Chapitre 14 : Le miroir (époque : 2021)

334 73 29
                                    

Devant l'immeuble, neuf policiers se tiennent en cercle. Il interroge celui qui lui semble être le plus expérimenté :

- Une clope contre une information ? propose-t-il, regroupant ainsi toute l'amabilité dont il est capable. Ne répondant pas, il insiste : Vous êtes ici depuis combien de temps environ ?

L'agent d'intervention ne le regarde pas et ne lui répond pas plus. C'est le chargé de transmission qui prend la parole.

- Ça doit faire une demi-heure.

- Vous avez déjà tenté d'intervenir ?

L'homme qui n'avait pas pris soin de répondre aux deux arrivants coupe la parole de son équipier, sans toutefois regarder en direction de J. Stevens.

- Nous sommes montés une fois, mais nous nous sommes arrêtés aux escaliers du premier étage.

- Pourquoi cela ?

Le responsable d'intervention se tait. Il fixe ses collègues, prend une cigarette dans le paquet tendu par Jonathan Stevens, puis indique à son chargé de communication :

- Dis-lui toi, c'est bon.

- Il nous a entendu monter. Du coup, il a exécuté un otage... il y avait le corps d'une gamine d'une dizaine d'années répandu dans les escaliers. Un morceau par marche, ça s'étendait sur l'ensemble du premier étage.

- Ce taré est armé. Dans le crâne de la fillette, il y a un trou fait par une balle de magnum 357, comme le vôtre, argumente-t-il auprès du psychologue cadavérique qui lui fait face. Ce connard a une arme de flic sur lui. Un cinglé de plus sur terre.

- Du coup, on a stoppé l'intervention. Le commissaire attend un négociateur. On se demande bien ce qu'il fout. Vu le taré dans le bâtiment on devrait appeler le SWAT...

- On ne se le demande pas ! coupe le responsable. Les psy-machin, ils n'en ont rien à foutre de tout ça ! Dès leurs études, on leur apprend à ne rien glander. Ils ne sont pas habitués au terrain, voilà tout. Il a pris peur.

- Pas psy-machin, psycho-criminologue, ce n'est pas la même chose. Il n'y a pas de diplômes pour psy-machin, coupe-t-il, en écrasant sa cigarette et buvant d'un trait son café. C'est moi le négociateur, Dr Stevens.

Sa remarque efface brusquement l'air moqueur qu'entretenait le responsable d'intervention.

- Oh... Je ne savais pas qu'on nous envoyait le Docteur Stevens, le célébrissime mentaliste de l'affaire du poseur de bombes. Cela change évidemment tout ! rétorque-t-il d'un ton sarcastique peu venu, tentant de reprendre le dessus de la conversation. La famille s'en sortira, la gamine va recoller les parties de son cerveau et galoper, et nous les gars nous allons résoudre tous nos conflits infantiles.

- Alors, dîtes moi avant que je ne me fasse dessus, puisque vous savez mieux que moi : que faut-il faire, quel est votre plan ? objecte J. Stevens sans sourire ni frémir. Après tout, vous avez l'expérience du terrain et cela vous a si bien réussi, que faut-il envisager ?

Tous autour, les agents d'intervention, le chargé de communication, l'officier, remarquent l'hébétement et la surprise du responsable d'intervention, qui se tourne vers le psychologue pour la première fois. Il le regarde d'égal à égal, jetant la fin de sa cigarette sur la vitre de la porte d'entrée.

- D'après moi, énonce-t-il, il faudrait prendre une escale de cinq à six gars. Laisser le commissaire en bas jacasser avec le taré en diversion, monter et le surprendre. Nous sommes formés pour ce type d'opération.

Dr J. Stevens FACE au NEANT [WATTYS21, 2 Watt'Cheers... -Edité-] (Partie 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant