Chapitre 13 : Le négociateur (époque : 2021)

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Sans regarder le nouvel arrivant à l'allure d'alcoolique nerveux, le commissaire maintient la conversation avec son collègue.

- Bon alors, qu'est-ce qu'il fout l'autre con de mentaliste ?

- Vous devez parler de moi, l'interrompt Jonathan Stevens.

- Ah, c'est vous l'espèce de psy négociateur ? Légèrement bousculé, Joe Garidon n'en reste pas moins abrupt.

- C'est à peu près ça. Le sujet ?

Les mains du collègue ne se distinguent plus des feuilles et photographies qu'il tient. Il se tourne vers J. Stevens qui enfile ses lunettes, la main tremblante.

- Tenez, le dossier. Il est fait sur le tas, du mieux possible. Je suppose que vous connaissez la majorité des faits. Pour aujourd'hui, dimanche 28 août 2021, à l'adresse visée ici-même...

Le stagiaire cherche les informations parmi ses multiples dossiers, pendant que l'officier Juan DeSalva les rejoint discrètement.

- Voilà, ici, ça commence là : Homme blanc de trente et un an dénommé Jack Sallow, « J.S. » dans la suite du document comme sur les corps des victimes, aussi surnommé par la presse « le couturier ». Nous supposons qu'il est ventriloque, puisque ses messages et crimes évoquent constamment une marionnette qui le pousse à agresser... Heu, une marionnette qu'il appelle... « Bill-Andy », ici, voyez. J'avais noté quelque part le vrai nom donné...

- William Andrews, Bill étant le diminutif de William, précise Jonathan Stevens.

- Comment savez-vous que... demande l'adjoint, avant d'être violemment interrompu par son commissaire.

- Ce n'est pas important ! Poursuivez, qu'on en arrive à l'essentiel !

- Oui, bien... Il a envoyé un message au Times écrit à l'encre rouge, titré « Depuis l'Enfer », avec le rein d'une de ses victimes, une femme âgée disparue, explique-t-il d'une voix prise de panique. Il nous a donné rendez-vous ici pour une prise d'otages... une mère de famille et ses deux enfants dans le bâtiment. Je n'ai pas le casier judiciaire avant la série de crime touchant notre ville, mais je peux aller chercher cela si vous en avez besoin immédiatement.

Le commissaire Joe Garidon s'agace de la lenteur des informations données et leur manque de pertinence. L'agent qui décrit le délinquant est jeune, il a des petites lunettes positionnées de travers, et visiblement perdu au milieu de ses copies.

- Un homme du même nom fut arrêté il y a deux ans pour trafic de faux et falsification d'identité, qui deux mois après fut soupçonné d'homicide volontaire, ajoute donc Joe Garidon. Mais aucune information supplémentaire ne nous est accessible. Non-lieu pour le premier et pas suffisamment de preuves pour le second. Cet homme semble disparaître et réapparaître subitement.

- Etrange, une telle personnalité ne s'intègre pas socialement. Comment se fait-il qu'il y ait de telles périodes d'accalmie ? s'interroge à haute voix Jonathan Stevens, qui connaît les antécédents de Jack Sallow.

- Dans divers messages laissés, accompagnés du « Jess », il prétendait que Bill-Andy, sa marionnette, le menaçait de tuer les membres de sa famille. Poursuit le jeune adjoint.

- Un aliéné forcené je vous dis, il a bien choisi son jour ! l'interrompt, de nouveau, Joe Garidon. Enfin, au moins on a un nom bien réel pour ce « couturier ». Et cette marionnette ? Cette histoire est ridicule.

Le commissaire regarde les alentours d'un air grave, persuadé que tous le regardent et s'intéressent à ce qu'il dit. Il pousse un beuglement. Il ne voit chez le suspect qu'un malade mental qu'il vaut mieux guérir à la manière de la jungle. Cela se comprend, mais tellement simpliste aux yeux du psycho-criminologue. La raison est bien ce qui juge avec tant d'ardeurs après tout.

Dr J. Stevens FACE au NEANT [WATTYS21, 2 Watt'Cheers... -Edité-] (Partie 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant