Horizons

第2章

   À peine eut-il le temps de se rendre compte de la situation que Sky entendit du bruit provenir d'en bas.

- V'voyez! J'vous avais dit que j'avais entendu quelqu'un!

   Comprenant immédiatement que les veilleurs qu'il avait surpris plus tôt allaient bientôt lui tomber dessus, l'adolescent pesta entre ses dents avant de se mettre à courir, se fichant de tomber sur d'autres soldats en cours de route. Il se débrouillerait en temps et en heure, mais pour l'instant, mieux valait semer ceux dont il connaissait déjà le nombre et la position.
   Zigzaguant entre plusieurs couloirs pendant quelques minutes dans le but de semer ceux qui s'étaient lancés à sa poursuite, il entendit des crépitements retentir dans la villa avant qu'une voix aiguë et grinçante ne jaillisse d'un escargophone haut-parleur :

- Alerte! Intrus repéré au deuxième étage! Que tous les soldats disponibles se mettent à sa recherche et l'appréhendent! Je répète...

   Le garçon laissa échapper un « tch » agacé et se fit la réflexion qu'avec tout le boucan qui régnait désormais dans la demeure, il ne tarderait pas à découvrir un vice-amiral réveillé et furieux. Néanmoins, il n'avait pas le droit d'échouer. Si son destin — très probable — était de se faire capturer, alors il l'enverrait paître et récupérerait ce pour quoi il était venu.
   Sa cape flottant derrière lui alors qu'il courait, le voleur fronça les sourcils en voyant un vase qu'il semblait avoir aperçu plus tôt. Ralentissant un peu, il se rendit compte que, dans la précipitation, il n'avait pas fait attention à mémoriser le chemin et que, maintenant, il était perdu. Ne sachant pas où aller en se retrouvant confronter à un croisement, Sky n'eut pas l'opportunité de réfléchir longtemps à son dilemme quand un coup de feu résonna derrière lui et le frôla alors qu'il esquivait vers la droite.
   Tournant la tête, il aperçut deux gardes braquer leurs armes sur lui.

- Ne bouge plus! lui somma l'un d'eux.

   Sans même l'écouter, l'adolescent fonça tout droit, prenant le couloir de droite, et sprinta le plus vite possible. Virant à gauche au prochain croisement, il testa rapidement la poignée de la première porte qu'il repéra et, constatant qu'elle n'était pas verrouillée, entra précipitamment dans la pièce.
   Posant une main contre sa bouche pour ne pas que sa respiration lourde se fasse entendre, le garçon se recula lentement de la porte, appréhendant l'arrivée de ses poursuivants. Lorsqu'il les vit débouler dans le couloir et ralentir, il déglutit en voyant leurs ombres sous la porte passer juste devant cette dernière, l'un d'eux se demandant s'ils n'avaient pas pris le mauvais chemin. Le deuxième suggéra que l'intrus s'était peut-être caché dans une pièce et le cœur du voleur fit un bond quand celui qui avait parlé se tourna vers le morceau de bois qui les séparait.
   Or, avant que l'homme ne puisse tourner la poignée, son compagnon le questionna vivement sur ce qu'il s'apprêtait à faire. Le deuxième, paraissant se rendre compte de quelque chose, commenta en jurant qu'il n'avait pas fait gaffe. Quelques secondes plus tard, les deux soldats reprirent leur course, octroyant à Sky un répit qui manqua de le faire défaillir.
   Cette fois, il y avait échappé de peu. Il ne savait pas exactement ce qui avait empêché le soldat de continuer son geste, mais il se sentit reconnaissant envers la chose qui l'avait arrêté. Fermant les yeux en décollant sa main, il la posa sur le mur à sa droite et se mit à reculer jusqu'à sentir un coin. Sans faire de bruit, l'adolescent s'y assit et soupira un bon coup, conscient que s'échapper de là allait être corsé, surtout avec les sacs d'argent.
   Il prit quelques minutes à reprendre correctement son souffle et en profita pour habituer ses yeux à l'obscurité qui régnait dans la pièce. Lorsque ces derniers purent discerner certaines formes, le garçon observa ce qui l'entourait. Le mur en face de lui avait l'air de détenir la seule fenêtre de la chambre — s'il avait bien deviné que le gros meuble au milieu était un lit —, deux grands rideaux empêchant la lumière nocturne d'infiltrer l'endroit.
   Alors qu'il localisait une commode, le voleur entendit un grondement. Se crispant instantanément, il tendit l'oreille. Plus silencieux que jamais, le même son lui parvint à nouveau. Fronçant les sourcils, il se releva lentement, sans bruit, et s'approcha à pas de loup du meuble principal de la pièce.
   Subitement, Sky bondit en arrière et trébucha, entrant en collision avec ce qui avait l'air d'être une étagère. Quelques objets tombèrent et des sueurs froides recouvrirent le corps de l'adolescent, son cœur se remettant à battre follement. Ce qui l'avait effrayé, c'était la découverte que le grondement n'en était pas un : il s'agissait d'un ronflement. Et pas celui de n'importe qui... Accroché à ce qui donnait l'impression d'être un porte-manteau, un long vêtement blanc pendait. En gros caractères noirs, il y avait écrit dans son dos : « Vice-Amiral de la Marine ».
   Une trentaine de secondes passèrent pendant lesquelles le garçon ne cessait de se demander s'il avait commis l'erreur fatale en réagissant ainsi, mais, voyant que l'homme dans le lit n'avait même pas bronché, il se décrispa un peu. En même temps, s'il prenait le temps d'y réfléchir, il ne s'était toujours pas réveillé malgré le vacarme dans la villa. Ce vice-amiral avait le sommeil profond et le voleur n'allait certainement pas s'en plaindre.
   Soupirant légèrement, il se tourna pour voir ce qui était tombé et devina qu'il s'agissait de livres à leurs silhouettes. S'accroupissant pour les ramasser, un éclair de génie frappa Sky sans prévenir, le faisant se redresser si vivement qu'on aurait entendu ses os craquer. Pourquoi n'y avait-il pas pensé plus tôt? C'était évident!
   Faisant face à la petite bibliothèque, l'adolescent se mit à tirer tous les livres qui lui passaient par la main, espérant tomber sur un mécanisme caché. Or, une fois qu'il les eut tous essayés et après avoir remis ceux qu'il avait fait tomber en place, un sentiment de désespoir s'empara de lui. C'était impossible que ce ne soit pas là! Quel genre d'endroit serait plus sûr qu'un coffre secret caché dans la chambre même du vice-amiral?
   Examinant d'un regard désespéré l'étagère dans ses moindres recoins, les yeux du voleur restèrent accrochés à un petit pot décoré en porcelaine qui occupait un espace privilégié. Tentant le tout pour le tout, il tâta l'objet et nota rapidement qu'il était incapable de le bouger. Finalement, il sentit une vague d'euphorie pure lorsque le sommet du pot sculpté s'enfonça à son toucher. La pression de ce bouton enclencha une série de mécanismes et de rouages qui obligèrent Sky à reculer pour permettre à la bibliothèque de se décoller du mur.
   Un sourire soulagé aux lèvres, ce dernier retomba néanmoins assez vite lorsque l'adolescent se retrouva face à une porte blindée. Contre le chambranle était fixée une boîte numérique, le forçant à entrer un code à quatre chiffres pour ouvrir le barrage. Déjà fatigué en songeant au temps que cela allait prendre, le garçon tapa le code le plus évident en premier : 1234.
   Alors qu'il réfléchissait au prochain code à essayer, le verrou se retira et la porte coulissa vers la gauche, autorisant l'accès au voleur. Éberlué par la stupidité du vice-amiral, il ne prit que quelques secondes à s'en remettre et commença à courir à travers le couloir en béton. Tournant à droite au bout du corridor, Sky tomba à nouveau sur une porte blindée, protégée elle aussi d'un code.
   Suivant la logique, il tenta 5678 et le mécanisme de défense se désactiva, permettant à l'adolescent d'entrer dans la pièce.

- Il faut vraiment que ce type trouve autre chose, n'importe qui pourrait venir le voler...

   Secouant la tête devant l'idiotie — ou était-ce la naïveté? — du haut gradé, le garçon entra dans la pièce isolée et ses yeux s'illuminèrent aussitôt de joie. Partout, reposant dans des dizaines de tiroirs métalliques, des tas et des tas de liasses de billets et de pièces de berrys. Il y en avait définitivement trop pour être comptées en une journée. Ce qui se trouvait devant lui était le fruit de plusieurs années de récolte, pour sûr.
   S'empressant de se mettre à l'ouvrage, le voleur retira sa cape ainsi que la bandoulière formée de trois grands sacs de jute qui était accrochée à son buste. Nouant le vêtement qui dissimulait ses ailes autour de sa taille comme un haramaki, il se dépêcha de séparer les trois sacs qu'il avait attachés ensemble et se mit à les remplir un part un. Plusieurs tiroirs se vidaient, Sky volant billets comme monnaie.
   Bientôt, le cinquième des compartiments fut dérobé, l'adolescent s'arrangeant pour faire tenir un sac dans son dos avec la corde de sa cape et pour coincer les deux autres sous ses bras. Ainsi paré, le garçon ressortit du coffre-fort et se mit à courir vers la sortie.
   Alors qu'il allait quitter le couloir en béton, une grande ombre jaillit devant lui, le faisant immédiatement freiner.

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