4. Mort éminente

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Nous sommes de nouveau sur ce même banc, comme les autres fois

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Nous sommes de nouveau sur ce même banc, comme les autres fois. Il semblerait qu'un rituel se soit installé entre nous. Elle vient à l'église quand elle ne peut plus supporter les injonctions de sa mère. Je me contente de l'écouter s'insurger, reprenant parfois ses mots un peu trop virulent.

Gabriela a besoin qu'on apaise son esprit si vif. Dans un certain sens, je peux la comprendre. Moi même ma mère n'est pas une femme facile à vivre. Ses opinions sont bien arrêtées, ses mots tranchants pour qui la décevrait mais elle est notre source de vie, celle qui nous a nourris de son sein, qui a souffert à notre naissance et nous lui devons le respect. Gabriela le sait, elle est rattrapée par sa jeunesse révoltée qui est sa force et son fardeau. Le temps apaisera sa nature belliqueuse, j'ai foi en elle. Je ne cesse de lui répéter et elle s'exclame qu'elle n'en ai pas sûr.

—Vous avez trop confiance en moi Isaac.

J'aime bien l'entendre m'appeler ainsi. Je ne suis que le garçon tout petit, peut être un peu penché son épaule comme une conscience, prêt à lui prodiguer des conseils bienveillants. Puis une fois fait, sans savoir si j'ai bien agis, je m'en retourne à ma vie calme au sein de l'église dans le recueillement. Le reste du temps, je sais parfaitement que Gabriela agit comme toute jeune femme en parcourant les rues, riant avec ses amis, profitant du peu que Cuervo a à offrir. Ce n'est pas une mauvaise fille, Gabriela vit avec son époque et rêve d'un ailleurs. Nous sommes différents et j'apprécie de communiquer avec des personnes dont la vie diffère de la mienne. Parfois cette vie faite de beaucoup de silence, de solitude devient pesante et je ressens le besoin de me mélanger aux autres, garder les pieds sur Terre et exister un peu. C'est chose faite avec Gabriela qui par sa présence amène une palette de couleur et des notes chantantes au milieu de l'austérité ecclésiastique.

A l'inverse d'elle qui rêve de voyages, d'autres villes, j'ai fait le choix de revenir auprès des miens, espérant pouvoir officier au cœur même de mon église. Je connais les faiblesses et les tentations nombreuses de cette ville qui pleure sur son sort, la pauvreté l'habite et pourtant les mauvaises séductions sont nombreuses.

—Vous avez quel âge Isaac, me demande Gabriela.

Je la laisse m'appeler par mon prénom encore une fois. Un écart par tout à fait protocolaire mais je sens qu'il crée un lien spécial, une sorte de confiance a pris entre nous et c'est là toute ma fonction.

—Vingt-cinq ans.

—Wouaaah et vous savez déjà ce que vous voulez faire de toute votre vie. Chapeau !

Je ris souvent de sa spontanéité comme chaque fois qu'elle vient me voir. Car c'est ce que j'espère au fond de moi, qu'elle ne vienne que pour le plaisir de ma compagnie. C'est d'un égoïsme condamnable. Je ne devrais pas mais je me laisse bercer par l'illusion.

—L'appel est venu tôt, j'en conviens. C'est une bénédiction.

Il s'est éveillé en moi comme la lumière de l'aube. D'abord faible, les rayons ont envahi ma vie. Je ne pouvais en détourner les yeux tellement leurs couleurs étaient belles. Je me suis senti happé et j'ai marché sans me retourner. Était-ce une erreur ? Je ne crois pas. Quand on a la chance de découvrir sa voie, il faut s'y plonger.

The Reckless Hounds III la tentation de Priest (SOUS CONTRAT D'EDITION)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant