voulant être sûre de ne rien renverser. Elle inspira un grand coup avant de pousser la porte. Personne dans le bureau. Le soulagement fut immense, et vu l'ordre et le sol luisant, les agents de ménage avaient terminé leur travail depuis un petit moment. Elle s'aventura alors dans le couloir menant aux chambres des malades. Eleven lui avait dis chambre quatre. Celle tout au fond. Toutes les portes étaient fermés, et l'on entendait les respirations calmes et endormis des patients. Elle avançaient doucement, le couloir étriqué et ne possédant aucune lumière éveillé en elle une légère angoisse. Devant la quatrième porte, elle se figea. Dans quel état allait-elle le trouver ? Allait-il être dans le coma ? Simplement endormi ? Arriverait-elle à le regarder ? À lui parler ? Elle eut envie de faire demi tour, mais elle ne voulait pas non plus l'abandonner après l'acte héroïque dont il avait fait preuve. Sans plus tarder elle poussa la porte et entra. Il faisait noir, elle distinguait simplement deux lits sur lesquels reposaient deux corps inanimés. Elle avança doucement vers l'un d'entre eux. Il s'agissait de Jugde. Elle se crispa en voyant son visage encore plus pâle que d'habitude, sa lèvre sectionné en deux, les strips sur son front, les points de suture sur sa gorge et les nombreuses tâches de sang encore présentes. Elle s'appuya quelques secondes sur la table de nuit et le quitta du regard. Elle ne pouvait regarder ça un instant de plus. Cela lui donnait des hauts le coeur. Elle s'approcha ensuite du corps du principal intéressé de sa venue. Il était moins blessé, mais les traces de sang étaient encore visibles sur son doux visage. Elle souleva la chaise du sol et s'installa auprès de Cryo. Elle attrapa sa main et doucement elle commença à lui murmurer :

"- Cryo... Je suis tellement désolée. C'est de ma faute tout ça. Si j'avais été prête tu ne serais pas là aujourd'hui. Merci pour ce que tu as fais. Je te dois sûrement la vie aujourd'hui... en tout cas, tu as été impressionnant. Tu es très fort. Même dans les livres, je n'avais jamais imaginé de tel chose. Tu peux être très fier de toi. Mais comme on avait aucune nouvelle, et j'avais peur de te trouver mort. C'est pour ça que je suis là.... et je suis ridicule.. tu ne dois même pas m'entendre ! Mais il fallait aussi que je te dise quelque chose. Je crois que j'ai fais une énorme bêtise. Ce matin, le professeur d'entraînement m'a demandé ce que j'avais pensé de la journée de samedi... Cryo je suis désolée..! Je ne sais pas ce qu'il m'a pris... mais je crois que j'ai fais un peu trop de bruit. J'ai dis un peu trop haut ce que sûrement beaucoup pensaient trop bas. Et... Zad.... il a comprit que je t'avais vu, que tu m'avais sauvé.. pardonne moi..! Mais il m'a juré de ne rien dire, il semblait vraiment sincère. Ce n'était pas ce que je voulais

Le corps de Cryo se contracta. Elle ne savait pas si il s'agissait d'une quelconque douleur, ou si son inconscient entendait ses aveux et manifestait sa colère. Elle se mordit la lèvre et lâcha immédiatement sa main. Elle se sentait tellement responsable de son état, et voilà qu'elle lui rajoutait encore une charge. Elle commença à se dire qu'il avait raison. Qu'elle aurait dû rester silencieuse. Le remord la rongea. Le corps face à elle semblait soudainement la haïr. Elle tenta de reculer, mais elle se trouva très rapidement bloquée par le dossier de sa chaise. Elle porta alors sa main à sa bouche et commença à ronger ses ongles. Il était désormais une heure du matin. Elle était plongée dans le silence qui se voulait de plus en plus menaçant et écrasant. Lorsque que son dos fut parcouru d'un frisson, elle décida de partir, elle se leva précipitamment de sa chaise et entreprit de la remettre à sa place. Mais un son provenant de derrière elle la glaça sur place. Elle ne bougeait plus d'un centimètre, elle repensa au parole de Cryo et à la sensation ressentie au bord de cet étang. Elle ferma ses yeux, et se concentra sur chaque son présent entre ses quatre murs. Elle trouva d'abord la respiration calme de Cryo, elle se laissa alors guider plus loin. Elle se stoppa elle-même de respirer afin de ne manquer aucun élément. Mais après quelques secondes, il lui sembla comprendre. Elle ouvrit grand les yeux et se retourna. Elle poussa un cris d'effroi face à ce qui tenait sous ses yeux. De manière incontrôlée, ses larmes envahirent ses yeux et dévalèrent ses joues de porcelaine sans s'arrêter, son souffle refusa de reprendre, elle se trouva l'instant de quelques secondes, paralysée. Quand elle retrouva l'usage de son corps, elle se précipita vers celui de Jugde. Ce dernier ne respirait plus, elle s'empressa de vérifier les battements de son cœur. Son effroi redoubla en réalisant qu'ils étaient presque arrêtés. Elle secoua le jeune homme au cheveux blanc dans l'espoir de le faire repartir. Mais sa tentative fut vaine. Oria s'effondra à genoux à  côté du corps livide. Elle retint un hurlement, enfonçant sa tête dans ses bras, et enfonçant ses ongles dans sa chaire gelée. Elle se trouva à pleurer toutes les larmes de son corps, le suppliant de revenir. Toute sa haine envers lui s'était envolé en un instant. Elle refusait de le voir mourir sous ses yeux, impuissante. Il lui devenait de plus en plus difficile d'avaler, cela devenait même une tâche impossible. Elle sentait son corps faiblir à vitesse grand V. Elle ne voulait pas croire, que si elle levait le regard, elle se serait nez à nez avec le cadavre de celui qu'elle avait observé se battre trois jours plus tôt, admirant sa puissance et son audace malgré son arrogance. Et alors qu'elle voulu s'enfuir en courant, loin de cette école de fou, elle sentit une sensation étrange s'échappait de ses mains. Apeurée, elle s'écarta brutalement du corps de Jugde, tombant totalement au sol, elle se recroquevilla sur elle-même, plus faible que jamais. Elle ferma les yeux et supplia que ce cauchemar s'arrête. Elle voulait se réveiller dans son lit et que rien ne se soit jamais produit. Elle ne respirait plus convenablement, son corps ne cessait de trembler contre son gré. Elle sentit la nausée montait en elle, et l'angoisse tétaniser ses muscles un à un.

When The Night's OverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant