Chapitre Deux - {Cauchemar & Souvenirs}

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Ça fait déjà seize ans. Je n'en avais que quatre à l'époque.
Mais je me souviens encore de notre rencontre, comme si c'etait hier. Ça me colle à la peau. Jamais je ne pourrais m'en débarrasser. J'ai fini par laisser tomber l'idée d'oublier ce sombre jour.
 
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Je descends du véhicule dans lequel je suis depuis plus d'une heure à présent puis regarde autour de moi.. Où suis-je ? Cet endroit, je ne le connais pas. Je me trouve dans une grande cour. Devant moi, quatre marches puis d'imposantes portes. Je peine à avancer, mes jambes tremblants fortement, mais un homme se trouvant derrière moi me pousse pour m'obliger à monter ces marches. À mes cotés, Xavier et Johan, mes frères tous deux âgés de trois ans. Ils sont jumeaux, ce qui explique que les gens aient parfois des difficultés à les différencier, mais ce n'est pas mon cas. Soudainement, je me met à chercher ma petite sœur du regard, ne la voyant pas à coté de moi. C'est l'un des trois hommes toujours derrière nous qui la tient dans ses bras. Elle s'est évanouie pendant le trajet jusqu'ici..? Oh, Anaëlle..
Les grandes portes s'ouvrent lentement, ce qui me sors automatiquement de mes pensées. Je regarde la personne venant d'ouvrir ces portes. Il s'agit d'une femme brune, ses yeux sont d'un bleu assez foncé, et elle est plutôt grande.. Enfin, c'est surtout moi qui suis petit, là, à mon avis. Bah ouais, parce qu'à peine un mètre à quatre ans et demi, c'est pas bien grand. Bref. Je fixe cette femme, qui nous regarde moi, ma sœur, et mes frères, avec un sourire poli mais qui parait surtout.. Désolé ? Son regard se pose aussi quelques secondes sur les hommes qui nous accompagnent, puis elle commence à se décaler pour nous laisser entrer. Je n'ai toujours pas spécialement envie d'entrer, mais comme j'y suis obligé, je le fais sans prononcer le moindre mot et en imposant aucune résistance. Autant rester silencieux, je vois mal ce que je pourrais dire dans une situation comme celle-ci de toute façon. Et puis..Déjà faudrait-il que je comprenne réellement la situation, aussi, parce que là c'est vrai que ça reste encore un peu flou pour moi.

- Bonjour.

La femme s'incline pour nous saluer, juste apres avoir prit la parole. Elle enchaîne ensuite avec un;

- Mon maître attendait votre arrivée.

Mon regard croise le sien. Je la fixe sans trop comprendre. "Maître" ? Comme...Un chien, et son maître ? Eh. C'est bien les chiens. J'aimerais bien en avoir un.. Enfin, là c'est pas la même chose, parce qu'elle, elle est humaine, du coup c'est pas logique que.. C'est bizarre d'appeler quelqu'un maître, non ? Et puis..Pourquoi elle a l'air si triste ?

Elle arrete de me fixer et tourne les talons en commençant à s'éloigner apres nous avoir demandé de la suivre. On commence alors à la suivre, toujours sans un mot, et je jette plusieurs regards en direction de mes frères. Ils avancent plutot lentement, et ça a l'air d'un peu agacer l'un des hommes qui nous ont amenés jusqu'ici. Cet homme se permet d'ailleurs de pousser Johan et Xavier pour qu'ils avancent plus rapidement. Evidemment, je ne peux que réagir, refusant qu'on touche à mes frères ou bien ma soeur de cette manière. Je vois mes frères se retourner vers l'homme comme pour dire quelque chose, mais je me place automatiquement devant eux deux, et je me met à fixer l'homme venant de les pousser. Clairement, vu ma taille et ma corpulence, cet homme est tres certainement capable de m'assomer en un seul coup. Pourtant, il se contente d'hausser un sourcil, puis de sourire..Un sourire purement moqueur. Il est en train de se moquer de moi ?! Non mais..

- Excusez moi, pouvez-vous éviter de vous arretez ? Comme je vous l'ai dis, mon maître vous attendait, alors inutile de le faire patienter encore plus, maintenant que vous etes içi. Je vous le redemande, s'il-vous-plait, suivez moi.

Je regarde en direction de mes frères, avant de me remettre à marcher, en restant près d'eux, bien que ce soit à contrecœur. En regardant autour de moi, ce que je vois me met un peu mal à l'aise. Tout a l'air tellement cher..
Je ne me sens clairement pas à ma place. Tout est tellement différent de notre maison. Notre maison...Est-ce qu'au moins, on poura la revoir un jour ? À coté de moi, j'entends Johan souffler le mot "maison" plusieurs fois à voix basse, en avançant lentement, tête basse. Lui aussi veut rentrer à la maison. Je commence à me sentir mal.
La femme devant nous s'arrête une fois face à deux grandes portes. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression d'avoir peur...Mais de quoi ?
 La brune se retourne un court instant pour nous regarder, avant de refaire face aux portes puis de les ouvrir doucement avant d'entrer à l'intérieur d'une grande salle. On se contente de la suivre sans dire le moindre mot, nous stoppant à coté d'elle.
Mon regard se met directement à observer la salle. Je ne saurais même dire de quel genre de salle il s'agit. Un salon, peut-être ? Je n'en sais vraiment rien.. C'est tellement grand. Je ressens encore ce même sentiment de malaise que celui que j'avais dans le couloir, juste avant. Mais alors que mon regard observe cet endroit, il s'arrête soudainement droit devant moi. Il y a d'autres personnes dans cette salle.
 
Assit sur ce qui semble être un fauteuil, un homme se trouve au milieu de la salle. Cet homme semble avoir une quarantaine d'années. À ses côtés est assise une femme semblant, quant à elle, avoir une trentaine d'années. Cette femme a un visage très doux, un petit sourire tendre peignant ses lèvres, et très élégante, que ce soit aussi bien au niveau de sa tenue qu'au niveau de sa posture.
L'homme, quant à lui, est...
Soudain, un frisson me parcourt l'échine. Mon regard vient à l'instant de croiser le sien. Je déglutie difficilement face à ce regard incroyablement froid et mauvais. Ce regard..Est tout aussi marquant que celui de ma mère. Pourtant, sans vraiment savoir pourquoi, je ne peux pas regarder ailleurs. Son regard dans le mien est tellement insistant, voire même oppressant. Qu'est-ce que je dois faire, exactement..?
Ce moment incroyablement étrange est finalement interrompu par la brune nous ayant conduit jusqu'ici.

- Je..Je m'excuse de vous avoir fait attendre, Maître.

Elle s'incline lentement, en gardant la tête baissée. "Maître"..Alors c'est lui ?
Dans un silence de mort, l'homme se lève de son fauteuil puis commence à s'approcher. Son regard nous détaille comme si nous n'étions que de simples objets. Cette pensée me fait me sentir encore plus mal, d'un coup. Soudain, son regard se met à fixer quelque chose derrière moi, avec un sourire que je ne saurais décrire. Intrigué, je me retourne pour voir ce qu'il regarde avec autant d'insistance. Les hommes nous ayant accompagnaient jusqu'içi ne sont plus là, et ma petite soeur est assise au sol, le dos contre le mur. Elle n'a toujours pas reprit connaissance... Mais alors.. C'est elle que cet homme regarde comme ça ?
Instinctivement, je me dirige vers Anaëlle et me place pile devant elle, regardant ensuite l'homme en fronçant les sourcils. Je ne sais pas pourquoi je réagit de cette manière..Mais cet homme me paraît tellement louche.

- Vo..Vous êtes qui ?!

Ma voix quelque peu hésitante résonne dans la pièce, alors que la brune aux cotés de mes frères me fixe d'un air à la foix surprit et paniqué. L'homme à qui je viens d'adresser la parole arque un sourcil avant qu'un sourire en coin de se dessine sur ses lèvres. Sans un mot, il commence à s'avancer vers moi.

Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur. Je n'ai pas peur.

Alors pourquoi mon corps tremble-t-il à ce point..?
L'homme se stoppe dans sa marche une fois en face de moi, se baissant un peu en venant planter son regard, qui me fait froid dans le dos, dans le mien.

- Qui je suis ? Je suis la personne qui vous a acheté, toi, tes frères, et ta soeur. Et dès aujourd'hui..Je suis votre maître.

Maître...?

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Le blandin venait de se réveiller en sursaut.

- Encore..? Putain.

Il pesta en se redressant avec lenteur, s'asseyant sur son lit.
Depuis qu'il avait échappé à cet enfer, l'homme enchaînait cauchemar sur cauchemar. Son passé refusait de le lacher.
Passant une main sur son visage puis venant se frotter les yeux, Gregory soupira.. Et dire que son réveil devait sonner d'içi une heure et demi.. Ça risquait d'être impossible pour lui de se rendormir à présent. Cependant, il resta un bon quart d'heure là, assit à ne rien faire, fixant le vide avant de se décider à quitter sa chambre pour partir prendre une bonne douche, histoire de penser à autre chose.

- Cette journée risque d'être longue...

Il n'avait pas tort.

"Sale Clébard"Où les histoires vivent. Découvrez maintenant