Chapitre 5 Mauvaise surprise

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Je fus réveillée par un rayon de soleil réchauffant ma peau. Je me levai, comateuse et me préparai comme d'habitude sans penser à rien. Charles et Grégoire étaient dans le salon, occupés à fouiller dans le frigo dans le but de nous le piller encore une fois.

— Salut Danie ! ça va ? lança Grégoire.

Je passai à côté de lui sans lui répondre et pris ce qui me passait sous la main avant de me diriger vers la cave.

— Tu vas où ? Il a déjà mang...intervint Charles.

Je n'écoutais pas le reste de sa phrase et descendis les escaliers. L'allemand était endormi. J'avais raison, nous avions des points en commun tous les deux. Nous étions tous les deux des prisonniers.

Je posai le verre et une orange à côté de lui en contemplant son visage toujours taché de sang noircis. Ses yeux avaient un peu dégonflé. Je regardai sa ceinture et son cluster vidé de son arme. C'était fini. Je n'avais plus peur de lui. Je me moquais de tout.

Ma gorge se noua. Je levai la tête afin de chasser mes larmes puis pivotai sur moi-même.

— Danielle, m'interpella-t-il avant que je ne me sauve.

Je me retournai, la main sur la rambarde, le pied sur une marche. Je contemplai ses prunelles bleues durant de longues de secondes, sans peur, sans réaction. Le temps semblait s'être figé. Plus rien n'avait d'importance. Il redressa la tête et inspira en baissant les yeux comme s'il ressentait une certaine mélancolie, ou compassion à mon égard.

— Je suis désolé, reprit-il.

Je fronçai les sourcils.

— De quoi ?

— Je vous ai entendu crier hier soir, et votre visage en dit long sur ce que vous ressentez.

Ma gorge se contracta. Ma tête fit face mur pour qu'il ne voie pas mon visage. Je plissai les paupières en m'humectant les lèvres pendant qu'une larme s'échappait de mes yeux.

— Vous me faites penser à ma femme avant notre mariage, ajouta-t-il après un silence.

J'inspirai et me tournai vers lui.

— Quoi ?

— Elle était comme vous. Elle suivait à la lettre ce que ses parents lui disaient, elle était prête à se faire rabaisser, emprisonner juste parce qu'elle pensait que c'était normal. Elle était douce comme vous, et manipulable autant que vous l'êtes.

— Elle devait vous plaire alors, ainsi vous avez pu la dompter comme bon vous semblait ! rétorquai-je, renfrognée.

Il esquissa un sourire puis baissa la tête.

— Je sais que vous ne m'aimez pas beaucoup, et je n'ai pas l'intention de me faire bien voir auprès de vous. Mais avec l'expérience de la vie j'ai appris une chose, les vrais ennemis ne sont pas forcément ceux qu'on croit.

Je baissai les yeux puis inspirai une bouffée d'air.

— Comment vous vous appelez ?

Un rictus se forma dans le creux de ses lèvres.

— Vous vous êtes décidé à savoir mon nom finalement ?

Mon regard stoïque resta planté sur lui.

— Werner, reprit-il après quelques secondes.

Je hochai la tête et partis en refermant la porte. Werner. Je mettais enfin un nom sur l'homme avec lequel j'avais tissé un lien malgré moi.

Je restai fixé sur Grégoire qui lisait le journal en fumant une cigarette dans le fauteuil. Je devais admettre qu'il avait raison. Entre cet allemand et Patrick, qui était le pire finalement ? J'avais sans doute peur de le quitter, de partir loin sans mes repères, quitter ma zone de confort. Mais quel prix étais-je en train de payer pour obtenir ce confort-là ?

La rose ne fleurit qu'en hiverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant