4. Témoin retrouvé.

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Un silence pesant règne dans la voiture depuis que nous sommes partis. Les renforts sont vite arrivés, mais malgré tout, nous avons du prendre un détour, jusqu'à tomber dans les embouteillages. Les deux officiers à l'avant ne font pas attention à nous, comme si rien ne s'était passé. Alors enfin, je risque un coup d'oeil vers le garçon à ma gauche. Son regard est perdu dans la ville qui défile lentement derrière la vitre. J'imagine qu'il laisse un écart volontaire entre nous, et je décide de ne pas le réduire, ni briser ce silence. Je m'abandonne donc à l'observation de sa silhouette. Je ne parviens à voir grand chose, mise à part ses cheveux ondulés, et sa corpulence fine pour sa taille. Il tourne soudain la tête dans ma direction, un sourire dépourvu de toute émotion figé sur ses lèvres. Nous nous regardons, nous jaugeons sans rien dire jusqu'à ce que la voiture tourne enfin. Après m'être raclé la gorge, je desserre le col de ma chemise en inspirant longuement, sans savoir comment agir. Je me détourne jusqu'à ce que nous arrivions enfin devant le commissariat, là où je me dépêche de descendre. Le conducteur ouvre la porte à l'inconnu en employant des mots assez crus, ce qui me fais réagir.

- Eh, cela suffit.

Ma voix est ferme malgré mon jeune âge, mais ce n'est pas normal de parler à quelqu'un de la sorte, encore moins après l'épreuve qu'il vient de passer. L'homme se détourne et j'en profite pour regarder le garçon avec attention, ce qui ne semble pas lui échapper. Une petite silhouette apparaît à l'entrée: chevelure teintée, maquillage coloré.

- Hana ! 

- Hisaé ?

- On s'inquiétait ! Il paraît qu'il y a eu un incident sur la grande  route et on pensait que...

- Tout va bien. Je n'ai pas tenté de me prendre une voiture en pleine tronche, si c'est ce que tu sous-entendais.

J'applique une petite pression dans le dos du blessé pour l'inciter à avancer vers le bâtiment, sans un regard vers ma coéquipière qui nous suit du regard. En un rien de temps, je redeviens professionnelle. J'entre dans l'infirmerie en demandant à l'infirmière de quitter le pièce avec gentillesse en vérifiant avant qu'il n'y ait personne d'autre à l'intérieur. Je laisse la porte entrouverte, n'ayant pas le droit de m'enfermer avec quelqu'un. J'allume l'ordinateur sur le petit bureau, connaissant le code par coeur, puis je me râcle une nouvelle fois la gorge avant de me retourner vers lui.

- Vous pouvez vous asseoir, s'il vous plaît.

Enfin, je suppose que c'est plus un ordre qu'une demande, mais en voyant qu'il ne réagit pas, j'attrape un tabouret et le pose à côté de lui. L'instant d'après, je pose mes mains sur ses épaules pour le forcer à s'installer dessus. Il ne résiste pas, me regardant avec attention. Je fronce les sourcils en allant chercher la trousse de soin, un tas de questions fusant de part et d'autre de mon esprit. Lorsque je reviens, un sourire quelque peu malicieux et vissé sur son visage pâle. 

- Posez vos questions, me dit-il soudain.

- Votre nom. Pouvez-vous me donner votre nom ?

- Pourquoi ça ?

- Cela fait deux fois que nous nous croisons. Et puis je m'occupe de vous, alors il me serait plus confortable de vous appeler par votre prénom, au lieu de "garçon fantôme" ou "le témoin en fuite".

- Garçon fantôme me semble plus approprié.

- S'il vous plaît.

- Dazai Osamu.

- Bien.

- D'autres questions, Mademoiselle Hana ?

Je tilte à l'entente de mon prénom, puis je lève les yeux dans sa direction. Il ne perd pas son sourire, analysant chacune de mes expressions. Je ne réponds pas tout de suite, sortant la boites de compresses ainsi que le désinfectant. Sa chemise est tâchée à certains endroits, laissant des traces poisseuses de sang. Je me redresse pour aller me laver les mains et remplir une petite bassine d'eau propre, avant de le regarder par dessus mon épaule.

The Dark Side.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant