Chapitre 009 (pj : Yamorie)

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Je reporte mon regard sur l'horizon. Il n'a vraiment pas vu la même chose que moi. Alors c'était bien un abnobiote ? Mais j'ai senti la braise et la chaleur. Alors ça aussi c'est peut-être imperceptible par les autres. Remarquant que le sol n'est plus jonché de ces petites particules incandescentes, je me lève pour aller discrètement observer mais ne vois plus la moindre trace. Disparues ? Aucune idée, en tout cas, je me suis tellement avancée que je suis maintenant au bord de la falaise. La lune brille intensément, baignant la scène d'une lueur blanchâtre. Dreiko me rejoint à cet instant.

-Je crois que je ne me lasserais jamais de cette vue. Je pourrais passer toutes mes nuits ici si j'avais pas besoin de dormir. dit-il dans un léger rire.

-C'est apaisant, le silence, la solitude. dis-je le regard attiré par la mer de petites lumières devant moi.

-Je ne suis plus vraiment de cet avis, et pour cause, mes futures nuits d'insomnies, j'aimerais beaucoup, et bien ... dit-il en se passant un main dans les cheveux. J'aimerais les passer avec toi. ajoute-t-il en me regardant.

-Et je me ferais un plaisir de t'y accompagner. dis-je, souriante, en me tournant à mon tour vers lui.

Me redressant sur la pointe des pieds pour arriver à sa hauteur, je m'approche encore un peu de son visage et viens l'embrasser. Au début un peu surpris, il finit par poser une main sur ma joue et la caresser doucement. Au bout de quelques secondes pendant lesquelles le temps n'avance plus, j'ouvre finalement les yeux en souriant. Il fait de même avant de me serrer contre lui.

-Un instant, j'ai eu peur de me tromper sur ce que je voyais dans tes yeux. murmure-t-il.

-Heureuse que tu n'ai pas abandonné.

-Je n'aurais pas pu m'y résoudre.

Il me serre un peu plus fort avant de se retourner vers le paysage.

-Le soleil se lève, on devrait rentrer. Depretyo devrait être parti maintenant.

-Déjà ? dis-je d'une mine boudeuse.

-Et oui, dit-il en souriant à mon expression, mais je te le répète, tu m'appelle, je suis là en dix minutes.

-Tu sais qu'avec un tel arrangement, je risque de t'appeler tout le temps ? dis-je en penchant la tête sur le côté, amusée.

-Ce qui veut dire que je serais tout le temps avec toi. En y réfléchissant, ça ne me dérange absolument pas. dit-il en ricanant. Allez, en voiture, je te ramène.

Le sourire aux lèvres, il m'ouvre la portière avant pour que je m'installe sur le siège passager. Il fait le tour avant de s'installer au volant. Avant de démarrer, il me regarde un instant.

-Tout va quand même super vite non ? On s'est rencontré ce matin, tu es devenue la nouvelle propriétaire du Synthési et après que Depretyo t'ai attaquée, tu m'embrasses. Tu aurais pu te tromper sur tes sentiments à cause des émotions de la journée. finit-il par dire d'un air inquiet.

-Non, je ne me trompe pas. Je veux apprendre à te connaître, et je veux que tu me connaisses. Je veux être avec toi. Pas toi ?

-Bien sûr que si, pardon d'en douter, c'est juste ... irréaliste.

Coupant court à ses réflexions, je m'approche pour l'embrasser à nouveau. Il démarre alors la voiture et reprend la route. La sensation qui parcourt mon corps, tout en le réchauffant, est spécialement agréable, sans que je comprenne clairement ce qu'elle faisait là. La route a été rapide et alors que les premiers rayons de soleil passent à travers les branches, Dreiko se gare devant chez moi. Il descend de la voiture et répète le même schéma exécuté plus tôt dans la nuit pour me faire descendre à mon tour. Il me serre dans ses bras et me chuchote :

-Promet moi de faire attention à toi ?

-Je te le promets. dis-je en souriant.

Après un dernier baiser, il me lâche enfin et s'éloigne dans la forêt au volant de la voiture. Je fais alors volte-face et gravis les marches qui mènent au perron, un grand sourire au lèvres. En poussant la porte d'entrée, je m'attend à trouver une Maria complètement paniquée qui m'aurait sauté dans les bras, au lieu de quoi, je me heurte au silence d'une maison paraissant vide. Soudainement inquiète, je vais directement dans la salle de recharge de Maria, pensant la trouver encore sur son siège en train de recharger ses batteries. La pièce en elle-même est assez simple. Au centre se trouve une sorte de chaise longue, le siège de Maria. Un long câble serpente au sol mais n'est relié qu'à la batterie centrale. Le siège est vide. Une boule se forme alors dans mon estomac et je me mets à fouiller chaque pièce de la maison. La salle de bain est vide. Le salon et la cuisine aussi. A ma grande surprise, c'est sur mon propre lit que je retrouve Maria, comme endormie. Elle avait dû s'y allonger jusqu'à la décharge totale. Rassurée de la voir saine et sauve, je m'approche d'elle et la porte jusqu'à la salle de recharge. Une fois les branchements vérifiés, je quitte la pièce. Je culpabilise alors un peu d'avoir disparue sans prévenir, mais elle n'aurait sûrement pas été capable de gérer ça. N'ayant aucune envie de dormir, je vais m'installer dans le canapé avec de quoi grignoter. Si Maria me voyait, elle ralerait sûrement. Une série de films romantiques, totalement à l'eau de rose, est diffusée. Soudainement absorbée par les images qui défilaient devant mes yeux, j'en oublie presque le monde autour de moi. Pourquoi ces films me captivent-ils autant ? Alors que la fameuse scène du baiser amoureux approche, un bruit très discret me parvient du fond du couloir. Un léger grincement comme une porte que l'on ouvre. Le grincement cesse rapidement, remplacé par des bruits de pas très légers, comme feutrés. Bruits de pas qui se dirigent vers le salon.

-Maria ? dis-je doucement.

Personne ne répond alors que le bruit que j'entend se rapproche. La maison est plongée dans l'obscurité. La seule lumière provient de la télévision. Alors que je fixe le couloir, une masse en sort silencieusement. Une louve en fait. Une magnifique louve. Son pelage est roux jusqu'au bout de sa queue et ses yeux sont ambrés, rendant son regard assez perçant. Mais sa façon de me regarder, de me fixer en s'approchant lentement lui donne un air assez menaçant qui me force à reculer et à m'enfoncer dans le canapé.

-Pfff ... tu empestes l'amour. résonne une voix de femme dans ma tête.

-Pardon ...? Vous ... vous êtes comme Sority ?

-Je suis une abnobiote chérie. Me compare pas à mon frère comme ça. De toute façon, tu connais beaucoup de loup qui parle ?

-Euh ... et bien non mais ... c'est que ... dis-je avec difficulté.

-Enfin bref, je suis Yamorie, entité de la jalousie. Comme je le disais, tu pues l'amour.

-Ce qui veut dire ? dis-je un peu perplexe.

-Ce qui veut dire que quelqu'un a pris notre place dans ton cœur. dit-elle doucement. Tu ne peux pas t'occuper de nous si quelqu'un d'autre occupe tes pensées.

-Mais je ne suis pas amoureuse. Dreiko n'a rien à voir avec ça.

-Oh je sais, ne t'en fais pas. Je vais m'occuper du responsable, mais avant ...

Elle pose ses pattes sur mes genoux avant de lever la tête pour pousser un hurlement qui, sur le moment, me semble sinistre. Tout commence à devenir noir autour de moi et je perds connaissance.

*

J'ouvre les yeux avec une légère migraine. L'oreiller sous ma tête empêche mon cou de se tordre et la couverture, remontée jusqu'à mes épaules, me protège du froid qui entre dans le salon par la baie vitrée grande ouverte. Maria, silencieuse, est assise dans le grand fauteuil, en face de moi, un livre dans les mains. Elle lève la tête en me sentant remuer à côté d'elle. Elle pose son livre sur la table.

-Bonjour, bien dormie ? dit-elle avec un petit sourire. Tu as dû rentrer tard, je ne t'ai pas entendue.

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 31, 2022 ⏰

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