Pomf et ses compagnons étaient plongés dans l'obscurité, à présent que la montagne derrière eux avait repris sa forme d'origine. Pourtant, les ténèbres qui les entouraient n'avaient rien d'oppressant. Au contraire, peut-être était-ce dû à la paroi elle-même imprégnée de l'essence de ses hôtes, ils n'auraient su dire, mais il émanait du lieu une quiétude bienvenue. Saisissant délicatement le manche de sa hache attachée en travers de son dos, Yraamu ramena cette dernière devant lui d'un geste fluide. Infusant une fraction de son pouvoir dans son arme, les motifs qui ornaient sa lame s'illuminèrent, éclairant alors faiblement de leur radiance bleutée la cavité au sein de laquelle ils progressaient. Aucun son, sinon celui de leurs pas résonant puissamment, amplifié par l'écho naturel et parfait du lieu. Aucune odeur, sinon celle, naturelle, de leur sueur mêlée au crin de lamasticot.
Leurs sens étaient en alerte, dans un état d'hypersensibilité provoqué par ce manque inhabituel de stimulation. Une luminosité extrêmement ténue, aucune trace d'aménagement, ils étaient bel et bien livrés à eux-mêmes, avançant à l'aveugle, incapables de voir à plus de quelques mètres devant eux dans un labyrinthe qui, leur semblait-il, ne connaissait ni début ni fin. Un lieu comme situé en dehors de l'espace et du temps.
Hugo, alerte, refusait de baisser sa garde, une partie de lui étant persuadée, comme à son habitude, que tout cela ne pouvait être qu'une embuscade. Pomf quant à lui affichait une mine apaisée, tranchant d'ailleurs radicalement avec son air soucieux des jours précédents. Il semblait qu'une partie du poids qui l'oppressait s'était soudainement envolée. C'était probablement du fait de l'atmosphère rassurante qui les enveloppait, se dit Yraamu, mais au vu du comportement du jeune épéiste depuis la confrontation au pied du mont Dyskorda, mieux valait le garder à l'œil. Il n'était pas lui-même conscient de ce qui l'attendait.
« - Bon l'un d'entre vous aurait-il une idée pour nous sortir de là ? Personne ? Bon ben je me lance alors je commence à m'ennuyer un peu pour ne pas vous mentir »
N'attendant aucune réponse, Hugo se saisit de son bâton et, s'élançant en avant, invoqua une plateforme saline sous ses pas, canalisant d'un même geste une sphère translucide et scintillante, reflétant l'éclat bleuté projeté par la lame d'Yraamu. Puis, d'un geste brusque le propulsant en arrière, Hugo projeta sa création vers les profondeurs insondables de la caverne. Yraamu le regardait médusé tant par les agissements impulsifs de son camarade que par l'air béat d'admiration de Pomf, qu'il commençait à trouver particulièrement impressionnable. Quelques secondes passèrent. Longues. Interminables. Soudain, le bruit sourd d'un choc parvint à leurs oreilles. Ce qui les étonna en revanche, ce fut la sonorité cristalline qui l'accompagna, semblable au tintement d'un carillon.
Marmonnant quelques mots incompréhensibles, parmi lesquels Pomf put identifier « Hugo », « imbécile », et « brillant », Yraamu inversa sa prise sur sa hache et se rapprocha de la paroi rocheuse du chemin qu'ils suivaient, laissant sa hache frotter contre cette-dernière. En lieu et place du grattement caractéristique de l'acier contre le granite que Pomf s'attendait à entendre, une note claire résonna fortement, les enveloppant corps et âme. Au-dessus de leurs têtes, une par une, des sphères incandescentes flottaient dans l'air, semblant à la fois lointaines, suspendues à un plafond se trouvant à une hauteur insondable, et proches du fait de la lumière diffuse et ambiante qu'elles produisaient.
Des veinures pulsaient dans la paroi, étrangement animées, comme si la montagne elle-même était un être vivant, dont le cœur battait en rythme avec l'activité des hôtes qu'elle accueillait. Rejoignant Hugo, Yraamu le fixa longuement, échangeant avec lui tacitement. Alors, d'un geste brusque et contenu, la main levée au-dessus de sa tête à 45 degrés, il l'abattit sur la tête d'Hugo :
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L'héritier des Abysses
FantasíaDans un monde ravagé par une catastrophe d'origine inconnue, seules subsistent des cités états, séparées des étendues dévastées et refermées sur elles mêmes. Les nobles, vivant dans l'opulence au sein des quartiers riches, ne se montrent jamais aux...