-On va où ? dis-je d'un regard triste, preuve de l'emprise de Depretyo sur moi.
-J'ai exactement ce qu'il te faut si tu me fais confiance. dit-il en ouvrant la portière côté passager.
Avant de faire ne serait-ce qu'un pas, un nouveau hurlement brise le silence de la forêt, encore plus proche de nous. Une nouvelle vague de douleur m'envahit alors que je tombe au sol en pleurs.
-Danaé ! dit-il en me relevant. On doit partir ! Il finira par se calmer un de ces quatre.
Avec son aide, je m'assois sur le siège avant. Il fait rapidement le tour et se met au volant. Alors même qu'il commence à partir en marche arrière, un énorme hibou vient se poser sur le capot de la voiture en me fixant de ses grands yeux bruns.
-Tu as de la chance ... dit simplement sa voix tremblante dans ma tête.
Dans un léger frisson, je le regarde s'envoler vers la maison. Soudain inquiète pour Maria, je me tourne vers Dreiko. Comme si il lisait dans mes pensées, il me répond :
-Tu viens de le voir, n'est-ce pas ? Ne t'inquiètes pas, sans ton accord, il ne peut s'en prendre à personne. Sauf à toi, comme tu l'as remarqué.
Dans sa voix, je sens comme une pointe de colère. Il tient le volant, les mains crispées, alors que les lumières de la ville apparaissent déjà à l'horizon. Essayant de détendre l'atmosphère, je dis :
-Merci Dreiko.
-Euh ... Merci de quoi ? dit-il, visiblement surpris de mon intervention.
-D'être venu. De m'aider. dis-je en tournant la tête vers lui.
-C'est normal, je t'ai pas donné mon numéro pour rien. dit-il souriant.
Le suivant d'un petit ricanement, je reporte mon regard sur le paysage qui défile à toute vitesse. Celui-ci n'a d'ailleurs plus rien à voir, ni avec la ville, ni avec la forêt que je connais. Il n'y a que quelques arbres au bord de la route. Dreiko ne tarde d'ailleurs pas à arrêter la voiture près d'une petite barrière. Ouvrant sa portière, il descend et fait le tour du véhicule pour venir ouvrir la mienne. Il me tend alors sa main.
-J'ai quelque chose à te montrer. dit-il en souriant d'une voix posée.
Il prend délicatement la main que je lui tend en retour et m'aide à sortir de la voiture avant de me guider jusqu'au bord d'une falaise, surplombant la ville.
-Wouah ... C'est vraiment magnifique !
Dreiko m'apporte alors une couverture qu'il vient de sortir de la voiture et me la glisse sur les épaules.
-Je venais souvent ici quand mon père oubliait ma présence ... dit-il en baissant la tête, lui aussi sous une couverture.
-Je suis désolé de la vie que tu as eu à cause du Synthési ...
-Pourquoi tu t'excuses ? Rien n'est de ta faute.
Il s'éloigne un peu du bord de la falaise pour venir s'asseoir à même le sol, adossé contre un rocher. Je fais de même et viens m'asseoir auprès de lui.
-Pourquoi cet endroit ? lui demandais-je en brisant le silence.
-Je le trouve juste ... magique. On voit toute la ville d'ici. On voit même ta maison, regarde. dit-il en pointant un petit point lumineux en plein milieu de la forêt. Au fait, j'ai une question. Qui est Maria ?
-C'est ma mère. dis-je tout naturellement. Enfin, pas vraiment. je suis orpheline. Mais Maria s'occupe de moi depuis ma naissance. C'est un bot familier. dis-je en observant les étoiles, une en particulier, un peu plus brillante que les autres.
-Un bot ? Woaw ... j'en ai jamais eu, c'est difficile d'en avoir à Vulom ; ils sont réquisitionnés pour les services publiques. Où l'as-tu eu ? dit-il en se tournant vers moi.
-Je pense que mes parents me l'ont laissé. Ce qui, dans un sens, voudrait dire qu'ils n'ont pas eu le choix de m'abandonner. dis-je avec un léger sourire. C'est peut-être stupide mais c'est ce qui m'a fait tenir le coup toutes ces années.
-Non, ce n'est pas stupide du tout, je suis d'accord avec toi. Les bots sont une technologie avancée, qu'ici, peu d'entre nous ont la chance de posséder. Ma mère en avait un. dit-il d'un ton soudain un peu plus sec.
-Oh ... et, qu'est-ce qui s'est passé ? dis-je pour l'inciter à continuer.
-Elle est morte, peu de temps après ma naissance.
-Je suis désolée ... mais je ne comprends pas, normalement un bot se transmet, comme un membre de la famille, ce qui veut dire que tu aurais dû en hérité, toi ou ton père.
-C'est bien ce qui s'est passé, mais mon père a préféré le vendre, lui et toute sa mémoire, parce qu'il se méfiait du Synthési.
-C'est horrible ! Les bots ne sont pas des objets qu'on peut vendre comme ça.
-C'est trop tard maintenant ... mais ça va, je suis passé à autre chose depuis bien longtemps.
Alors que son regard se repose sur le paysage, le vent se lève. Un frisson me parcourt de la tête aux pieds. Dreiko le remarque et s'approche de moi. Mon sentiment de tristesse omniprésent me quitte enfin, je fixe l'horizon, blottis sous ma couverture. La vue est incroyable. Chaque lumière allumée en ville est comme une petite étoile bloquée au sol tandis qu'elle voudrait s'élever jusqu'au ciel. L'une d'entre elles a même l'air de flamber comme une toute petite flamme de bougie. Petite flamme qui grandit à vue d'œil. Non. Attends. Elle se rapproche de nous. J'ai alors un mouvement de recul, qui inquiète Dreiko.
-Eh ! Qu'est ce qui va pas ? dit-il en suivant mon regard vers l'horizon sans comprendre.
-Tu ne la vois pas ? Oh, non rien, désolé. J'ai eu ... un frisson. dis-je en le regardant, penaude.
-Alors viens par là.
En souriant, il me fait signe de me glisser sous sa couverture et donc, dans ses bras. Heureusement qu'il fait nuit, car en plein jour il aurait pu voir mes joues devenir écarlates. J'ai étonnement chaud d'un coup. Mais ne voulant pas éveiller le moindre soupçon, ni sur ce que je vois dans le ciel, ni sur la moindre pensée que je pourrais avoir en ce moment, je me rapproche de lui. Il me serre contre lui, partageant sa chaleur corporelle ; chose dont je n'ai absolument plus besoin. Alors que la boule de feu est de plus en plus proche de nous, je commence à en distinguer vaguement la forme. Deux grandes ailes et un long bec ? Un oiseau ? L'oiseau de feu en question passe si proche de nous que je sens ses flammes me caresser le visage.
-Tu n'as rien vu ? ne puis-je m'empêcher de demander à Dreiko en le voyant rester indifférent.
-Vu quoi ? rétorque-t-il
-Ah euh ... il y a un petit écureuil qui est passé juste devant !
-Oh ! C'est vrai ? Dommage je n'ai rien vu.
-Oh ... tant pis. Alors il ne l'a vraiment pas vu... un abnobiote ?
La créature avait laissé derrière lui une pluie de cendres, que je regarde entamer lentement leur descente. L'une d'elle se pose sur ma main et je ressens très rapidement une vive brûlure. D'un geste brusque, je secoue ma main pour en retirer la petite braise. Dreiko me regarde confus puis regarde ma main.
-Qu'est-ce qui se passe ?
-Rien ne ... rien de grave juste ... un insecte ! J'avais un insecte sur la main. dis-je d'un sourire timide.
-Un insecte ? répète-t-il indécis.
-Oui, un petit scarabée je crois.
Décidément, je ne suis pas prête d'arrêter de rougir ce soir. Lui, reporte finalement son regard sur l'horizon en ricanant.
-Tu ne serais pas casanière par hasard ? demande-t-il soudain en souriant.
-Eh bien, on peut dire ça comme ça. Je sors uniquement pour me rendre en ville quand on a besoin de faire quelques courses.
-Comment tu peux vivre comme ça, sans contact avec la ville ? Tu n'as pas d'amis en ville ? dit-il en se tournant vers moi.
-Maintenant si. réponds-je en souriant.
VOUS LISEZ
Do you feel it
FantasyDanae, jeune fille orpheline, vit aujourd'hui seule avec Maria, un bot doté d'une intelligence artificielle. Apres avoir fait la connaissance d'Ezekiel, nouveau libraire récemment installé dans le centre ville d'Auriel, un étrange livre entrera dan...