Chronique d'une vie alienique

Chapitre 8 : Quand est-ce qu'on arrive ?

La plupart des passagers semblent s'être remis de l'accident, la panique ayant la place à l'excitation. Beaucoup discutent en petits groupes avec entrain de ce qui nous attend sur Terre.

Personnellement, j'aimerai bien trouver un trou paumé où personne ne viendra nous déranger.

Ces endroits ont beaucoup de charme, je trouve.

Enfin, si on y arrive en un seul morceau on pourra toujours s'estimer heureux.

Une sonnerie retentit, il est temps de monter à bord...

Nous nous engageons sur une passerelle et rentrons dans le vaisseau.

Il est rond, les passagers sont sur les bords, près des hublots, les bagages sont disposés autour de la cabine.

Leonardo et Carmélita se battent pour le siège côté fenêtre et nous finissons par trouver des places en carré pour contenter ces deux diablotins.

Ingrats, en plus, ils ne nous disent même pas merci !

Nous décollons enfin, un petit bébé se fait dessus, effrayé par la secousse et Carmélita tombe de son siège.

Un départ en fanfare quoi.

Ma femme se plonge aussitôt dans la lecture de son magazine et mes enfants prétextent un besoin pressant pour s'éclipser, sûrement pour fomenter un autre des plans machiavéliques dont ils ont le secret.

Je devrai sans doute m'en inquiéter mais ma BDA me fait de l'œil depuis tout à l'heure.

Je vous raconterai bien les aventures de Nono le dino mais votre patience a déjà souffert de celles de Iggy alors je me tairai !

Pendant que Victoria me demande mon avis sur "un lait de corps à base de coco qui réhydrate les peaux sèches", - ce à quoi je réponds qu'un lait est fait pour être bu - nos deux enfants reviennent, un sourire diabolique plaqué sur leurs visages.

Quelle bonne blague- euh pardon grosse bêtise - sont-ils en train de nous concocter ?

Ils s'assoient et échangent en regard de connivence.

Carmélita se met à examiner son robot chien-chat-phacochère et Leonardo sort son kit de chimie sans lire la notice. Il jette simplement un œil à papier avec marqué dessus "Attention, ne pas mélanger ces différents ingrédients sous peine d'effets secondaires spécifiques à chaque individu"

Il a bien raison, il ne faudrait pas causer d'accident ! Les gens ont déjà été assez impactés par un certain tapis rouge...

La voix de l'hôtesse surgit alors des hauts-parleurs, informant les passagers de de l'existence du coin restaurant.

Non. Pas bonne idée. Pas du...

-J'ai faim ! Hurlent en même temps Leonardo et Carmélita.

Et merde.

Des passagers doivent nous prêter main-forte pour empêcher les enfants de se ruer dans la nourriture en défonçant la porte au passage.

Victoria en profite pour sortir un véritable festin de son sac. Nos enfants se calment instantanément et nous remercions, gênés, les aliens qui nous ont aidés. ( et qui ont sauvé leur propre vie en même temps car ces deux petits monstres auraient été capables de détruire le vaisseau en fonçant dans tous les sens)

Carmélita commence alors à tester les capacités de son robot : il peut se déplacer à 105km/h et peux monter jusqu'à 3 mètres au-dessus du sol.

Pour vous cela peut être extraordinaire mais pour nous c'est juste banal, tout le monde a des engins de ce genre.

En toute modestie bien sûr.

Leonardo, lui, enfile des lunettes censées le protéger des produits dangereux contenus dans le kit.

Victoria continue à me poser des questions sur les astuces beauté présentes dans son magazine.

Toutes les personnes présentes demandent sans cesse à l'hôtesse de l'espace : "Quand est-ce qu'on arrive ?"

La pauvre, je ne sais pas si elle survivra jusqu'à ce qu'on arrive sur Terre. Sa tête doit faire la taille d'Italina.

Mon fils se redresse alors, l'air satisfait de lui. Il échange un regard de connivence avec sa sœur.

Cette fois j'en suis sûre, ils fomentent quelque chose !

Victoria en est sûrement arrivée à la même conclusion car elle baisse lentement son journal pour me regarder dans les yeux ( bon en même temps on peut pas se regarder avec les pieds me direz-vous )

Nos enfants se lèvent alors, soit disant à cause du retour du besoin pressant. Je vois Carmélita emporter son robot et la potion de Leonardo a disparu.

Il n'y a pas une seconde à perdre. Nous bondissons hors de nos sièges en mode ninja. Aucune trace de nos enfants.

Me vient alors l'idée qu'ils ont sont bien allés aux toilettes mais pas pour la raison qu'ils nous ont donnée, à savoir le fameux besoin pressant.

Nous nous y rendons donc et, même à travers la porte, nous les entendons discuter.

J'avais donc raison. Je ne sais même pas pourquoi je suis surpris.

Le verrou cliquete alors doucement et nous nous écartons de la porte sans un bruit.

Tout à leurs occupations, ils ne nous remarquent pas et nous nous mettons en position afin de bondir et de leur barrer la route.

Sauf que, bien sûr, rien ne se passe comme prévu. En voulant attraper Carmélita, je me prends les jambes dans...mes jambes et m'étale de tout mon long en fauchage ma femme au passage.

Nos enfants en profitent pour s'enfuir en courant et nous nous relevons précipitamment pour les suivre.

Ils ne perdent pas de temps : le robot que Carmélita commande soulève la potion de Leonardo pour en renverser un peu sur la tête de tous les aliens présents.

Malgré nos efforts, ils sont plus rapides et nous passons devant une vieille alienne couverte de boutons bleus, un bébé avec des oreilles de panda, un jeune couple relié par des filaments de...bave ? Et même un garçon dont la moustache descend jusqu'à terre.
Ah, c'est mon patron. Heureusement que je ne travaille plus pour lui car vu son regard noir j'aurai pas fait long feu !

C'est un véritable désastre.

Tout le monde crie, court, saute, danse, bref, le grand n'importe quoi.

Et les petits monstres qui me servent d'enfants continuent leurs bêtises.

Nous les rattrapons enfin et, à notre grand soulagement ils ne nous posent pas trop de difficultés.

Triomphants, nous nous redressons...et voyons la totalité du vaisseau nous fusiller du regard avant qu'ils ne se ruent sur nous.