VII - Got me hoping you'll save me right now

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                    Je me sentais épuisée. L'énergie que j'avais canalisé pour fuir m'avait vidé de toutes motivations. J'étais submergée par un flot de tristesse, qui paralyse le corps et l'esprit. Je pris mon visage dans mes mains. Les perles d'eau salé reprirent leurs chutes interminables dans mes paumes qui devenaient trop petites pour les contenir et s'évanouissaient sur mes genoux. Les larmes sarcastiques accablaient d'auréoles la laine de ma robe. J'hoquetais de trop d'avoir chialé, la respiration bruyante prise dans des spasmes erratiques, secouaient mes entrailles. Dans le gaz de la fatigue et de l'abattement, Je ne savais plus quoi faire, incapable de construire une pensée cohérente. Ma conscience blanche de toute réflexion. Je restais prostrée dans ce marasme. « Est-ce que je deviens folle ? » Je me battais contre cette marotte. J'étais certaine du contraire, je pressentais que quelque chose clochée. « Peut-être que le manque de sommeil et l'excès d'alcool ont raison de moi ? » Cette explication était la plus logique mais j'en étais insatisfaite. Pourtant elle avait la faculté de m'aider, car je craignais de prendre la raison. Je me sentais tel une noiraude*. Je me tairais dans ma voiture, apeurée. Mon état était proche d'un état de choc, dans l'incapacité de me ressaisir. Ma raison tourbillonnait en boucle sur ces quelques idées.

Mon téléphone sonna. La musique perça mes tympans et me sortit abruptement de mon instable fascination. Mes yeux brouillaient de larmes, je décrochai, sans prendre le temps de lire le nom de mon interlocuteur. En pilotage automatique, je m'interrogeai, tout de même, sur la personne qui pouvait me téléphoner à cette heure tardive. Je pensai à ma sœur. Nous avions pour habitude de confirmer de que nous étions rentrées saine et sauve. « Saine et sauve », cette expression m'arracha un sourire ironique sur mon visage blafard. Mon corps était certes sain mais mon mental ? Pour l'instant j'étais sauve, mais pour combien de temps ? Ma petite, elle devait se demander si tout allait bien. Je ne lui avais pas envoyé mon usuel message. Persuadée que c'était mon sang qui m'appelait, je me rassemblai pour donner la meilleure représentation que je pouvais. Je ne voulais pas l'inquiéter. Malheureusement ma voix était faible trahissant tout ce que j'aurais voulu cacher.

— Allô...

— Qui est ce ?

Je pouffai d'un rire nerveux. A l'évidence ce n'était pas elle. Je répondis dédaigneusement.

— Vous appelez les gens sans les connaître !

— Sash ???

Ce timbre ! Je réalisai qu'il était là, à l'autre bout du fil. Je me remis à pleurer. C'étaient des pleurs de soulagement. Je me savais en sécurité rien qu'à l'écouter me parler.

— Sasha, qu'est-ce qu'il se passe ?

La douleur brulait ma glotte contenant les lamentations qui nouait ma gorge. Il m'était pénible de parler.

— Où es-tu ? Je prends mes affaires et j'arrive ! J'entendais le bruit de ses pas et de ses clés à travers ses paroles.

Il était déjà sur le chemin pour venir me chercher, pour venir me sauver. Mon prince. Je lui indiquai tant bien que mal où j'étais. Dans le flot de mes émotions, j'en avais perdu le sens de l'orientation.

— Je suis à côté de la vieille ville près des rues piétonnes devant la petite église...

— Je vois où tu es, ne bouge pas je viens te chercher !

En demi-conscience, je bâtissais une image mentale où m'abriter. Je l'imaginais sur la route le menant à moi, fondant dans la nuit sombre. Mon chevalier montait son étalon. Ils étaient au galop, la crinière de son destrier volant majestueusement dans leur course. L'épée en main, il portait une armure scintillante, même dans cette nuit noire. Il était fort et majestueux. Il allait me défendre courageusement du méchant monstre qui se cachait dans l'obscurité. Pourfendre la bête perfide qui me menaçait. Mon prince allait bientôt être auprès de moi. Je m'accrochais fermement, à cette image pour ne plus verser ces sanglots. Il avait ce pouvoir de me rassurer, simplement par une représentation. Son portrait étincelant repoussait dans les abîmes, le macabre cavalier qui attendait dissimuler dans un profond recoin prêt à me trancher la tête, à la première occasion.

On frappa à ma vitre. Je sursautai. J'avais été subitement était extraite de mon rêve. Dans la surprise, mon cœur rata quelques battements. Cette brève réaction primaire m'avait été désagréable. La pression du sang frappant mon thorax, affluant depuis mon centre vers mes extrémités, me préparant encore à réagir. Je levai mes yeux rouges. Je regardai hagarde l'immense silhouette présente face à moi. Je ne réagissais pas. J'étais ébahie par ma vision. Le sauveur était arrivé. Il me fit signe d'ouvrir la portière. Ce que je fis péniblement, manquant clairement de vitalité. Il la tira en grand, il put s'agenouiller devant moi. Ses yeux profonds me fixaient. Je pouvais y voir toute l'inquiétude que j'y avais mise. J'y voyais aussi le soulagement de m'avoir trouvé. J'étais heureuse d'avoir cet homme en face de moi. Cet homme pour qui j'éveillais cet intérêt. Je sentais les larmes montaient à nouveau. Je réfugiai mon visage sur son épaule cherchant à cacher le désastre que je devais être. J'étais soulagée de pouvoir m'appuyer sur lui. IL m'étreignit avec force. La chaleur vigoureuse qu'irradiait de son corps me calma doucement. Il ne disait rien, me consolant, allégeant mes tourments.

Ses silences, dans notre relation passée, était une source de tristesse et d'incompréhension, ses mêmes silences m'étaient salutaires à présent. Une fois calmait, il me redressa légèrement pour me regarder. Je gardais la tête basse. J'étais honteuse de l'image que j'offrais à sa vue. D'une de ses grandes mains, il prit mon menton dans ses doigts. Il leva mon visage pour faire face au sien. Je regardais lâchement vers le sol pour échapper à ses yeux. Il comprenait l'émotion qui me tenaillait.

— Regardes moi, s'il te plaît ! j'obtempérai à son ordre.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? insista-t-il.

— J'ai eu l'impression d'être..., je ravalai un sanglot.

— D'être suivie... je soufflais en fortes respirations.

— Et... lorsque ... reniflant

—J'ai voulu démarrer la voiture... Ça m'a signalé des soucis de pression des pneus...

"Je suis ridicule !" J'essuyais mon nez avec la manche de mon pull comme une gosse.

— J'avais peur... De sortir... Et... et... je suis restée ici !!!

Mon diaphragme était incontrôlable. Il faisait mille rebonds dans mes côtes rendant ma respiration disparate.

— Ça va allait, je suis là.

Il me reprit dans ses bras pour m'apaiser.

— Je vais regarder tes pneus et toi tu restes assise ici, d'accord ?

J'acquiesça. Mon corps ne cesser pas de cahoter, pris par les convulsions jaillissant de mon ventre. Il fit rapidement le tour de l'engin et revint vers moi.

— Effectivement, deux de tes pneus sont à plats. Tu ne peux pas conduire comme ça ! On va appeler un garage car même avec le kit on ne peut s'occuper que d'un seul.

Il tenta d'appeler plusieurs numéros. Nous étions en pleine nuit, d'un week-end de pont. Il était difficile de joindre quoi ou qui que ce soit. D'ici quelques heures en ce dimanche matin, cette espace accueillerait un marché. Si mon véhicule y restait stationné, il finirait à la fourrière. Après maints appels et surtout grâce à sa persévérance, il finit par obtenir quelqu'un en ligne, une personne qui était disposée à nous dépanner.

Je l'observai pendant tout ce temps. J'étais fascinée par l'homme devant moi. Je me souvenais sa version juvénile qui avait fait partie de ma vie un temps. Physiquement, il n'avait rien à envier à celui du passé. Son corps était toujours aussi athlétique. Son visage s'était un peu creusé après la perte des joues infantiles, pleines et rondes, ce qui lui avait fait gagner en masculinité et puissance. A présent, son aplomb rayonnait, alors que dans mon souvenir il pouvait être fébrile en recherche d'une confiance intérieure, qualité qui ne semble plus le manquant aujourd'hui. Il avait grandi sans moi. Mon âme se fendit en deux. Le temps avait passé et je l'avais passé loin de lui.

Il avait raccroché. Il me demanda de m'installer dans sa voiture. Je m'assis obéissante et grelottante. Me voyant ainsi, il sortit de son coffre un plaid et de l'eau. Il posa la couverture sur mes jambes et il me dévissa la petite bouteille avant de me la tendre. Mes yeux ne pouvait se décrocher de lui.

— Bois un peu, ça va te faire du bien.

— Merci. Dis-je en la prenant.

— Le véhicule de dépannage arrive d'ici une demi-heure.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 17, 2021 ⏰

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