- ENTRÉE -
[Narrateur]
À l'heure du dîner, ce soir chez les Beaufond,
La lune irriguait la fête d'un bon vin blanc;
Des effluves jazzées, Coltrane à l'arrière-plan,
Les langues si légères, loin des discours de fond.L'événement portait la marque de Sophie,
La cousine d'Emma, de quatre ans son aînée,
À poste prestigieux, ses efforts l'ont menée,
Mais, aussi ses pistons: «Trinquons!» son père fit.Les souvenirs fusaient, flottaient en crescendo;
Douces réminiscences lissées par les cuillères.
C'est à ce moment-là, qu'Emma, avocassière,
Pris de court les témoins, et se les mis à dos.[Emma]
J'ai quelqu'un dans ma vie, un homme exceptionnel.
Il est à mon écoute et me rend très heureuse.
Moi qui ne me serais jamais vue amoureuse,
Dans ses charmants yeux verts, j'effleure l'éternel.[Narrateur]
Silence dans la pièce, jusqu'à présent si vive,
La neige à la fenêtre, moins pâle que convives.- PLAT DE RÉSISTANCE -
[Anna - mère d'Emma]
Les yeux comment, tu as dit ? J'ai dû mal t'entendre...[Emma]
Verts ! Et de tous hommes, lui seul peut me comprendre ![Anna - mère d'Emma]
...[Les autres convives]
...[Narrateur]
Emma eut le déclic, la peau toute rougeaude,
Lorsqu'elle vit enfin quel était le problème,
Ses proches, semble-t-il, n'acceptaient pas qu'elle aime,
Ce regard de couleur, cet humain émeraude.[Anna - mère d'Emma]
Tu es devenue folle ? As-tu même pensé,
À ce que vont se dire les gens de cette union ?
On n'est pas zyeutistes, mais songe à l'opinion,
Tu dois la prendre en compte, en personne sensée.[Jean-Christophe - père d'Emma]
Ta mère a bien raison! Écoute-la, Emma!
Les yeux verts sont sympa, il y en a au boulot,
J'aime les côtoyer, ces bougres rigolos,
Mais pas dans ma lignée. Cesse ce cinéma![Sophie - cousine d'Emma]
C'est fou comment chez toi, l'innocence perdure.
Que t'arrive-t-il donc ? Sois un peu réaliste.
Les verts on les essaye, puis on coche la liste;
Jamais on ne prévoit de relation qui dure.[Gina - tante d'Emma]
Et ta sécurité aussi, prends-la en compte!
Souvent, ils m'indisposent avec leurs yeux grotesques;
Je me sens en forêt, dans un recoin burlesque,
Quand je les vois en groupe et que l'angoisse monte.[Emma]
Vous me voyez muette, perdue, dérangée.
Inimaginable, moi qui vous pensait justes.
Vous croyez aux histoires inventant le danger,
Dans leurs yeux dits étranges. Que d'idées vétustes![Didier - oncle d'Emma]
Ne tournons pas en rond, il faut être concret;
Badge dorée au coeur, je les vois de très près.
On sait qu'ils ne sont pas dangereux, dans l'ensemble,
Que la richesse, hélas, devant leur porte tremble!Mais, il faut bien admettre qu'ils sont responsables,
De leur situation, ce sont les grands coupables.
Ce sont des fainéants: Leur culture est hostile,
À toute production, à tous métiers utiles.Je ne suis pas zyeutiste, seulement pragmatique,
Tout citoyen se doit de faire ici sa part.
La culture émeraude se veut ovipare:
Elle pond des nigauds, des sportifs, des comiques![Emma]
Pitié ! Aidez-moi ! Pourquoi donc suis-je membre ?
D'un groupement pareil: famille d'imposteurs,
Qui devant la haine et la bêtise cambrent,
Le dos: esprits étroits, obtus fabulateurs![Gina - tante d'Emma]
Oh ! L'insolence ! Corrige tes paroles!
Ton oncle est équitable! Loin d'être un menteur,
Il a fait un grand don à #GreenEyesMatter,
En guise de support. Didier a le bon rôle![Emma]
C'est spécifiquement le noeud de ce débat,
Les naïfs citoyens qui se croient innocents.
Vous votez pour la gauche, oubliez le combat,
Puis agissez à droite, hypocrisie au sang.Les yeux couleur olive ont-ils moins de valeur ?
Voient-ils vraiment moins loin que nos regards marrons ?
De l'eau à la vapeur, à la même chaleur,
Leurs larmes irriguent-elles un cycle un peu moins rond ?Tu parles de paresse et je ne sais que dire,
Lorsqu'un vert ingénieur enchaîne les emplois,
Sauf celui qui est sien, et qu'il ne peut construire,
Un futur pour son fils qui devient hors-la-loi.À cause d'un système enrhumé, punitif,
D'un ascenseur social fracturé et chétif,
D'où sortent des faciès, rangés, si conformistes,
Qui écoutent du jazz en insultant l'artiste.Force de raccourcis, on a perdu la route,
Intellectuels bien-sûr, de salon je redoute.
Voyez ce que je vois, empruntez mes oreilles:
Placés dans leurs chaussures, on ferait tous pareils.- DESSERT -
[Narrateur]
La neige avait sommeil et tombait lourdement,
Au lit de la nuit blanche qu'Emma affrontait,
Seule dans sa chambre quand tout doucement,
Sa soeur ouvrit la porte puis longea l'étaie.[Simone - soeur d'Emma]
Emma, tu m'impressionnes. Tu as bien parlé!
Je suis, évidemment, en accord avec toi,
Ton discours de ce soir était auréolé,
De sagesse et courage qui laissent pantois.[Emma]
C'est gracieux de ta part d'être venue me voir,
Un appui est toujours, apprécié ici-bas,
Peux-tu imaginer un jour heureux savoir,
Tes enfants choyés mais, leur souhaiter célibat ?Pourtant, je me questionne. Éclaire-moi ma soeur.
Tu n'as pas dit un mot de cette discussion,
Puis tu viens opiner, tapie dans la noirceur:
Crois-tu faire partie de la solution ?
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Au-delà des pétales.
ПоэзияJe suis très heureux de vous partager cette collection de poèmes, qui, je l'espère, fera danser vos esprits ! Vous y trouverez réflexions sur thèmes variés, sensations, mes joies, mes peines, le tout arrosé de jeux de mots et de sonorités colorées. ...