OakDeath Club T2 - Georgie [TERMINÉE]

Chapitre n°7

Matthias allait finir par faire un malaise.

Se trouver en état de stress aussi prolongé ne devait pas être bon pour le corps. Et certainement pas pour l'esprit.

Georgie, assise à côté de lui, ne semblait pas en mener large non plus.

Matthias ne savait pas faire le dur, être celui qui prend toutes les décisions au bon moment ne faisait clairement pas partie de son tempérament. C'était Emily qui le faisait. Et vue le nombre de gestes parasites qui semblaient l'habiter, Georgie ne pourrait jamais lui arriver à la cheville.

Surtout pas en santiags.

- Tu sais, fit-elle sur le ton de la conversation, je me demande pourquoi est-ce que tu m'aides. C'est dingue, non ?

La voix de la jeune femme, presque guillerette, agaça Matthias. Pourtant, l'entendre parler et remplir le vide du véhicule atténua sa sensation de mal être.

- Je veux venger ma sœur, tout comme toi.

C'était tout ce qu'elle avait à savoir. Le reste, qui était là avant l'enlèvement de Charlotte, ne la regardait pas.

- Je sais bien, abruti, mais ça n'a aucun sens. Toute cette histoire n'a aucun sens. Si tu voulais venger ta sœur, tu l'aurais déjà fait depuis hier.

Il lui lança un regard en coin, les mains serrées sur le volant. Matthias n'avait plus l'habitude de conduire les gros véhicules blindés. Gaspard lui manquait pour ça.

- Et toi alors ? Répliqua-t-il. Si c'était aussi simple que tu le dis, pourquoi n'as-tu pas vengé ta propre sœur hier soir en arrivant chez moi ?

Georgie garda le silence quelques secondes, peut-être impressionnée ? Matthias en doutait, il lui en faudrait plus être bouche bée. Elle avait le sens de la répartie, aucun doute.

Matthias devait désormais apprendre à décoder ses silences.

- C'est vraiment noir ?

Matthias haussa un sourcil, décontenancé par un tel changement de conversation.

- Quoi ?

- Tes cheveux.

Matthias tourna la tête dans sa direction, le feu était rouge. Il la jaugea comme s'il attendait qu'elle explose de rire mais non, son visage était fermé, sans sourire, le regard bloqué sur le haut du crâne de Matthias. Curieuse sensation que de regarder quelqu'un fixant les cheveux. Uniquement les cheveux.

Instinctivement, Matthias reporta son attention sur la route, accélérant au feu vert et passa sa main sur son crâne. Il sentait le regard de Georgie toujours braqué sur lui.

- Oui, c'est noir. Ce n'est pas une couleur, si tu te poses la question.

- Tu ne ressembles pas à Charlotte.

Matthias inspira longuement. Georgie ne se reprit pas. Elle parlait de Charlotte, de celle qu'elle avait connue au OakDeath Club. Elle ne faisait pas référence à Emily. Il ne devait pas s'énerver pour si peu.

La journée serait interminable sinon.

- Je tiens de ma mère, répondit-il entre ses dents.

Elle avait raison, Charlotte avait les yeux verts et les cheveux bruns. Lui, les yeux bleus et la chevelure noire corbeau.

- Elle devait être belle, ta mère.

Encore une fois perdu, Matthias pivota pour la regarder, gêné. Pourquoi faisait-elle ça ? Pourquoi voulait-elle être gentille avec lui ? Il n'avait pas besoin de sa sympathie. Ils avaient un boulot commun, c'était tout.

Georgie était loin de le connaître. Très loin même.

- Si je n'ai encore rien fait, c'est parce que je ne sais rien, répondit-elle au bout d'une seconde à la précédente question, alors que toi, tu es dans l'Organisation depuis deux ans. Tu dois savoir qui a pu faire ça, que ce soit à Charlotte ou à Marilyn.

Sa voix était calme, claire. Tout l'opposé de son habitude. Le sujet était sérieux, bien évidemment, mais Matthias percevait ici un changement de comportement qui lui plaisait. Elle était sincère.

Matthias prit le temps de réfléchir, ils arrivaient bientôt au bureau d'Emily, la journée allait enfin commencer.

- Je t'ai déjà expliqué que je ne connais pas tous les rouages de l'Organisation. Je ne sais pas qui aurait pu faire ça.

Il mentait à moitié. Il savait qui aurait pu faire ça. Mais la courbe chronologique ne correspondait pas avec l'agression de sa sœur. Par contre, pour Marilyn, n'étant pas dans les locaux à ce moment-là... Matthias ne pouvait pas écarter cette piste.

- Et tu vas essayer de le découvrir au moins ?

Ca parmi d'autres choses, oui.

Il devait se protéger. Se rendre utile. S'il lui donnait l'information qu'il détenait actuellement, Georgie le balancerait aux chiens.

- Bien sûr, c'est pour ça que je suis là avec toi.

Matthias restait prudent, il ne voulait pas trop en dire. Ne pouvait pas trop en dire.

Il se gara rapidement devant l'immeuble terne de l'Organisation. Enfin, le siège pensant de l'Organisation. Le reste des actions ne se faisaient pas là mais à l'arrière d'un sex-shop un peu plus loin dans Portland.

- Je ne comprends toujours pas pourquoi tu m'aides, souffla-t-elle sans se détacher, je maintiens que ce que tu fais n'a aucun sens. Pourquoi m'aider à détruire ta vie ? Car tu sais très bien que quand j'en aurai fini avec l'Organisation, il ne restera plus rien.

Matthias fixa ses mains, accrochées au volant pour ne pas trembler. Il savait tout ça. Il savait que ce qu'il vivait depuis deux ans avait une date de fin. Il était prêt. Préparé. C'était le plan, c'était son plan.

Pas celui de Georgie.

Le sien.