Je serre toujours la crosse de l'arme entre mes doigts puis je prends comme à chaque fois, une grande inspiration pour passer à l'étape suivante. C'est devenu comme un rituel que j'exécute tout les jours sans exception car c'est le seul moyen que j'ai trouvé pour être au plus près de toi.
Heureusement pour moi, le parc est vide alors je profite de cette accalmie pour faire dans ce lieux si sacré à mes yeux, ce qu'il doit être fait pour ne pas sombrer encore plus.
Je place le canon froid de l'arme dans ma bouche. Mes mains ne tremblent pas, elles sont habituées à jouer avec la mort comme si elle était une vielle amie. Il m'a fallut du temps pour faire ma première fois sans avoir peur de la suite. Cette idée terrifiante que ma vie se tient seulement entre mes mains. Une pression supplémentaire et c'est la fin de tout. Il m'a fallut encore plus de temps pour me rendre compte que j'étais maître de mon destin et que moi seule, déciderait de la voie à prendre. Je suis toujours emprisonnée dans cette peur de mourir, peur de quitter ton père, de quitter ma vie, peur de l'inconnue et de la suite mais en y réfléchissant bien, peu de chose me relie encore à la vie.
Je suis une âme en peine qui erre dans le labyrinthe de la vie en attendant qu'on vienne la libérer de ce fardeau.
Je ne suis pas encore prête à franchir le pas et à venir te rejoindre alors en attendant, je prie pour que ce soit la mort qui vienne me ramener à toi.
En fermant les yeux, je plonge dans cette obscurité temporaire avant que la lumière ne revienne. Je vois défiler les jours heureux avec toi. Des millions d'images qui disparaissent aussi vite qu'elles sont apparues emportés par le souffle du vent. Soudain dans ce film instable, une image parmi tant d'autres se stabilisent. D'abord flou puis de plus en plus nette, je finis par entrevoir une silhouette, la tienne.
Je me tiens debout, les pieds dans le sable avec la brise marine qui balaie langoureusement mon corps. L'air salé revitalise mon esprit et chaque parcelle de ma peau que j'ai la sensation de revivre comme une bouffée d'air après avoir passé tellement de temps en apnée.
Je finis par détourner le regard de l'horizon pour le fixer sur toi. Tu es tellement proche de moi, tellement réel que j'ai l'impression que mon coeur va exploser. Sans m'en rendre compte, je me suis mise à pleurer. Alors, je pleure, d'abord silencieusement puis de façon incontrôlable. Ma vision se brouille, mes yeux me brûlent et je finis par tomber à genoux dans le sable. Je n'ai plus la force de faire semblant, plus la force d'intérioriser ses sentiments destructeurs. Je laisse tout sortir et je n'essaye même pas de stopper le déferlement qui se produit sur mon visage.
Tellement préoccupée à ne pas me noyer, que j'en ai oublié ta présence, alors quand je relève la tête pour voir si tu es toujours là ou si tu n'es qu'une de ses illusions maudites, et que je finis par te voir à seulement quelques centimètres de moi, une émotion disparut depuis longtemps refait surface. L'amour, le vrai, l'inconditionnel. Je n'ai pas le temps de me poser d'autres questions, que tu te jettes sans retenue dans mes bras.
L'espace d'un instant, je reste figée, incapable de bouger et de te serrer contre moi. C'est comme-ci la machine était rouillée, cette impression terrassante de ne plus savoir comment être une maman. Puis un loquet saute dans mon esprit et tout me revient en rafale, je sais de nouveau comment agir envers toi alors mon corps finit par réagir automatiquement au tien et je te serre à mon tour contre moi.
Je ressens à nouveau ton souffle contre ma peau. Mes narines sont de nouveau plongées dans des cheveux de blés. L'odeur de ta peau hérisse mes poils et la chaleur de ta peau réchauffe mon coeur de glace.
C'est comme-ci une bulle hors-du-temps venait à l'instant de se créer. Un endroit loin des ténèbres et de la souffrance, un endroit où juste toi et moi cohabitons.
Mes larmes coulent encore le long de mon visage mais ce sont des larmes de gratitude et de reconnaissance. Je suis tellement reconnaissante envers l'Univers de m'offrir du temps supplémentaire dans tes bras. Je sais au plus profond de moi que ce n'est qu'éphémère, un stratagème monté de toute pièce par un cerveau suffoquant sous le poids de la douleur et pourtant je ne peux m'empêcher de m'y jeter corps et âme. Car l'espace dun instant, tu es là, je suis là, et pour la première fois depuis des mois, je ne ressens que toi. Plus de douleur, plus de noirceur, juste mon amour débordant à ton égard.
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De l'ombre à la lumière ( côté lumière )
Historia CortaComment continuez à vivre lorsque la seule personne qui donnait un sens à cette vie vient à disparaître tragiquement? Plongez-vous dans la vie d'une mère en proie au ténèbres qui essaye malgré la douleur de survivre. Ceci est un one-shot assez cour...