7 - Le projet

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Clarke a l'air si heureuse de le voir quand il arrive qu'il pense honnêtement qu'elle va lui sauter dans les bras et le serrer contre elle devant tout le monde, enfants, professeurs et parents confondus.

Pour être honnête, il lui rendrait son étreinte. Au diable les conventions sociales.

Ce n'est pas seulement elle qui est contente de le voir, c'est mardi, Charlotte, et Ethan, et tous les enfants qui ont passé l'année à passer de sa classe à celle de Clarke.

"M. Blake ! s'exclame Madi, un large sourire aux lèvres et une lueur dans les yeux. "Mlle Griffin savait que vous viendriez !

Ils l'attrapent par la main et le conduisent dans le gymnase. Clarke et son petit rire le suivent jusque là-bas.

Mais ensuite, les sons autour de lui s'estompent lorsque ses yeux se posent sur les peintures accrochées un peu partout et qui forment un labyrinthe de couleurs et de paysages que les gens peuvent suivre pour découvrir tout ce sur quoi les enfants ont travaillé pendant l'année. Et il y a tellement de lui là-bas. Lui et Clarke. Ensemble. Peints dans leurs vêtements historiques et représentés des dizaines et des dizaines de fois par leurs étudiants communs dans différentes poses et scènes.

Ici, Pierre et Marie Curie travaillent sur leurs expériences. Là, Hélène et Paris se regardent dans les yeux. Achille pleure sur le corps de Patrocle. Marc-Antoine est agenouillé devant Cléopâtre, et Bellamy doit l'admettre : certains de ces étudiants sont particulièrement talentueux. Il ne sait pas si c'est parce qu'ils ont peint des couples, ou si la lueur dans les yeux de Bellamy le montre autant, mais quelques-uns d'entre eux ont même réussi à capturer l'amour qui bouillonne dans son cœur et son âme, chaque fois qu'il regarde Clarke.

Cela lui prend quelques minutes, mais il surmonte le choc, sourit aux enfants et les félicite pour leur bon travail. Il est absolument stupéfait qu'ils se soient tellement inspirés de ses costumes, qu'une chose aussi niaise et stupide que le pari de Murphy puisse créer quelque chose d'aussi beau que cela.

Finalement, leurs étudiants se déplacent vers d'autres endroits et d'autres personnes, et Bellamy et Clarke sont laissés seuls, errant sans but dans le labyrinthe de leurs représentations épiques. Parfois, il demande quelque chose, et Clarke répond, mais surtout, il garde le silence. Il garde le silence parce que ces peintures parlent d'elles-mêmes, n'est-ce pas ? Clarke ne peut pas être aussi aveugle, pas quand son amour pour elle brille dans chaque œil marron qui croise les siens.

Et même si elle ne le voit pas. Même si elle se dit que c'est juste parce qu'ils se sont déguisés en couples d'amoureux, il doit lui parler désormais, n'est-ce pas ? Il s'est ridiculisé assez longtemps et il réalise que cela doit s'arrêter maintenant. L'année scolaire se termine. Sans copie à noter, sans projet à organiser, sans besoin de se retrouver pour tempêter sur les parents de leurs élèves et le système éducatif, il craint de manquer d'excuses pour continuer à voir Clarke tout l'été. Il veut voir Clarke tout l'été parce que... Eh bien, parce qu'il veut voir Clarke tout l'été.

Et il ne veut pas juste la voir. Il veut lui proposer un rendez-vous convenable, tenir sa main dans la sienne, l'envelopper dans ses bras et l'embrasser, et –

"Bellamy ? Quelque chose ne va pas ?"

La voix de Clarke le sort de sa rêverie. Ses yeux bleus sont doux sur les siens et un petit froncement de sourcils marque son inquiétude. Bellamy regarde autour de lui. Personne en vue, c'est le moment. Son moment.

"Clarke", commence-t-il, et son froncement de sourcils s'accentue lorsque sa voix se brise sous le stress. "J'ai quelque chose à te dire... je..."

Il est interrompu. Bien sûr, il est interrompu. Un son puissant et perçant résonne dans la pièce et la voix de Diyoza résonne dans les haut-parleurs, demandant à tout le monde de la rejoindre pour son discours annuel. Un discours dans lequel Clarke est impliquée, comme elle le lui a dit il y a quelques semaines. Alors elle s'excuse, mais ses yeux brillent mystérieusement et la main sur son avant-bras est douce et chaude quand elle dit : "On parlera plus tard, d'accord ?"

Il pourrait presque penser qu'elle aussi a quelque chose à lui dire.

***

La journée touche à sa fin et ils n'ont pas du tout eu le temps de se parler. C'est en partie de sa faute. Bellamy ne l'évite pas, pour ainsi dire, mais il a passé beaucoup de temps avec ses élèves après le discours de Clarke et à écouter ce qui les inspire. Créer de l'art sur la personne qu'ils admirent, qui fait ressortir le plus d'émotions en eux, qu'ils aiment... C'était un projet ambitieux et qui semble avoir inspiré les étudiants.

Il marche entre eux et leurs parents et écoute pendant qu'ils parlent d'un oncle enrôlé dans l'armée, ou d'une grande sœur qui se bat pour Black Lives Matter, ou d'une mère qui gère trois emplois différents pour s'occuper de ses enfants et il est honnêtement ému. Il y a aussi des superhéros et des personnages historiques, et des personnages de fiction, et la façon dont il peut s'y reconnaître de tout cœur est évidente, si la façon dont il s'est accroché à l'Iliade et à l'Odyssée pendant toute son enfance a un sens.

Le projet de Madi est le dernier sur le mur. Elle est fière et heureuse de lui montrer sa peinture. Elle lui répète ce que Clarke a dit dans son discours avec ses propres mots. Elle parle de muse et d'amour, d'inspiration et d'émotions, et Bellamy pourrait presque oublier qu'elle n'a que douze ans.

Il passe beaucoup de temps à observer son art, même après son départ. Il observe les détails de la guerrière féroce qu'elle a dessinée, ses longs cheveux noirs tressés dans son dos, la peinture noire maculée autour de ses yeux verts, la détermination et la concentration écrites sur tout son visage. Quand quelqu'un s'éclaircit la gorge derrière lui, il est surpris, mais se détend immédiatement lorsque Clarke vient se tenir à côté de lui.

Il hoche la tête vers le tableau.

"Madi est très talentueuse."

"Elle est. Je ne peux qu'espérer qu'elle suivra sa passion. Je ne suis pas inquiète, cependant, ses parents semblent assez ouverts."

"Même s'ils ne l'étaient pas, voir ce tableau leur aura sûrement fait changer d'avis."

Clarke soupire à ses côtés et l'amertume qu'il sent venir d'elle lui fait ôter son regard de l'art de Madi pour rencontrer le sien.

"Parfois, même cela ne suffit pas."

Et ça : toutes les choses que Clarke garde cachées, ses secrets, ses parties sombres, ses regrets, sa tristesse... Il veut tous les connaître et passer sa vie à essayer de les apaiser. Il veut être la personne à qui elle donne tout son cœur, la personne qui restera à ses côtés, qui sera là pour elle.

"En fait, la guerrière de Madi me fait beaucoup penser à ta sœur", dit-elle, interrompant ses pensées.

"Ma sœur ?"

Il est choqué. Le fait qu'il ait une sœur n'est pas un secret, mais ils n'ont jamais vraiment parlé d'Octavia et aussi, Clarke ne l'a jamais rencontrée.

"Oui... n'est-ce pas elle sur la photo que tu gardes sur ton bureau ?"

"C'est vrai, mais..."

"Et d'après ce que tu m'as raconté, c'est une jeune femme féroce et résolue, et une battante. Je pense qu'elle ferait un bon modèle si tout ce que tu m'as dit est vrai.

Il peut le voir, maintenant qu'elle l'a évoqué. Les cheveux, les yeux, l'expression, même la tresse. Il y a beaucoup d'Octavia dans la peinture de Madi.

"Qu'en est-il de ton modèle ?" demande-t-elle quand il reste silencieux. "Que peindrais-tu pour ce projet ? Quelqu'un qui t'inspire, qui fait ressortir le meilleur de toi, que tu admires et aimes ?

Toi, Bellamy veut répondre parce qu'il est bien trop fleur bleue pour son bien.

"Je ne sais pas", dit-il finalement.

"Probablement l'un de tes dieux romains", suggère-t-elle en riant doucement.

"Probablement oui. Et toi ?"

Clarke lui sourit doucement et pencha la tête comme si la réponse était évidente, comme s'il allait la deviner juste en la regardant.

"Pourquoi est-ce que je ne te montrerais pas ?" dit-elle à la place.

Il hoche la tête et la laisse prendre sa main pour le conduire hors de la pièce.

La nouvelle prof d'art sexyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant