1. Trop jeune.

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Un

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Un.

Deux.

Trois.

Trois secondes. Trois secondes s'écoulent avant qu'il ne deigne poser son cigare dans le cendrier jaunâtre. Il prend une inspiration avant de poser son regard sévère sur moi, et un long frisson me parcourt de haut en bas.

- Mademoiselle Inoue, il semblerait que respecter les consignes ne soient pas dans vos cordes.

Il est vrai que cette fois-là, j'ai été dans l'abus, je le conçois. Mais de là à me convoquer dans le bureau du major ? Je suppose que laisser un jeune homme se faire tabasser à mort dans une ruelle est quelque chose de tout à fait normal, donc ?

- Action, réaction, Monsieur. Je n'allais pas attendre sagement que la victime ne se...

- Les ordres sont les ordres. Vous n'êtes encore qu'assigner au grade de Gardien de la Paix. Avec les élèves et les stagiaires. Vos supérieurs vous donnent des ordres, vous vous devez de les exécuter en mettant votre avis et vos bons sentiments de côté.

- Bien Monsieur.

Ma réponse ne doit certainement pas lui plaire, mais il n'en dit rien. Il se lève de son siège avec une certaine vivacité, ses doigts parcourant les dossiers de couleurs bien distinctes, et d'épaisseurs différentes. Si ma surprise lui saute aux yeux, il ne fait aucune remarque dessus.

- Malgré votre impulsivité, vos résultats sont plus que satisfaisant. De ce fait, je ne peux vous laisser à ce poste plus longtemps. Je vais vous assigner la zone 7, à vous ainsi qu'à quelques uns de vos coéquipiers.

Zone sept.

La zone sept fait partie des plus garnies en matière de criminels. À chaque coin de rue. Je ne suis pas froussarde de nature, mais n'importe quelle personne saine d'esprit courberait l'échine face à cette idée complètement stupide et folle.

- Êtes vous bien sûr de ce que vous avancez ? Je veux dire, pardonnez moi mon impertinence, mais placer des recrues mineurs dans une zone pareille, c'est complètement inconscient !

- Nous en avons longuement réfléchi. Vous faites partie des meilleures recrues des ces cinq dernières années. Vos résultats sont excellents, et votre sens de l'analyse sont incroyables. Tout comme votre don pour diriger une équipe, peu importe de qui elle se compose. Vous n'avez rien à redire, et je vous invite à quitter mon bureau, à présent. 

L'envie de lâcher un mollard sur son costar tout neuf me prend tout à coup. Ses grands airs et son habitude de prendre tout le monde de haut en agaçaient plus d'un, et pas seulement les peu gradés. Heureusement, mes pas me portent déjà dans le couloir, le dossier dans les mains. Cet homme est complètement fou. Mes pieds me mènent déjà vers les bureaux communs et l'accueil, à l'entrée du bâtiment. Une chevelure rousse tirée en un chignon désordonné attire mon attention, et je me dirige immédiatement vers celle-ci. Elle a l'air dépassé, comme ma plupart des membres de ce poste présent ici.

- Fuyumi, tu peux me donner l'accès aux archives, s'il te plaît... je dis doucement en arrivant à sa hauteur.

- Les dossiers ont été déplacés dans un autre poste, je suis désolée Hana.

- Je peux m'y rendre dans la journée ?

- Oh, attends. Hum... Tu n'as pas les permissions pour. Enfin, je ne pense pas qu'ils te laissent y jeter un coup d'œil.

Mon expression doit être complètement désabusée, vu le sourire compatissant que la jeune femme me jette.

- Merci quand même. Il faut croire que je vais devoir me débrouiller seule...

- Ouh toi, tu te retrouves encore dans les problèmes... Vu ce que tu as fais la dernière fois...

- Je ne vois pas de quoi tu parles, Sweatheart.

Son rire parvient à mes oreilles, alors que je m'éloigne chercher mes fameux coéquipiers. Assigner cette zone aux plus jeunes et moins gradés, c'est du suicide. Je me faufile devant un bureau où quelques personnes sont en train de discuter, et je me penche en avant.

- Shun, Hisaé. Ramenez-vous.

Leurs airs incrédules me donnent envie de rire, mais seul un sourire moqueur s'immisce sur mes lèvres. Je me dirige vers l'extérieur en enfilant ma veste officielle ainsi que mon badge. Je les attends quelques secondes devant le bâtiment de police. Une mèche brune ondulée et courte effleure ma joue, lorsque la brise fraîche de ce début de journée traverse la rue.

- On part en patrouille ?

- La zone sept. je réponds simplement avant de me mettre à marcher.

- On ne prend pas mon scooter ? s'exclame Shun.

- Pourquoi faire ?  Il ne nous servira à rien dans les rues sombres.

- Merci à toi Hisaé, il sera peut-être moins stupide plus tard.

Elle ricane légèrement à ma remarque et m'emboite le pas. Le chemin est long pour arriver au début de la zone, et nous devons emprunter les grandes rues. Plus nous avançons sur les trottoirs, plus les immeubles grandissent, s'assombrissent. Je m'arrête finalement, peu rassurée de base.

- Tu as des renseignements au moins ?

- On ne me laisse pas accéder aux archives, apparemment. Donc j'ai juste les rapports des deux derniers mois et quelques lieux à aller surveiller.

- La mafia portuaire est plus présente que jamais, Inoue.

- Sans blague, je n'étais pas au courant, Shun.

- Où devons-nous aller ?

- Hisaé, prend la ruelle du marché. Shun, celle de l'hôtel. Moi je vais à...

- T'es complètement dérangée..

- Je sais, je réponds simplement avant d'avancer sans même les regarder. On se rejoint ici à la fin de notre patrouille et gardez un moyen de contact.

Pas besoin de me retourner pour savoir qu'ils acquiescent. J'accélère le pas en direction du centre, les sens en alerte. Je vérifie que mon arme est bien chargée, en regardant bien autour de moi. Les rues sont de plus en plus désertes, de plus en plus sombres. Les missions risquées, c'est le quotidien des forces de police dans cette ville. Et même si je n'ai que seize ans, je suis déjà plongée dans ce monde. Oui, à seize ans, on va à l'école. À seize ans, on sort avec ses amis, on va en boîte ou faire sur shopping. À seize ans, on croque la vie à pleine dents. Moi à cet âge là, je suis spécialisée en combat au corps à corps, et très bientôt plus gradée, déjà diplômée.
Un mouvement sur les pavés me font faire volte face, mais rien ne se trouve derrière moi. J'accélère à nouveau le pas, mais une silhouette passe devant moi pour me stopper. Je ferme les yeux l'espace d'un instant, mais lorsque mes paupières se soulèvent, personne ne se trouve en face de moi. Je secoue la tête, l'esprit déjà en ébullition. La patrouille vient a peine de commencer, que je me sens étouffée par les hauts bâtiments aux murs délavés. Passer du bureau à cet endroit dangereux en à peine une heure, c'est un nouveau record pour moi.

Une chose est sûre, je ne suis pas seule ici.

The Dark Side.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant