Une musique est disponible dans chaque chapitre dans la barre média au dessus. :) Bonne lecture.
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Helin.
Je quitte Yseult à contrecœur et me dirige vers mes parents qui sont en pleine discussion avec un couple que je ne reconnais pas. Je souffle un grand coup en remontant le devant de mon jupon pour éviter de marcher dessus. Cette robe est certes magnifique, mais elle me gratte ! Ma mère porte une tenue similaire avec dans ses cheveux blonds, des branches et quelques perce-neiges entremêlés : elle est magnifique. Ses yeux s'allument lorsqu'elle me voit arriver et vient me rejoindre.
— Ma chérie, tu es sublime ! s'exclame-t-elle en déposant un baiser sur ma joue. Ton père commençait à s'impatienter, tu es en retard.
— Merci, maman, tu es superbe aussi. Je m'entraînais avec Yseult.
— Tu t'entraînais ? Pour quelles raisons ? demande-t-elle le regard perdu.
— Pour les épreuves de demain, pour ne pas finir comme Trophée ! Enfin maman, tu te doutes que je ne veux pas me marier !
Elle ouvre en grand ses yeux verts et me lâche les mains comme si je l'avais brûlée.
— Nous discuterons de ça avec ton père, il veut te parler plus tard. Pour le moment, fait honneur à la Caste et vient saluer ton cavalier.
Je serre les dents en la regardant partir vers mon père. Il y avait une époque où Anya Luftstrøm était une mère sincère, qui prenait ma défense. Ça, c'était avant de devenir l'ombre du grand chef de clan Erik alias mon géniteur. Il a gagné sa main il y a bien longtemps, lors de ces mêmes Jeux de Yuk. Elle a été forcée de l'épouser après avoir perdu à La Lutte...
Combien de fois lorsque j'étais enfant, on a envié ma place et combien de fois je l'ai détesté ! Je ne les compte plus. Je chasse l'air avec ma main et rejoins mes parents pour découvrir qui sera mon cavalier cette année. Le chef de la Caste des Alizés est habillé comme à son habitude, avec une tenue traditionnelle argentée. Piqués de fils d'argent et de perles scintillantes, ses longs cheveux blancs cascadent dans son dos et sur sa tête, repose une couronne de branchage blanc.
Il se retourne et je croise les yeux bleus de Sören qui me fixent avec intensité. Oh par les Dieux ! Je stoppe net en comprenant que c'est cet abruti que mon père m'a choisi comme compagnon pour la soirée.
— Ah, Helin, te voilà enfin ! Je perdais espoir, rigole mon père en passant une main dans mon dos. Tu es merveilleuse dans cette robe, j'ai très bon goût ! N'est-ce pas, Sören ?
— Effectivement, monsieur, elle lui va à ravir, souffle mon "cavalier" avec une voix mielleuse.
Ma mère glousse et avale une gorgée de sa coupe de champagne. Vas-y, saoul-toi, pour ne pas songer au fait que tu sois en train de vendre ta fille. Je décoche un sourire qui sonne faux au brun qui affiche une mine réjouie.
— Sören est fier de te porter à son bras ce soir ! Vous faites un couple formidable tous les deux, tu ne trouves pas ma chérie ? demande-t-il à ma mère qui sirote son verre.
— Magnifique, oui, oui !
Le père de Sören est rayonnant, il couve son fils du regard. Sa femme s'adresse à ma mère en levant les yeux au ciel :
— Mon fils ainé est toujours célibataire, vous savez ! Je désespère de lui trouver une épouse, mais Sören a toujours su faire preuve de discernement contrairement à lui.
Un frère ? C'est nouveau ça ? Bref, si c'est le même con que le petit frère, pas besoin de le connaître...
— Maman, laisse Adrian vivre sa vie ! Helin, tu veux danser ?
La voix de mon cavalier me tire de mes pensées en me proposant sa main et je plisse les yeux dans sa direction.
— Oh, mais ai j'ai le choix ? ironisé-je en m'emparant de sa paume.
Il me tire en direction de la piste de danse aménagée au milieu des tables, où un bon nombre de couples sont en train de discuter. Sur notre passage, je croise Yseult qui est sur le point de se jeter sur le cou de mon compagnon, mais Pat passe ses bras autour d'elle en chuchotant quelque chose dans son oreille.
Dans quoi me suis-je encore embarquée ? Une danse et je lui fais faux bond, rien de plus. Les musiciens entament une balade douce en nous apercevant et Sören me plaque contre lui en plaçant une main dans mon dos et l'autre dans la mienne. Nous commençons à nous mouvoir doucement et son odeur mentholée nous enveloppe. J'ai envie de vomir. Ses gestes sont doux et calculés, nos pieds glissent ensemble sous le regard des convives. D'autres danseurs viennent se joindre à nous et la neige s'invite à la fête.
— C'est vraiment romantique, tu ne trouves pas ? me glisse-t-il en plongeant son regard dans le mien.
Les flocons tourbillonnent autour de nous, suivant nos mouvements avant de se poser délicatement sur le sol.
— Pas vraiment, non. Enfin, pas avec toi.
Il rigole en me faisant tourner et je me retrouve dos à lui. Son souffle caresse mon cou et il prend une voix sensuelle :
— J'aimerais savoir ce que je t'ai fait pour que tu me détestes autant. Moi, je ne te déteste pas, tu sais.
— Tu es toi, voilà pourquoi.
Son rire résonne contre ma peau et je ferme les paupières pour lutter contre mon envie de le frapper. Je déteste mon corps qui réagit à son contact et frissonne en sentant sa bouche caresser mon épaule.
— Tu sais que je t'ai toujours trouvé magnifique et ce soir encore plus.
— Sören, je ne sais pas à quel jeu tu joues avec moi, mais ça ne me plait pas.
Un changement de rythme et il me remet face à lui. Il plonge son regard dans le mien en affichant un air sérieux. Puis sans crier gare, il me tire hors de la piste en direction des bois.
— Qu'est-ce que tu fais ? Sören ? Mais tu entends quand je te parle ?!
Il ne m'écoute pas et continue son chemin en slalomant entre les arbres. Sa main fermement enroulée autour de mon poignet. La neige craque sous nos pas et la nuit nous entoure. Brusquement, il me plaque contre un tronc et je croise ses prunelles bleues allumées de fureur et de... Désir ?
— Je ne joue pas. J'ai passé l'âge depuis un moment déjà.
Il pose sa paume sur ma joue et je la retire brutalement. Il laisse échapper un soupir agacé et passe ses doigts dans ses cheveux.
— Helin, tu ne comprends pas que c'est toi que je veux !
— Je ne suis pas un objet !
— Je vais gagner le tournoi et tu deviendras ma femme. Ton père me l'a promis !
Ma main s'envole pour s'écraser sur son visage dans un bruit assourdissant. Qu'est-ce que mon père a encore manigancé ?
Merde. Je n'ai pas le temps de réfléchir plus longtemps.
Sören semble enragé et sa mâchoire se serre. Il bloque mes poignets pour m'embrasser. Je mords sa lèvre en retour et le goût de son sang remplit ma bouche. Il grogne en détournant la tête.
— Jamais, je t'épouserais. Plutôt mourir ! craché-je en le fusillant du regard.
Une violente claque s'abat sur ma joue, me sonnant quelques instants. Une de ses mains s'aventure sous ma robe et l'autre emprisonne mon cou. Ses doigts glissent sur ma cuisse et agrippent ma fesse sans délicatesse. Il me dégoûte ! Ma chouette me griffe à l'intérieur et veut sortir pour s'envoler loin de lui. Je me débats de toutes mes forces et lui donne un coup de boule dans le nez. Mais il encaisse en serrant les dents, un sourire sadique planté sur son visage.
— C'est ce qui me plait chez toi, tu me résistes...
— Tu es un grand malade ! Lâche-moi ! crié-je en essayant de me dégager.
— Elle t'a demandé de la lâcher ! gronde une voix derrière le dos de Sören.
Deux mains agrippent les épaules de mon agresseur et l'envoient valser un peu plus loin.
Pat.
Il se tient droit, le regard noir puis fonce dessus et lui décoche une droite. Du sang jaillit et le hibou tombe à la renverse, contre un arbre. Yseult court dans ma direction et prend mon visage entre ses paumes. Totalement affolée et les yeux remplis de colère.
— Ça va ? Dis-moi que ce connard ne t'a rien fait ?
— Ça va, t'en fait pas.
Je la serre dans mes bras rapidement et observe Pat qui tourne autour de Sören comme un lion.
— Alors, ça fait quoi de se faire frapper par un écureuil ! On la ramène moins, espèce de connard ! hurle-t-il en lui envoyant son pied dans le ventre.
Notre ami est impressionnant à cet instant. Sören se relève en secouant son costume, et passe le dos de sa main sous son nez, pour essuyer le sang.
— Helin, comment peux- tu les laisser croire que tu n'étais pas consentante ?! Tu t'es jetée sur moi ! siffle-t-il en me fixant intensément.
Non, mais je rêve ! Je lui saute dessus et le pousse violemment. J'ai envie de lui exploser sa tête d'abruti, mais je me retiens, il serait trop content.
— Dégage ! Tu me fais pitié. Raconte ce dont tu as envie, je m'en fous ! craché-je en replaçant ma robe. Tu me dégoûtes, tu ne seras jamais mon mari ni mon ami.
— C'est ce qu'on verra, on se voit sur le terrain.
Il ponctue sa phrase avec un clin d'œil et passe une main dans ses cheveux avant de se tourner vers notre ami.
— Quant à toi, le rongeur, ça va te coûter cher.
Il s'éloigne en direction des tentes, fermant les boutons de sa veste.
— Tu ne vas pas le laisser s'en sortir comme ça ! s'indigne Yseult en venant se placer face à moi.
— Si, parce que dorénavant, je sais que tout est calculé. Si je fais le moindre faux pas, mon père me le fera payer.
Ses joues se teintent de rouge : elle est sur le point d'exploser.
— Elle a raison, il est plus sournois qu'un serpent ce type, intervient Pat qui pose sa main sur l'épaule d'Yseult.
— Merci à vous deux, déclaré-je en les prenant dans mes bras.
Nous restons comme ça quelques instants. Yseult ronchonne et me propose plusieurs fois d'aller casser la gueule de Sören et on finit par éclater de rire. Ce mec me donne la nausée, mais je ne ferais pas plaisir à mon père. Je ne veux pas lui donner la possibilité de resserrer son emprise sur moi. Ça, jamais. Je ne sais pas encore comment ni quand, mais je me vengerais de ce connard de hibou.
Nos oreilles sensibles nous indiquent que quelqu'un se rapproche de nous. Jenna, la grand-mère d'Yseult nous fixe, les bras croisés sur sa poitrine avec le sourcil levé.
— Je peux savoir ce que vous faites tous les trois au milieu des bois, alors que la soirée bat son plein ?
Mon père vient se placer à côté d'elle et affiche un air contrarié. Ça, ça craint un maximum. Je sens que la nuit va être longue...
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La Traque de Beltaine
ParanormaalAu-delà des brumes... Au fin fond du Canada... Caressé, embrassé, rongé, creusé par les intempéries, le Parc Naturel du Banff surgit des brouillards montagnards. Alors qu'Avalon a disparu, happé par la mer et entraînant dans sa submersion les antiqu...